Au Mali, la lutte contre les djihadistes remporte peu de succès
Le renversement et la mort, en octobre 2011, du président libyen Mouammar Kadhafi par une coalition mise en place par le président français Nicolas Sarkozy et le Premier ministre britannique David Cameron, a ouvert une période de chaos en Libye, dont les groupes djihadistes ont largement profité pour s’armer, s’accroître et essaimer.
Publié le 20-08-2020 à 08h51 - Mis à jour le 20-08-2020 à 15h24
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Fin 2011, les indépendantistes touaregs, tentés par une nouvelle rébellion contre Bamako, qui ne s’occupe guère des habitants du Nord-Mali, se sont acquis l’appui de trois groupes armés djihadistes qu’ils pensaient utiliser à leur profit pour relancer leur combat, en janvier 2012. Mais dès avril 2012, ces derniers - Aqmi (Al Qaïda au Maghreb islamique), formé autour d’un noyau d’Algériens ; le Mujao (Mouvement pour l’unification et le jihad en Afrique de l’Ouest), formé autour d’un noyau de Mauritaniens ; Ansar Dine, réunissant des Touaregs - n’ayant plus besoin de ce cheval de Troie, renvoyaient les indépendantistes touaregs à leurs tentes.
Avait suivi une année d’occupation du Nord-Mali par des djihadistes largement étrangers, imposant par la violence une version rigoriste wahhabite de l’islam, venue d’Arabie saoudite et inconnue des Maliens.
Les occupants djihadistes - Algériens, Mauritaniens, internationalistes venus des quatre coins de la planète pour soutenir les victoires au Mali, et Maliens essentiellement touaregs - avaient réprimé la version malienne de l’islam, détruisant les mausolées anciens élevés à la gloire de saints locaux, les statuettes qui les représentent et les amulettes traditionnelles - l’islam local ayant gardé des usages animistes préislamiques.
La Cour pénale internationale (CPI) a condamné, en septembre 2016, à neuf ans de prison le chef de la Brigade islamique des mœurs de Tombouctou pour son rôle dans la destruction de biens culturels.
Gants obligatoires pour les maraîchères
Les islamistes interdisaient aussi tout culte des saints, avec surveillance jusque dans les maisons. Interdits aussi les célébrations traditionnelles, les masques, les peintures, les écoles non coraniques.
Jouer au football, faire ou écouter de la musique, même dans l’intimité de la chambre à coucher, danser, porter des bijoux ou se maquiller - dans un pays où le maquillage est porté aussi par les hommes dans certaines ethnies, comme les Peuls ou les Touaregs - donnaient également lieu à des punitions sévères.
Interdit également : le port du vêtement traditionnel, obligatoirement remplacé, pour les femmes, par la tenue saoudienne, y compris les gants - imposés même aux vendeuses de légumes au marché.
Mariages temporaires et forcés
Une rigueur modulable puisque les occupants djihadistes pratiquaient le "mariage de convenance", union temporaire à l’issue de laquelle la femme peut être répudiée et qui servait à ne pas courir le risque d’être punis pour "adultère", puisque c’est ainsi que les rigoristes wahhabites considèrent les relations sexuelles hors mariage. Ces "mariages de convenance" étaient parfois forcés, ce qui a conduit la CPI à juger, depuis juillet dernier, pour "esclavage sexuel" notamment, un ancien commissaire de la police islamique de Tombouctou.
Ce dernier est également accusé d’avoir pratiqué la torture sur des détenus ; de leur avoir imposé des amputations punitives, des flagellations.