Le pouvoir malien doit faire face à plusieurs fronts dans le nord du pays
Les juntes de trois pays du Sahel signent une alliance défensive.
/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/TB6RBRRB7ZFTLE2HFN72AKZUV4.png)
- Publié le 17-09-2023 à 19h24
- Mis à jour le 17-09-2023 à 17h45
:focal(2731x1829:2741x1819)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/EPPSI25MGJCMHHQFRXKRJJ43PY.jpg)
À Bamako, capitale du Mali, la junte militaire installée après le double putsch de 2020 et 2021 traverse une période particulièrement compliquée qui bouleverse les plans qu’elle avait établis initialement.
En cause, le regain d’activités dans les rangs des séparatistes touareg après dix ans d’une trêve relativement bien suivie dans le nord du pays. Une reprise qui s’inscrit également dans un mouvement de recrudescence d’attaques attribuées au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), affilié à Al-Qaïda. Deux fronts distincts qui ébranlent les positions de la junte militaire qui, après avoir obtenu le retrait - en cours - de la Minusma (mission de stabilisation de l’ONU), après dix années de déploiement, et le départ des troupes françaises, se retrouve seule en première ligne (malgré la présence des hommes de la milice russe de Wagner) et se montre incapable de tenir ses engagements sécuritaires. Une défaillance très mal vécue par la population locale qui ne peut que constater les limites des troupes nationales.
Face à cette situation, les militaires au pouvoir qui avaient annoncé leur intention de célébrer l’anniversaire de l’indépendance du pays en grande pompe ont été contraints de revoir leur volonté de faire la fête. Le colonel Goïta, investi président après le second coup d’État de 2021, a donc finalement ordonné au gouvernement d’allouer les fonds prévus pour ces festivités à "l’aide aux victimes d’une série de récentes attaques et à leurs familles", selon le communiqué lu en fin de semaine par le porte-parole du gouvernement.
Seul au front
Le retrait, en cours, des forces de la Minusma, qui doit être terminé pour le 31 décembre prochain, semble avoir joué un rôle déterminant dans le retour de la grogne armée des mouvements séparatistes dans le nord du pays.
En effet, progressivement, les troupes onusiennes transfèrent la gestion de leurs camps aux autorités maliennes, ce qui déplaît fortement aux mouvements séparatistes touareg qui estiment que ces bases onusiennes devraient passer sous leur contrôle. Une demande inacceptable pour le gouvernement malien qui est l’unique interlocuteur des autorités onusiennes.
Ces tensions qui se font jour devraient encore se développer dans les prochaines semaines. En effet, d’ici la fin de l’année la Minusma doit évacuer toutes ses positions, y compris celle de Kidal, ville névralgique pour les mouvements touareg.
Pour la junte militaire, aucune concession possible. "Les bases de Tessalit, d'Aguelhok, de Kidal, nous allons les prendre", a promis le Premier ministre, Choguel Kokalla Maïga, lors d'une intervention à la télévision d'État ce mercredi soir après que l'armée malienne a annoncé avoir mené une série de frappes aériennes contre des "terroristes" dans le Nord, dans les secteurs de Ber et d'Almoustarat. Les séparatistes, de leur côté, ont répondu en expliquant qu'ils avaient abattu un avion de l'armée malienne à Almoustarat.
Des affirmations difficiles à confirmer, comme le nombre de victimes dans les combats, toujours dans le nord du pays, dans la ville garnison de Bourem qui serait tombée quelques heures entre les mains des insurgés touareg avant que l’armée ne parvienne à la reprendre.
Les deux camps ont fourni des bilans contradictoires, mais chacun fait état de plusieurs dizaines de morts.
Le front des juntes
C’est dans ce contexte très délicat pour la junte militaire malienne qu’a été signée ce samedi une alliance défensive entre les trois pays du Sahel qui ont installé des pouvoirs militaires à leur tête.
Des délégations du Burkina Faso et du Niger étaient à Bamako ce week-end pour parapher cette Alliance des États du Sahel (AES), baptisée "Charte du Liptako-Gourma".
Son but est "d’établir une architecture de défense collective et d’assistance mutuelle", a expliqué sur X (ex-Twitter) le chef de la junte du Mali, Assimi Goita.
La charte prévoit notamment que "toute atteinte à la souveraineté et à l’intégrité du territoire d’une ou plusieurs parties contractantes sera considérée comme une agression contre les autres parties et engagera un devoir d’assistance et de secours de toutes les parties, de manière individuelle ou collective, y compris l’emploi de la force armée pour rétablir et assurer la sécurité au sein de l’espace couvert par l’Alliance".
Au vu de la situation dans le nord du Mali mais aussi du contexte général au Niger où la junte qui a renversé le président Bazoum le 26 juillet est toujours sous pression de la Communauté Économique des États de l'Afrique occidentale (Cedeao), cette charte est une manière pour les militaires de la région de tenter de faire bloc et d'envoyer un message de fermeté dans toute la région. Même si, selon Abdoulaye Diop, ministre malien de la Défense, "Notre priorité c'est la lutte contre le terrorisme dans les trois pays".