Comment le prix Nobel Abiy Ahmed a joué un rôle clé dans la détente historique entre l'Éthiopie et l'Érythrée
La réconciliation entre l’Éthiopie et l’Érythrée est intervenue en 2018 après 30 ans de guerre d’indépendance et d’hostilités.
Publié le 13-10-2019 à 13h48
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La réconciliation entre l’Éthiopie et l’Érythrée est intervenue en 2018 après 30 ans de guerre d’indépendance et d’hostilités.
Indépendance de l’Érythrée
En 1962, l’empereur éthiopien Haïlé Sélassié annexe l’Érythrée, alors "entité autonome" fédérée à l’Éthiopie. En mai 1991, après 30 ans de guerre contre le pouvoir central, les rebelles indépendantistes du Front populaire de libération de l’Érythrée (FPLE), qui ont grandement participé au renversement du régime de Mengistu Haïlé Mariam à Addis Abeba en s’alliant au Front populaire de libération du Tigré (FPLT) de Meles Zenawi, s’emparent d’Asmara et installent un gouvernement dirigé par le président Issaias Afeworki. L’Érythrée devient officiellement indépendante le 24 mai 1993 et récupère le contrôle des ports de Massawa et d’Assab, faisant perdre à l’Éthiopie son unique façade maritime, sur la mer Rouge.
Conflit meurtrier
En mai 1998, les deux voisins entrent en guerre. L’Érythrée accuse l’Éthiopie d’avoir changé le tracé de la frontière, long de quelque 1 000 km, resté flou à l’indépendance, tandis qu’Addis Abeba accuse Asmara d’avoir violé son territoire en envahissant la zone de Badme. Deux ans plus tard, après l’échec de négociations, l’Éthiopie lance une vaste offensive, enfonçant les lignes érythréennes. Un accord de paix, signé en décembre 2000 à Alger, met fin au conflit qui a fait quelque 80 000 morts. Une zone temporaire de sécurité, de 25 km de large le long de la frontière, est établie et surveillée par l’Onu.
Arbitrage international
En avril 2002, en collaboration avec la Cour d’arbitrage internationale de La Haye, une commission chargée de délimiter le nouveau tracé accorde des territoires à chaque partie, attribuant la région contestée de Badme à l’Erythrée, décision jugée "totalement illégale et injuste" par l’Éthiopie. Fin 2004, l’Éthiopie déclare accepter le "principe" de l’accord, réclamant toutefois des "ajustements", refusés par Asmara. Le gouvernement éthiopien demande notamment des consultations auprès des populations locales avant de retirer ses troupes de Badme. L’occupation de cette ville et la nécessité de se défendre contre l’Éthiopie sont depuis des années des arguments utilisés par le président Issaias pour justifier un régime parmi les plus répressifs au monde.
Graves tensions
En 2005, des mouvements de troupes sont à plusieurs reprises signalés dans la zone frontalière. La mission de l’Onu (Minuee) est entravée par les autorités érythréennes, qui accusent les Nations unies de favoriser l’Ethiopie, expulsent son personnel et lui interdisent le survol du pays en hélicoptère. Des affrontements périodiques laissent craindre une reprise d’un conflit à grande échelle.
Dégel et accord de paix
En juin 2018, le nouveau Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, qui a amorcé un train de réformes sans précédent, annonce vouloir mettre un terme au litige frontalier. L’Ethiopie est prête à appliquer l’accord de paix de 2000 et les conclusions de la commission sur la frontière. Le 8 juillet, une rencontre historique entre le Premier ministre éthiopien et le président érythréen, inimaginable quelques semaines plus tôt, a lieu à Asmara, saluée par la foule. Le lendemain, les deux dirigeants signent une déclaration commune mettant fin à l’état de guerre. Dans la foulée, Issaias Afeworki effectue une visite en Éthiopie. Des ambassades sont rouvertes dans les deux pays, les liaisons commerciales aériennes reprennent. En septembre 2018, les deux pays rouvrent deux postes frontières fermés depuis 20 ans, qui seront néanmoins refermés en décembre. Le 16, l’Éthiopie et l’Erythrée signent un accord de paix en Arabie saoudite.