"Bolsonaro essaie d’avancer comme un bulldozer, ne laissant rien derrière lui"

Accédant au pouvoir à l'aube de l'année 2019, Jair Bolsonaro dirige depuis lors le Brésil d'une main de fer. Multipliant les scandales, le controversé président n'hésite pas à prendre des décisions polémiques, à s'opposer à ses partenaires historiques et à créer de nouvelles alliances. Les incendies qui ravagent l'Amazonie en ce moment ont été l'occasion pour le chef d'Etat de réaffirmer son style particulier. Refusant d'admettre l'urgence environnementale, Bolsonaro a multiplié les invectives à l'égard de ceux qui lui tenaient tête. Un langage cru, offensif, voire belliqueux devenu la nouvelle norme dans un pays gouverné par l'extrême droite. Victime de la dégradation de son image sur la scène internationale, le pays s'enfonce dans une crise économique dont il peine à se relever. "Le président Bolsonaro se comporte comme un bulldozer", estime Frederic Louault, professeur de sciences politiques à l'Université Libre de Bruxelles, spécialiste du Brésil et chercheur au Cevipol (Centre d'Etude de la Vie Politique). Il est l'Invité du samedi de LaLibre.be. Jair Bolsonaro ne se montre pas très réactif face aux incendies qui ravagent l'Amazonie. Comment l'expliquer? La déforestation et les incendies qui s’ensuivent constituent une opportunité pour certains acteurs brésiliens. L’espace dégagé permet l’extension de cultures de matières premières, extrêmement importantes pour les exportations du pays. Mais c’est à double tranchant. La dégradation de l’image du pays suite à ces incendies nuit au commerce international. Outre le fait que cela fragilise l’élan des investisseurs étrangers, le Brésil encourt également des sanctions commerciales. Or, c’est un pays extrêmement dépendant des investissements étrangers. Le gouvernement brésilien a donc tout de même fini par céder à la pression internationale. Oui et non. Bolsonaro a donné une réponse très ponctuelle. En interdisant le brûlis pendant 60 jours, il s’assure de laisser passer la tempête médiatique. De façon similaire, il a envoyé l’armée ainsi que plusieurs avions. Il s’agit d’actions qui donnent de la visibilité au gouvernement, sans que celui-ci ait à mettre en oeuvre des politiques publiques plus ambitieuses pour lutter contre la déforestation. © REPORTERS Emmanuel Macron a reproché au président brésilien d’avoir "menti" sur ses engagements environnementaux et il a menacé de suspendre l’accord UE-Mercosur. Etait-ce la bonne stratégie? C’est une réponse doublement maladroite. Tout d’abord, elle a été perçue comme une tentative d’ingérence d’un chef d’Etat étranger dans les affaires nationales, par le gouvernement brésilien mais aussi par une partie de l’opinion publique. Or, la souveraineté du Brésil sur ses ressources nationales a toujours été un enjeu primordial pour le pays. Ensuite, le président français n’aurait pas dû remettre en question l’accord UE-Mercosur qui implique d’autres partenaires qui n’ont pas compris cette réaction, les sanctionnant tout autant que le Brésil. Cela a été vu comme une action politique visant à reculer sur un engagement qui était difficile à assumer pour Macron plutôt que comme un geste noble envers l’environnement. Sur le fond, le président français a-t-il eu raison de douter de la politique de Bolsonaro dans la lutte contre le réchauffement climatique? Il est clair qu’au regard du mépris du gouvernement brésilien à l’égard de l’environnement et la dynamique qui s’est installée en termes de déforestation, il y a de quoi

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