Coronavirus: La vraie fausse sévérité des mesures de Boris Johnson
Lundi soir le Premier ministre Boris Johnson a asséné aux Britanniques : "Vous devez rester chez vous !" De nombreuses voix ont célébré sa décision.
Publié le 24-03-2020 à 21h49 - Mis à jour le 27-03-2020 à 12h24
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Lundi soir le Premier ministre Boris Johnson a asséné aux Britanniques : "Vous devez rester chez vous !"
De nombreuses voix ont célébré sa décision. Dans son parti évidemment mais également au sein de l’opposition (le chef du Labour Jeremy Corbyn a expressément tweeté son soutien à son adversaire) et dans les médias. Le quotidien de droite The Times indique ainsi que "ces règlements mènent le Royaume-Uni dans la ligne suivie par les importantes nations européennes". Bien lui en a pris : 93 % du public soutient ses mesures, selon un sondage publié mardi matin par l’institut de sondage YouGov. À y regarder de plus près, ces annonces ont-elles véritablement modifié la situation ? Depuis la semaine dernière, Boris Johnson réclame déjà aux Britanniques de limiter au strict minimum leurs déplacements hors de chez eux et "aux personnes âgées et aux personnes avec des antécédents médicaux de ne pas sortir de chez elles […] pendant douze semaines" . Désormais, le Premier ministre n’autorise les Britanniques à sortir de chez eux que pour acheter de la nourriture, faire un exercice physique une fois par jour, pour un besoin médical ou pour se rendre au travail.
Pourtant, à regarder la liste des commerces de détail autorisés à ouvrir, il n’est pas évident que le nombre d’employés cloîtrés à domicile augmentera massivement : supermarchés et magasins d’alimentation, pharmacies, stations essence, magasins de vélo, quincailleries, blanchisseries, loueurs de voitures, épiceries, kiosques à journaux, postes et banques. À ces commerces s’ajoutent les "employés clés" déjà autorisés depuis la semaine dernière à laisser leur progéniture à l’école pour continuer à faire tourner le pays : les livreurs, caissiers, conducteurs de trains, métro et bus, professeurs d’école primaire et secondaire, postiers, pompiers, certains fonctionnaires municipaux, etc.
La principale mesure du dirigeant conservateur concerne donc la mise en place d’amendes pour les contrevenants. Il est cependant là encore difficile de savoir comment les policiers pourront vérifier le non-respect du règlement - sauf si, cas évident, plus de deux personnes sont réunies.
Éviter de marcher seul
Malgré les apparences, Boris Johnson semble donc n’avoir pas vraiment modifié la stratégie qu’il avait dévoilée le lundi 16 mars - il avait alors renoncé à sa stratégie initiale de l’immunité collective, qui aurait provoqué bien trop de décès évitables.
Pourquoi a-t-il donc organisé cette apparition théâtrale lundi soir ? Pour donner l’impression de suivre une stratégie aussi dure et stricte qu’en Italie, en Espagne ou en France. Le Premier ministre a sans doute jugé que, d’un point de vue politique, mieux valait avoir tort avec tout le monde que prendre le risque d’avoir raison seul. D’autant plus que les dégâts potentiels du confinement total imposé par ses voisins ne seront visibles qu’à moyen et long terme : un retour du virus cet automne, une fois les mesures de confinement allégées, ainsi que l’apparition de séquelles psychiques chez de nombreux habitants enfermés chez eux, comme le démontrent des études sur la question.
Les apparences sauves, rien ne l’empêche désormais de poursuivre sa stratégie d’un confinement allégé. Surtout que, comme il l’avait indiqué vendredi dernier, "une réduction des réunions sociales non nécessaires de 75 % doit être atteinte pour affecter la propagation de l’épidémie, selon ce que nous dit la science ".