Le chef de l'extrême droite italienne pose ses conditions pour un gouvernement d'union

Valérie Dupont - Correspondante à Rome
Le chef de l'extrême droite italienne pose ses conditions pour un gouvernement d'union
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La Ligue et le Mouvement 5 Etoiles ont obtenu un rabiot pour la formation de leur gouvernement.

Chaque matin, les Italiens se demandent désormais si ce sera finalement le jour décisif, le nom mystère du futur président du conseil tient en haleine le pays tout entier. "Nos footballeurs ne seront pas en Russie mais au moins on aura le feuilleton du gouvernement pour animer nos journées",affirme en souriant, un retraité qui achète son journal du matin. Autant dire que les Italiens pensent que la saga politique est loin d’être terminée vu que chaque jour apporte son lot de rebondissements.

"Nous avons demandé (au Président) quelques jours de plus pour finaliser les discussions sur le programme", annonce Luigi Di Maio, cintré dans son costume foncé et dans son impeccable chemise blanche, en sortant du bureau du palais présidentiel où il a rencontré Sergio Mattarella pour un entretien entre quatre yeux qui a duré près de quarante minutes. Et voilà la nouveauté du jour, alors qu’hier les deux chefs politiques affirmaient être prêts à présenter leur programme et proposer le nom d’un président du Conseil au chef de l’Etat, ils annoncent un autre report pour la formation de cet exécutif.

Apparemment se mettre d’accord sur le programme est plus compliqué que de lancer un tweet. "J’ai dormi une heure cette nuit et je tiens grâce au café, et j’ai peut-être mal choisi mon moment pour arrêter de fumer", écrit Matteo Salvini sur les réseaux sociaux, "mais je suis orgueilleux de m’investir pour maintenir les promesses et donner un futur meilleur pour l’Italie et nos enfants".

Peu de détails filtrent sur les éventuels blocages. Apparemment, chaque parti réussit à défendre ses promesses électorales, mais la question migratoire est au centre des tensions, affirme Matteo Salvini en sortant du bureau présidentiel. Il insiste sur l’importance d’avoir une vision commune sur l’Europe ce qui selon La Ligue doit passer par une abolition ou au minimum une plus grande flexibilité des limites de budget imposées par l’Union européenne. "Ce sont ces limites qui nous empêchent d’investir pour mettre par exemple les écoles de nos enfants en sécurité, et encore aujourd’hui des élèves ont failli mourir sous le toit de leur école qui s’est écroulé", a expliqué Matteo Salvini, qui jongle avec les arguments populistes même en sortant de l’entrevue présidentielle. "Nous ne voulons pas nous moquer des Italiens, en disant que tout va bien alors qu’il y a encore de nombreux points en suspens", admet le Milanais.

Le nom mystère

"Avec Salvini on est d’accord de ne pas annoncer publiquement le nom du Premier ministre", affirme Luigi Di Maio, qui a encore tenté une nouvelle fois hier de se proposer pour le poste. Son partenaire de La Ligue l’a une fois de plus renvoyé dans les cordes. "Di Maio est entré Pape mais sortira Cardinal", s’amuse un journaliste en reprenant une phrase que l’on entend souvent à Rome lors des conclaves de l’autre côté du Tibre. La presse italienne bruisse de noms, Giulio Sapelli, un économiste proche de La Ligue qui avoue avoir été contacté mais que les "grillons" ont balayé ou encore Giuseppe Conte, un juriste qui avait été inséré dans le gouvernement virtuel du Mouvement 5 Etoiles.

"Pauvre Salvini, c’est Mattarella qui choisit le Premier (ministre)", titre le quotidien de la famille Berlusconi "Il Giornale", comme pour rappeler les règles constitutionnelles aux deux jeunes politiciens jugés "arrogants" parce qu’ils veulent tout décider. "Je ne me passionne pas pour la recherche d’un nom, mais je me bats pour les choses à faire", explique Matteo Salvini, estimant que le Premier ministre devra être l’exécuteur du programme commun si les deux formations réussissent à se mettre d’accord, une aberration affirme certains qui rappellent qu’en Italie, normalement, le programme est justement construit autour de la personne du Premier ministre pour éviter le petit jeu d’influence des partis politiques. Et c’est sans doute sur le nom mystère que Sergio Mattarella entend bien utiliser tout le pouvoir que lui confère la Constitution, car s’il ne peut intervenir sur le programme politique, fruit de la volonté électorale, il peut choisir un vrai garant qui devra rassurer les voisins européens et qui aura le charisme pour résister aux pressions des deux "faiseurs de Roi." Mais en attendant ce moment, le Président a concédé quelques jours supplémentaires pour la formation de ce gouvernement inédit en Europe.

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