Joe Biden veut rapprocher l’Afrique et l’Amérique

États-Unis Huit ans après celui que Barack Obama avait organisé, un sommet se tient à Washington.

Joe Biden veut rapprocher l’Afrique et l’Amérique
©AP

Parmi les États qui ont refusé de condamner l’invasion russe de l’Ukraine lors des votes de l’Assemblée générale des Nations unies au printemps dernier, figuraient de nombreux pays africains. Interprétée comme un défi lancé à l’Occident, cette fronde inattendue a dû rappeler à l’Administration américaine qu’il était imprudent de négliger un continent dont, par ailleurs, les habitants représenteront un quart de la population mondiale en 2050.

Joe Biden a donc convié à Washington les représentants de quarante-neuf États africains et de l'Union africaine (UA) pour un sommet de trois jours qui débute ce mardi. Seuls manqueront à l'appel le Burkina Faso, le Mali, la Guinée et le Soudan, parce que l'UA les a suspendus en raison de coups d'État et autres entorses au transfert démocratique du pouvoir (les États-Unis ont au demeurant pris des sanctions contre eux), ainsi que l'Érythrée, pays sous la coupe d'un régime totalitaire volontiers qualifié de "Corée du Nord africaine" et avec lequel Washington n'a pas de relations diplomatiques.

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Problèmes d’image

Contrairement au sommet sur la Démocratie que Joe Biden avait organisé les 9 et 10 décembre 2021, la Maison-Blanche n’a donc pas distribué, cette fois, de bons et mauvais points, préférant réunir tous les partenaires possibles, sans trop se soucier de morale, de bonne gouvernance et de respect des droits humains pour lancer les invitations. Ce n’est, toutefois, pas sans soulever des questions sur l’opportunité, pour le président américain, de s’afficher, un an après cette fameuse croisade pour la démocratie, avec des dirigeants africains parfois peu fréquentables.

Heureusement pour lui, beaucoup ne seront pas là, ayant préféré déléguer leur Premier ministre ou leur ministre des Affaires étrangères, en dépit de l’éclat que la Maison-Blanche veut donner à ce sommet, dîner de gala à la clé. On devrait être loin du faste qui avait accompagné le précédent sommet, il est vrai proposé par le premier président noir des États-Unis. Sur les cinquante dignitaires africains que Barack Obama avait accueillis du 4 au 6 août 2014, trente-six étaient des chefs d’État, trois des vice-présidents, et neuf des chefs de gouvernement.

La Chine, mais plus seulement…

Cela fait donc huit ans que la diplomatie américaine s’est faite plus discrète sur la scène africaine. Dans l’intervalle, la Chine a continué à y renforcer son influence, économique mais aussi politique, servie notamment par le Forum de coopération sino-africaine qu’elle convoque tous les trois ans, alternativement à Pékin et dans une capitale africaine.

Si la Chine est ainsi devenue un acteur essentiel en Afrique (un chiffre donne la mesure de sa domination : elle détient 60 % de la dette des pays africains), elle n’est, toutefois, plus la seule à concurrencer les anciennes puissances coloniales européennes et les États-Unis. La Russie a fait, elle aussi, son trou, en devenant le premier pourvoyeur d’armes, tandis que sa milice Wagner s’immisce toujours davantage dans les conflits qui déstabilisent le continent. Mais on parle aussi de plus en plus de la Turquie, qui a spectaculairement étoffé son réseau diplomatique sur place, ainsi que du Japon et des Émirats arabes unis, qui ont multiplié les investissements.

Une place au G20

L’Amérique aura donc fort à faire pour convaincre ses partenaires africains de la pertinence, voire de la crédibilité de son engagement. Un effort pour le moins paradoxal de la part du pays qui fournit à l’Afrique plus d’aide que n’importe quel autre (mais elle se voit moins que les routes, les ports ou les stades que la Chine construit), et qui reste un pilier de la sécurité régionale, en particulier dans la Corne de l’Afrique.

S’il ne campera pas les Père Noël, Joe Biden devrait néanmoins jouer la carte économique en relançant l’intérêt du monde des affaires américain, notamment dans des secteurs de pointe comme le numérique ou le spatial. Signe que Washington veut traiter l’Afrique non plus seulement comme un précieux réservoir de ressources naturelles, mais un acteur important du XXIe siècle, le Président verrait bien l’Union africaine rejoindre le G20.

Sans doute les grands pays africains (Nigeria, Égypte, Afrique du Sud, Congo…) aimeront-ils pousser leur avantage jusqu’à réclamer une présence permanente au Conseil de sécurité de l’Onu dans le cadre d’une réforme dont on parle depuis des lustres. Joe Biden leur prêtera certainement une oreille attentive, en sachant que, de toute manière, cela ne l’engage pas à grand-chose.

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