Avec une abstention record, les Algériens acceptent sans conviction la révision de leur Constitution: "Le pouvoir doit prendre acte de son échec et reconsidérer sa feuille de route"
Moins d’un électeur sur quatre s’est rendu aux urnes. Un échec de plus pour le président Tebboune.
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Publié le 02-11-2020 à 20h19
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Deux tiers des électeurs algériens (66,8 %) ont marqué leur accord à la révision de la Constitution, mais ils ne représentaient que moins d’un quart des inscrits (23,7 %). Le référendum organisé dimanche s’est soldé par un net désaveu pour les nouvelles autorités, à commencer par le président de la République. Abdelmadjid Tebboune, hospitalisé en Allemagne depuis la semaine dernière, avait fait de cette consultation populaire l’événement fondateur d’une "Algérie nouvelle" et un instrument de relégitimation près d’un an après son élection. Force est de constater que la population ne l’a pas suivi malgré une campagne référendaire menée à sens unique en faveur du "oui". Le Parlement avait déjà avalisé la révision il y a près de deux mois.
Le faible taux de participation, le plus bas jamais observé dans le pays pour un scrutin de ce calibre, peut s’expliquer, outre par la pandémie de Covid-19, par l’appel au boycott lancé par les militants de hirak, qui ne voient dans cette révision qu’un "changement de façade". Le mouvement de contestation pacifique qui a réussi l’an dernier à évincer le président Abdelaziz Bouteflika et son clan du pouvoir, souhaite toujours se débarrasser du "système" politique en place depuis l’indépendance du pays en 1962. La déconvenue est donc totale pour Abdelmadjid Tebboune, déjà le président le plus mal élu de l’ère des scrutins pluralistes en Algérie. Seulement 39,93 % des Algériens inscrits s’étaient déplacés lors de la dernière élection présidentielle, le 12 décembre 2019. Au référendum, si l’on retire les 900 000 électeurs de la diaspora dont les votes n’ont pas été comptabilisés, c’est un électeur sur cinq qui a voté dans le pays.
"Le pouvoir doit prendre acte de son échec"
"Une grande victoire du Hirak […] Le pouvoir doit prendre acte de son échec et reconsidérer sa feuille de route. Le processus de transition démocratique constituante est la solution", a réagi Saïd Salhi, le vice-président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH) après l’annonce des résultats, lundi. "Le résultat confirme l’échec des projets du pouvoir en place et son incapacité à concrétiser un consensus national autour de la Constitution", a renchéri Abderrazak Makri, le président du principal parti islamiste, le Mouvement de la société pour la paix, qui appelait à voter "non".
De son côté, le président de l’Autorité nationale indépendante des élections Mohamed Charfi a tenté de minimiser la faible participation, considérant que "les conditions dans lesquelles s’est tenu ce référendum étaient un défi pour toute activité politique de quelque nature que ce soit", en allusion aux restrictions liées à la pandémie de Covid-19. "Le fait que le peuple ait pu s’exprimer en toute indépendance a été un autre défi dans la construction de la nouvelle Algérie qui a commencé avec le ‘Hirak béni’ du 22 février" 2019, s’est-il félicité.