Les manifestations contre Netanyahou s'élargissent: "Il devrait être en prison"
Aux habituels militants de gauche se joignent maintenant les désespérés de la crise provoquée par le coronavirus.
Publié le 19-07-2020 à 18h10 - Mis à jour le 19-07-2020 à 22h46
:focal(1275x858:1285x848)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/TN4GQZWUVNG23CQXH24YR3FELU.jpg)
C’est devenu un rituel. Chaque samedi soir, quand Israël sort de la torpeur du shabbat, le repos hebdomadaire juif, des milliers de manifestants prennent les rues, à Tel-Aviv et Jérusalem, masques sur la bouche, sifflets et vuvuzelas (une sorte de clairon généralement utilisé dans les stades) à la main. “C’est la première fois que je participe à une manifestation. Je n’ai plus rien à perdre”, raconte Sha. “Ces quatre derniers mois, je n’ai pas pu travailler”, poursuit l’éclairagiste de 40 ans, venu de Tel-Aviv pour manifester devant la résidence du Premier ministre, Benjamin Netanyahou, à Jérusalem. À cause du coronavirus, le monde du spectacle s’est arrêté. Malgré ses 26 ans de métier, en tant qu’indépendant, Sha n’a pas droit aux indemnités chômage.
La semaine dernière, en chute libre dans les sondages, Benjamin Netanyahou a débloqué une prime d’au moins 750 shekels pour chaque Israélien – un peu moins de 200 euros. Sha l’a reçue : “J’ai perdu presque 100 000 euros – qu’est-ce que je peux faire avec ça ?”
Nouveaux manifestants
Premier chef de gouvernement israélien en exercice à être inculpé pendant son mandat, Benjamin Netanyahou était jusqu’ici surtout la cible des manifestants de gauche, qui campent régulièrement sous ses fenêtres, comme Shir Perd. “Il devrait être en prison. Il a complètement négligé les citoyens pendant la crise du coronavirus parce qu’il ne pense qu’à échapper à son procès pour corruption”, explique la militante.
Mais ces dernières semaines, “je vois des gens que je ne croisais jamais auparavant. Il n’y a plus uniquement des gens très politisés ; il y a des Israéliens qui ne savent plus quoi faire”, constate Yossi Dorfman, impliqué dans les mouvements sociaux depuis des années.
En face, le gouvernement hésite. Que faire pour contenir en même temps la grogne sociale et la recrudescence des cas de coronavirus – plus de 1500 nouveaux cas détectés chaque jour ? Un confinement partiel a été décidé la semaine dernière, uniquement pendant les week-ends et sans restriction de mouvement. “Le gouvernement a depuis le début opposé les mesures à prendre pour gérer la crise sanitaire et celles pour calmer la crise économique ; or les deux marchent ensemble”, remarque Tamar Hermann, du groupe de réflexion Israel Democracy Institute. “Les Israéliens sont prêts à un nouveau confinement, mais à condition que le gouvernement mette la main à la poche”, ajoute la chercheuse. Selon elle, Netanyahou n’est pas en danger, faute d’opposition politique crédible à la Knesset.
Mais le fait que les manifestant ne sont plus seulement des militants de gauche qui n’ont jamais voté Netanyahou met celui-ci dans l’embarras, lui qui compte sur sa légitimité populaire pour faire face à son procès. “On dit qu’il est un magicien qui s’en sort toujours”, plaisante Yossi. “Mais on dirait que, cette fois, il est à court de tours de magie”.