La Chine emploierait des mesures drastiques pour réduire la natalité chez les Ouïghours
Une étude américaine dénonce des stérilisations forcées chez les Ouïghours, ainsi qu’une contraception non librement consentie.
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Publié le 01-07-2020 à 14h43 - Mis à jour le 08-08-2020 à 11h38
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Une étude américaine dénonce des stérilisations forcées, ainsi qu’une contraception non librement consentie.
Confrontée au vieillissement de sa population, la Chine a décidé en octobre 2015 de mettre officiellement fin à sa "politique de l’enfant unique", après trente-cinq années du plus impitoyable contrôle des naissances jamais pratiqué dans l’histoire de l’humanité. Le changement de cap, s’il est significatif, n’en reste pas moins limité puisque les couples chinois, en étant désormais encouragés à avoir deux enfants, n’ont pas retrouvé une totale liberté de procréer.
C’est dans ce contexte qu’il convient de situer les mesures prises par le régime communiste à l’égard des Ouïghours du Xinjiang, telles que les expose un rapport publié le 29 juin, à Washington, par la Jamestown Foundation. Fondé en 1984, avec l’aide du directeur de la CIA William Casey, par Arkady Chevtchenko, un ancien secrétaire général adjoint des Nations unies qui était devenu, six ans plus tôt, le plus prestigieux transfuge soviétique, ce centre d’études et de recherches s’est donné pour mission de fournir des informations, "souvent difficiles à obtenir", sur des pays stratégiquement importants pour l’Amérique. Il s’est logiquement concentré sur la Russie et la Chine.
Le plus vaste internement depuis l’Holocauste
Intitulé "Sterilizations, IUDs, and Mandatory Birth Control : The CCP’s Campaign to Suppress Uyghur Birthrates in Xinjiang", le rapport a été rédigé par Adrian Zenz, un anthropologue allemand qui s’est récemment fait un nom en dénonçant l’univers concentrationnaire au Xinjiang. Sous couvert de combattre l’extrémisme religieux et le terrorisme, les autorités chinoises ont construit des centaines de camps de rééducation dans l’immense région autonome située aux confins de l’Asie centrale. Un million d’Ouïghours et de représentants d’autres minorités musulmanes y seraient détenus, voire beaucoup plus selon certaines sources qui parlent d’épuration ethnique. Adrian Zenz y voit la plus vaste incarcération de masse depuis l’Holocauste.
Selon M. Zenz, qui déclare se fonder sur des statistiques officielles et de nombreux témoignages, on assiste depuis 2014 (soit peu après l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping à Pékin) à une réduction brutale de la natalité au sein de la population ouïghoure. Examens gynécologiques répétés et obligatoires pour détecter les grossesses, stérilisations, voire avortements forcés, mais aussi généralisation des poses, tout aussi peu consenties, de stérilets (de 200 000 par an en 2014 à 330 000 en 2018) : le contrôle des naissances se fait dans un climat d’intimidation, voire de terreur, assure Adrian Zenz, qui évoque les menaces d’internement en camp proférées à l’encontre des femmes qui refusent de se plier aux injonctions.
Un traitement de faveur très limité
Des exemples apportés, il ressort que les familles s’exposent généralement à des représailles dès lors qu’elles ont, ou veulent avoir, plus de trois enfants - tandis qu’il est fait interdiction à l’ensemble de la population chinoise d’en avoir plus de deux. S’il ne fait aucun doute que les Ouïghours sont l’objet de persécutions à grande échelle, la politique démographique à leur égard doit être également considérée dans le cadre plus large du sort réservé aux minorités ethniques. En théorie, celles-ci ont joui d’un traitement de faveur dans l’application de la politique de l’enfant unique. Dans la pratique, les privilèges effectivement accordés dépendaient largement du lieu et du moment. Aussi n’ont-elles, dans leur ensemble, que marginalement profité d’une éventuelle bienveillance du régime communiste.