Constructions vulnérables, zone montagneuse, “tremblement de terre du siècle” : pourquoi le bilan du séisme au Maroc risque encore de s’alourdir
Vendredi soir, un puissant séisme a frappé six provinces, dont celle de Marrakech. Au moins 820 morts sont à déplorer, selon un bilan provisoire.
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- Publié le 09-09-2023 à 14h35
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Quelques heures après le séisme de magnitude 6,8 qui a frappé le Maroc, des premières inquiétudes ont commencé à naître à propos des zones les plus reculées du Maroc qui pourraient être touchées.
À ce stade, au moins 820 personnes ont péri dans ce puissant séisme dans la nuit de vendredi à samedi, provoquant d’énormes dégâts et semant la panique à Marrakech, haut lieu du tourisme, et plusieurs autres villes, selon un nouveau bilan officiel, établi un peu avant midi ce samedi. “Le plus puissant du siècle”, selon les mots de l’Institut national de géophysique.
On peut malheureusement s’attendre à un bilan humain beaucoup plus lourd"
Sur place, de nombreux experts ont fait part de leurs craintes par rapport aux zones montagneuses. Si le bilan semble davantage matériel qu’humain, du moins dans les villes d’Agadir et Marrakech, situées à 200 kilomètres au nord de l’épicentre du tremblement de terre, les régions les plus affectées se trouvent au sud de Marrakech.
”Beaucoup de constructions en briques ou en terre qui sont très vulnérables”
Dans cette zone, il s’agit surtout de régions montagneuses, notamment au sud de Marrakech où se trouvent des villages avec des populations habitant dans des maisons moins solides qu’en villes.
“Malheureusement, le bilan risque encore de s’alourdir dans les jours à venir, estime Jean-François Thimus, professeur émérite à l’UCLouvain et spécialiste en résistance des matériaux et stabilité des sols. Dans ces villages, il y a beaucoup de constructions en briques ou en terre qui sont très vulnérables aux effondrements. D’autant plus que l’aide apportée à la population ainsi que les secours vont mettre un certain temps à les atteindre. On peut donc malheureusement s’attendre à un bilan humain beaucoup plus lourd qu’annoncé à ce stade”.
Le plus puissant séisme du siècle”
Dans cette zone, les villages sont en effet “très nombreux” et difficilement atteignables pour certains, ce qui explique que l’évaluation du bilan soit “encore à faire” d’après les autorités. D’après Rémy Bossu, le responsable du Centre sismologique euro-méditerranéen, interrogé sur BFMTV, l’épicentre du séisme de magnitude 6.8 se trouvait dans les montagnes, dans la province d’Al-Haouz.
Des plaques tectoniques mouvantes
Ce qu’il faut savoir, c’est que la plupart de la sismicité au Maroc est liée aux mouvements le long de cette frontière des plaques, avec le plus grand risque sismique dans le nord du pays, près de la frontière.
”Dans cette zone, les plaques bougent et sont sous tension et à un certain moment ça relâche te le tremblement de terre se produit, explique-t-il. Ce n’est pas la première fois qu’il y a un séisme dans cette zone, il y en avait eu un à Agadir il y a 69 ans qui avait fait plus de 10.000 morts (NdlR ; en février 1960, près d’un tiers de la population d’Agadir mourait dans les décombres, plus de douze mille personnes). Une partie de la ville s’était effondrée. Ici, il y aura beaucoup de dégâts à Marrakech mais je ne pense pas que le bilan soit aussi lourd, les normes de construction ont évolué et il y a notamment de nouvelles règles concernant la stabilité des maisons (en imposant des matériaux de meilleure qualité, que ce soit au niveau de la brique et du ciment). Ici, ce sont surtout les petits villages autour qui seront touchés”.
Sur place, tous les secours se sont vite mobilisés, que ce soit les forces armées royales, protection civile, sapeurs-pompiers, autorités locales. Les centres régionaux de transfusion sanguine, notamment celui de Marrakech, demandaient à tous les habitants en mesure de le faire de donner leur sang pour sauver des vies.
“Les moyens financiers pour atteindre les villages devront être importants, souligne Jean-François Thimus. Concernant la reconstruction, il faudra plusieurs années avant de les remettre sur pied, surtout que la priorité ira surtout aux villes et moins aux petits villages qui risquent d’être plus touchés. Il faut voir aussi s’ils sont atteignables par la route car il y a dû y avoir un glissement de terrain, des ponts sont certainement aussi frappés. Le temps de les atteindre risque de prendre du temps, ce qui va augmenter les dégâts humains qui sont déjà lourds”.