Un an ferme pour la journaliste accusée d'IVG au Maroc: elle fera appel et dépose plainte pour torture
Hajar Raissouni, jeune journaliste et son compagnon ont été condamnés chacun à un an de prison ferme pour avortement illégal et relations sexuelles hors mariage.
Publié le 01-10-2019 à 15h59 - Mis à jour le 01-10-2019 à 18h28
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Tous les défenseurs des libertés individuelles au Maroc sont atterrés après la condamnation à un an de prison ferme, lundi, de la jeune journaliste poursuivie pour avortement illégal. “Hier, tout le monde était choqué”, raconte Aziz Rhali, président de l’Association marocaine des droits de l’homme. Hajar Raissouni, jeune journaliste et son compagnon ont été condamnés chacun à un an de prison ferme pour avortement illégal et relations sexuelles hors mariage. Le médecin, accusé d’avoir pratiqué l’avortement a été condamné à deux ans de prison ferme, son anesthésiste à un an de prison avec sursis et son assistante à huit mois de prison avec sursis. L’affaire était très suivie au Maroc car la jeune femme n’est pas une inconnue : journaliste pour le grand quotidien conservateur Akhbar Al Yaoum, elle est également la nièce d’Ahmed Raissouni, président de l’Union internationale des oulémas musulmans et ancien président du Mouvement unicité et réforme (Mur), la matrice idéologique du PJD, le parti islamiste actuellement au pouvoir. Pour ses défenseurs, c’est à la fois son travail de journaliste et sa “famille politique” qui sont visés à travers elle.
Depuis le verdict, tous les défenseurs des libertés individuelles du pays dénoncent dans la presse et sur les réseaux sociaux les condamnations et la lourdeur des peines même si elles auraient pu être encore supérieures. Selon la loi, la jeune femme risquait six mois à deux ans de prison, pour avortement illégal, et un mois à un an de prison pour relations sexuelles hors mariage.
"Nous allons faire appel"
Tous ses avocats avaient cru, à l’issue de la précédente audience, avoir fait vaciller l’accusation. “J’ai apporté la preuve scientifique qu’avec un taux d’hormone Béta HCG de 13 000mUl/ml de sang, largement inférieur à ce qu’il devrait être à 7 ou 8 semaines de grossesse, Hajar Raissouni n’était pas enceinte au moment de sa visite chez le médecin”, estime Me Meryem Rchid Sellami. Si la présence de cette hormone, spécifique à la grossesse, dans le sang de Hajar Raissouni prouve qu’elle a bien été enceinte, rien n’empêche qu’elle ait subi une fausse couche.
Le refus du juge d’entendre les arguments de la vingtaine d’avocats chevronnés portés au soutien de la jeune femme était très probable car celui-ci avait déjà refusé sans nuance toutes leurs requêtes concernant le respect de la procédure, y compris de permettre aux prévenus de comparaître en liberté provisoire.
“Nous sommes dans l’incompréhension la plus totale et nous allons attendre l’exposé des motifs du verdict, qui seront bientôt publiés pour voir ce qui a pu justifier une telle décision aux yeux du juge”, explique Me Sellami. “Nous allons faire appel dès aujourd’hui, mardi”. L’affaire se poursuivra donc en appel tandis que les prévenus resteront vraisemblablement en détention préventive, comme en première instance. “Par ailleurs, Hajar Raissouni a déposé plainte pour torture suite à l’examen médical forcé qu’elle a subi peu après son arrestation, destiné à prouver qu’il y avait eu avortement”, ajoute Aziz Rhali.