Des femmes ont vécu un calvaire dans une "usine à bébés" au Nigeria
Elles sont détenues par des trafiquants, qui vendent leurs bébés.
Publié le 03-10-2019 à 19h43 - Mis à jour le 03-10-2019 à 20h25
:focal(1005.5x810.5:1015.5x800.5)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/7CGDUP7E3BBJVMCT4HQ2GVWWMM.jpg)
Elles sont détenues par des trafiquants, qui vendent leurs bébés. Ce n’est pas la première fois mais deux nouvelles affaires d’"usine à bébés" ont créé l’émotion, cette semaine, au Nigéria.
Mercredi, la police de Lagos a annoncé avoir découvert une nouvelle "usine à bébés". Il s’agit d’établissements illégaux dans lesquels des femmes et jeunes filles enceintes sont gardées sous clé jusqu’à leur accouchement et la vente du bébé par les exploitants de cette prison clandestine. Il s’agit le plus souvent de jeunes filles peu scolarisées, issues de milieux pauvres. Dans certains cas, les jeunes filles et femmes ont été violées pour qu’elles enfantent afin de permettre cet impensable élevage.
Des mères de 13 à 28 ans
Mercredi, sept femmes enceintes ont été repérées à un arrêt de bus de Lagos. Interrogées par la police, elles ont expliqué avoir fui lundi soir, avec treize autres femmes, d’une "usine à bébés" ; ces treize autres n’ont pas été retrouvées.
Les sept femmes en fuite - âgées de 13 à 27 ans - ont pu donner des indications sur le lieu de l’établissement où elles étaient enfermées après avoir été "mises enceintes".
Quelques jours plus tôt, la police avait annoncé avoir libéré 19 autres femmes enceintes - âgées de 15 à 28 ans - d’autres "usines à bébés" dans un autre quartier de la métropole du sud du Nigéria. Les bébés filles y étaient vendus 760 euros, selon la police, les garçons 1 265.
Ce n’est pas la première fois que les Nigérians, consternés, apprennent l’existence de tels établissements.
Pour contenter des mères stériles…
L’affaire la plus retentissante avait éclaté en juin 2014, quand les épouses de hautes personnalités du Niger voisin avaient été incarcérées avec une dizaine d’autres femmes pour "supposition d’enfant" (délit par lequel on attribue la maternité d’un enfant à une femme qui ne l’a pas mis au monde), "déclaration mensongère", "faux et usage de faux" : stériles, elles avaient voyagé au Nigéria d’où elles étaient revenues avec un enfant en affirmant qu’elles avaient accouché dans le pays voisin.
Au Nigéria même, il y a déjà eu à plusieurs reprises des découvertes de "cliniques", "orphelinats" ou "institutions charitables" privés qui pratiquent la détention de femmes enceintes et la vente de leur bébé - avec ou sans le consentement de la mère. Si celle-ci accepte, elle reçoit une petite partie du prix de vente.
En 2011, l’Onu citait le trafic d’êtres humains en général comme le troisième crime le plus commun au Nigéria, après la fraude financière et le trafic de drogue. Elle estimait à dix le nombre d’enfants vendus chaque jour dans ce pays pétrolier, alors que les trafiquants sont rarement arrêtés.
… ou bien plus grave
Les bébés vendus par ce type d’établissement sont généralement offerts à l’adoption illégale. La police nigériane craint cependant que tous n’aient pas cette chance.
Ainsi, après la découverte d’une "usine à bébés" en juin 2011 à Aba (sud du Nigéria) et la libération de 32 femmes enceintes - âgées de 15 à 20 ans - un commissaire de police de l’État fédéré d’Abia avait déclaré, selon The Guardian, que le propriétaire de l’établissement - le Dr Hyacynth Orikara, employé par la direction de la Santé de l’État d’Abia - était interrogé "sur des accusations selon lesquelles il vend normalement les bébés à des gens qui pourraient les utiliser pour des rituels ou d’autres buts". Les sacrifices rituels sont en augmentation au Nigéria - et dans d’autres pays d’Afrique subsaharienne - en liaison avec l’accroissement de la course à la richesse.
Des "usines à bébés" avaient également été découvertes dans l’État fédéré d’Enugu (Sud) en novembre 2008.
En 2013, dix-sept adolescentes enceintes de 14 à 17 ans et 11 bébés avaient été libérés d’une prison similaire à Umuaka (État fédéré d’Imo, Sud) ; toutes les filles étaient enceintes du même homme. Elles ne recevaient à manger qu’une fois par jour.Marie-France Cros