Tshisekedi passe en force
La prestation de serment de trois juges de la Cour constitutionnelle a eu lieu malgré l’opposition des kabilistes.
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Publié le 22-10-2020 à 13h30
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Remplacer les juges aux ordres d’un Kabila par des juges aux ordres d’un Tshisekedi, ce n’est pas faire progresser l’État de droit", ont tweeté les membres de la Lucha, ce mercredi après la prestation de serment des trois nouveaux juges de la Cour constitutionnelle nommés par ordonnance présidentielle.
Ce mercredi, dès les premières lueurs de l’aube, le peuple de l’UDPS, le parti de Félix Tshisekedi, était présent en nombre devant les grilles du Palais du Peuple de Kinshasa, il avait ainsi répondu aux appels à la mobilisation lancés la veille par les zélotes du parti.
Les députés du FCC (la plate-forme politique de Joseph Kabila largement majoritaire), comme les présidents de la Chambre (Jeanine Mabunda) et du Sénat (Alexis Thambwe) ont préféré adopter la politique de la chaise vide sans chercher la confrontation éventuelle avec les "combattants" de l’UDPS qui ne se sont pas fait prier pour investir le Parlement, comme s’il s’agissait d’une vulgaire arène sportive, pour soutenir au son du chant de leur parti leur président Félix Tshisekedi. Un président qui a visiblement goûté pleinement cette victoire face à… son partenaire de coalition.
Les trois juges désignés par le Président - contrairement à ce que prévoit la constitution congolaise - vont donc rejoindre les six autres juges de la Cour constitutionnelle dont le rôle est essentiel lors de la présidentielle ou en cas de conflit entre la présidence et le pouvoir législatif.
En passant en force, Félix Tshisekedi a démontré qu’il pouvait aller au bras de fer avec son "allié" qui détient - détenait - pourtant pratiquement tous les leviers du pouvoir. Il s’est aussi accordé un peu de répit en s’octroyant une majorité à la Cour constitutionnelle qui devrait lui éviter toute menace de destitution par les chambres.
Tshisekedi mène aux points
Tshisekedi a aussi semé un peu plus le doute dans les esprits des kabilistes qui ont vu leur part de gâteau se restreindre au fil des mois et qui ont de plus en plus le sentiment que leur autorité morale, l’ancien président Joseph Kabila, n’a ni les moyens ni peut-être l’envie de se battre pour eux.
"La défaite de ce mercredi est un revers de taille pour les Kabilistes qui, s’ils devaient être plus vénaux qu’idéologistes, pourraient être tentés de changer de crémerie", analyse tout en euphémisme un politicien congolais à la retraite.
Dans un combat de boxe, le commentateur accorderait ce round à Félix Tshisekedi. Mais les deux combattants doivent remonter sur le ring avec cette fois, en ligne de mire, la désignation du futur patron de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Le candidat de Kabila, Ronsard Malonda, tient la corde, mais fort de sa victoire du jour et du peu de cas qu’il semble faire de la loi, Tshisekedi peut espérer remettre en selle son poulain, Kadima, que certaines églises semblent désormais soutenir.
Restera ensuite ou en parallèle le débat autour du futur gouvernement. L’actuel Premier ministre Sylvestre Ilunga "ne fait pas le poids", comme le martèlent plusieurs membres du FCC. Mais Kabila peut-il prendre le risque d’organiser un grand remaniement dans le contexte actuel ? Pas certain. Les déçus de la Kabilie pourraient être encore bien plus nombreux et ce serait aussi prendre le risque de permettre à Tshisekedi de court-circuiter le mouvement en nommant un informateur qui pourrait brouiller les cartes. Un jeu de politique politicienne qui se fait évidemment sur le dos des Congolais et de toutes les institutions d’un pays qui ne cesse d’aller de Charybde en Scylla.