Entre inquiétudes et espoir, la Tunisie suit son Président : "Il n’est pas comme Ben Ali, ce n’est pas un dictateur"
Après le coup de force du Président, les islamistes d’Ennahda demandent des élections anticipées.
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Publié le 27-07-2021 à 21h12 - Mis à jour le 29-07-2021 à 17h50
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Faut-il craindre pour la révolution ?" titrait mardi le journal La Presse dans un éditorial, résumant en une formule les profondes inquiétudes et les multiples interrogations suscitées dans toute la Tunisie par le coup de force du président Kais Saied. En invoquant dimanche l’article 80 de la Constitution, le chef de l’État a déclaré l’état d’exception et pris les rênes du pouvoir exécutif. Une prise de pouvoir inattendue et mal comprise dans cette république refondée après la Révolution de 2010-2011 et que le Président a justifiée par des "périls imminents". lI a pour cela limogé le Premier ministre Hichem Mechichi, deux autres ministres et suspendu les travaux du Parlement pour une durée de trente jours. Le Président veut s’attaquer aux racines de la mauvaise gouvernance : la corruption, l’incurie.
Le travail du gouvernement cristallise depuis longtemps les critiques et le mécontentement d’une bonne partie de la population. Miné par les blocages politiques, il peine à opérer les réformes qui s’imposent face à la crise économique et sociale ainsi qu’aux défaillances du système de santé, lourdes de conséquences durant la résurgence actuelle de la pandémie de Covid-19.
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Ennahda, la principale formation au Parlement et de la coalition au pouvoir, est vent debout contre les décisions du Président. Le parti islamiste a indiqué mardi que "pour le bien de la vie démocratique", il était "prêt à la tenue d’élections législatives et présidentielle anticipées simultanées, afin de garantir la protection du processus démocratique et d’éviter que tout retard ne serve de prétexte au maintien d’un régime autocratique". Son président, Rached Ghannouchi, également président de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP, le parlement tunisien), a "affirmé à l’unanimité son rejet absolu et sa ferme condamnation de ce qui a été annoncé par le chef de l’État Kais Saied", dans un communiqué publié dans la nuit de lundi à mardi.
Espérance teintée de vigilance
L’espoir semblait pourtant dominer. Le principal syndicat et acteur important de la vie politique du pays, l’UGTT, s’est rangé avec une prudence teintée de vigilance derrière la manœuvre du président Saied. Dans la population, parmi les inquiétudes à l’égard d’une possible dérive autoritaire présidentielle, l’espoir est aussi de mise. "Kais Saied, c’est un prof (de droit), pas un politicien, il est comme nous", disait une Tunisoise interrogée mardi par l’AFP. "On est sûr de lui, il n’est pas comme Ben Ali, ce n’est pas un dictateur."
Les réactions internationales cultivaient elles aussi la vigilance. L’Union africaine a déclaré son attachement au "strict respect de la Constitution tunisienne" alors que l’Union européenne rappelait que "l’ancrage démocratique du pays, le respect de l’État de droit, de la Constitution et du cadre législatif doivent être préservés tout en restant à l’écoute des volontés et aspirations du peuple tunisien".