Double choc pour les indépendantistes en Catalogne
Alors que Puigdemont perdait son immunité, les indépendantistes emprisonnés perdaient leur semi-liberté.
- Publié le 10-03-2021 à 22h20
- Mis à jour le 15-03-2021 à 13h27
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D’une part, à Barcelone, le juge David García, en charge du respect des normes judiciaires pour les incarcérés, a décidé mardi le retour en prison d’Oriol Junqueras, ancien vice-président de la Catalogne, condamné à 13 ans de prison. Avec lui, six autres anciens dirigeants catalans ont été obligés mercredi de faire leur retour dans la prison de Lledoners (à 80 kilomètres de Barcelone). Entre autres motifs, la décision du juge de Barcelone est basée sur la non-repentance des condamnés. Dans tous les rassemblements indépendantistes, ils répètent une phrase : "Nous l’avons fait et nous le ferons de nouveau !"
Les sept sont condamnés à des peines diverses et incarcérés depuis novembre 2017. Mais pendant 39 jours ils ont été classés dans le "3e degré pénitentiaire" ce qui leur permettait de rester libres pendant le jour et de dormir chez eux tous les week-ends.
Dans la même journée et par une coïncidence "étrangement synchronisée", selon les termes utilisés par un quotidien barcelonais, de Bruxelles arrivait la nouvelle de la levée de l’immunité parlementaire de Carles Puigdemont et deux autres eurodéputés catalans, Clara Ponsatí et Toni Cantó. Un vote au Parlement européen qui pourrait donc aboutir à une nouvelle demande d’extradition auprès des autorités belges. Échaudé par les désaveux des juges belges et allemands face à ces demandes d’extradition, le juge du Tribunal suprême d’Espagne a remis neuf questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) mais rien n’empêche ce juge de renouveler sa demande d’extradition sans attendre la réponse de cette cour.
La levée de l’immunité et la fin du régime carcéral plus "léger" sont tombées alors que les négociations se poursuivent sur la formation du futur gouvernement catalan entre les partis indépendantistes de Junqueras (ERC, gauche républicaine), Puigdemont (JxCat, Ensemble pour la Catalogne) et la CUP (extrême gauche indépendantiste), majoritaires à la chambre catalane.
Crise en vue à Madrid ?
Pour ERC, ce vote passe mal et rend sa position intenable. En effet, si le Premier ministre espagnol, Pedro Sánchez (PSOE), a besoin des voix indépendantistes au Parlement espagnol, les eurodéputés socialistes espagnols n’ont pas hésité à voter en faveur de la levée de l’immunité de leurs collègues.
Le parti de Junqueras s’est donc empressé de rappeler que la survie politique de Sánchez pourrait être mise en question par les députés d’ERC qui siègent à Madrid. "S’ils continuent à trop célébrer leur victoire à Bruxelles, il est bien possible qu’ils continuent à le faire bientôt chez eux", a lancé Gabriel Rufián, chef de file ERC à Madrid.
Cette levée d’immunité pourrait donc devenir une victoire à la Phyrrus pour le Premier ministre espagnol qui avait par ailleurs promis d’ouvrir une étape de dialogue sur le conflit catalan après les régionales. Mais pour l’instant, point de dialogue, les indépendantistes ne parvenant pas à conclure un accord entre eux pour constituer la nouvelle Generalitat.
De son côté, après le vote au Parlement européen, Carles Puigdemont a parlé de victoire "morale" brandissant le fait que 42 % des eurodéputés ont voté en sa faveur. Ses adversaires ont fait remarquer que ce soutien venait des rangs nationalistes et d’extrémistes de droite et de gauche. Pablo Casado, le président du PP (droite) n’a pas manqué de remarquer que les eurodéputés d’Unidas-Podemos (gauche de la gauche), alliés de coalition de Sánchez, ont voté à Bruxelles contre la levée de l’immunité de Puigdemont.
Élection en vue
La présidente de la région de Madrid, Isabel Díaz Ayuso (PP, droite), a annoncé la tenue d’élections régionales anticipées le 4 mai. Mme Ayuso est la présidente régionale la plus critique envers le Premier ministre espagnol, Pedro Sánchez (PSOE).
Mais elle est elle-même très critiquée par d’autres présidents régionaux du PP qui lui reprochent d’être un électron libre et certaines de ses décisions dans la lutte contre le Covid-19, comme l’ouverture d’un grand hôpital dans un pavillon industriel - en pleine explosion de la Covid-19 - ou dans sa défense coûte que coûte des bars de Madrid.
Mme Ayuso, parfois présentée aussi comme "la trumpiste madrilène", a pris de court tout le monde en annonçant cette dissolution juste une heure avant la présentation d’une motion de censure de la gauche. (P.A. à Madrid)