Le Brexit, cette ombre qui vient brouiller le tableau final du G7
Joe Biden a salué un G7 "extraordinairement collaboratif et productif"
Publié le 13-06-2021 à 20h07 - Mis à jour le 14-06-2021 à 07h12
:focal(1275x858:1285x848)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/7F7ST6ZJAFFBZO3MUWWAPJMPWI.jpg)
La page Donald Trump est tournée. L’ancien président américain avait été la vedette - version négative - des deux derniers G7, en 2018 et 2019. Son cavalier seul et son manque de coordination n’étaient pas bien passés auprès de ses partenaires. Son successeur est parvenu, à lui tout seul, à modifier l’ambiance du sommet organisé dans les Cornouailles. "J’ai senti un vrai sentiment d’enthousiasme du fait que nous sommes de retour à la table", a expliqué Joe Biden dimanche après-midi.
Action la plus visible et la plus immédiate, les pays du G7 donneront 870 000 doses de vaccin aux pays pauvres et financeront 130 000 autres doses. Joe Biden a précisé qu’"il y a possibilité d’apporter un autre milliard de doses en 2022/23 mais ce n’est pas assuré". Cet engagement n’a pas ému plus que cela les organisations caritatives, comme Oxfam, pour qui "jamais l’écart entre leurs actions et les besoins du monde n’aura été aussi grand". L’ancien Premier ministre britannique Gordon Brown estime de son côté que "le sommet restera dans l’histoire comme un échec moral impardonnable : maintenant que nous avons découvert le vaccin, nous n’avons pas établi de plan qui vaccinera le monde entier avant la moitié de l’année prochaine. […] Le problème viendra hanter les pays riches, car la propagation de la maladie touchera aussi les gens vaccinés en raison des mutations et variants". L’Organisation mondiale de la santé estime que 11 milliards de doses sont nécessaires pour vacciner l’ensemble de la population du globe.
À la hauteur ?
En matière de diplomatie, le président américain a pris le soin d’indiquer que les dirigeants du G7 s’étaient "bien entendus" et qu’il était "très content du résultat de la conférence". À moyen et long termes, ses membres semblent avoir convergé sur une ligne de conduite claire face à ce qu’ils considèrent être les dangers chinois et russes. Un pas en avant majeur, après l’appel du pied de Donald Trump au président russe Vladimir Poutine et l’ambiguïté du président français Emmanuel Macron vis-à-vis de Moscou.
Pour Joe Biden, le moment est clé. "Nous sommes en compétition avec les autocrates et les gouvernements autocrates du monde, pas seulement la Chine", a-t-il indiqué. "La question est de savoir si les démocraties peuvent les concurrencer dans un XXIe siècle qui change rapidement. Notre réaction déterminera le jugement de nos petits-enfants quand ils se demanderont : ont-ils été à la hauteur ? Les démocraties sont-elles aussi puissantes qu’elles l’ont été ?"
Avant sa réunion mercredi à Genève avec Vladimir Poutine, le président américain l’a promis : "Je ne cherche pas le conflit. Nous coopérons où nous le pourrons et essaierons d’être en désaccord calmement." Il a admis que les sanctions imposées à la Russie n’avaient pas rendu son homologue moscovite plus conciliant. "Les autocrates ont un énorme pouvoir et ils n’ont pas à répondre au public." Avant de rappeler qu’"il existe des possibilités de coopération, notamment sur la Libye".
"Se le rentrer dans la tête !"
Une ombre a brouillé ce tableau : le protocole nord-irlandais, dont les conséquences perturbent les échanges commerciaux entre la Grande-Bretagne et l’Irlande du Nord, qui appartiennent pourtant au même pays. "Je pense que nous pouvons régler le problème, mais il appartient à nos amis et partenaires de l’UE de comprendre que nous ferons tout ce qu’il faut", a déclaré samedi le Premier ministre britannique Boris Johnson, hôte du sommet. "Si le protocole continue à être appliqué de cette manière, alors nous n’hésiterons évidemment pas à invoquer l’article 16", qui suspend l’ensemble du protocole. Il a par ailleurs pointé du doigt "certains de nos amis [qui] ne semblent pas comprendre que le Royaume-Uni est un pays unique et un territoire unique. Ils doivent se le rentrer dans la tête !" L’accusé n’est autre qu’Emmanuel Macron, qui lui aurait dit que l’Irlande du Nord ne faisait pas partie du territoire britannique. Cette maladresse, niée par le camp français, a à la fois exalté la situation et donné des arguments supplémentaires à Boris Johnson pour justifier sa colère.
Preuve que ces trois jours de réunions intenses ont fatigué tout le monde, Joe Biden s’est lâché à la fin de sa conférence de presse sur une question liée au maintien des droits douaniers sur l’aluminium et l’acier européen. "Je ne suis là que depuis 90 jours. Laissez-moi tranquille. J’ai besoin de temps." Certes, mais ses partenaires sont impatients de voir ce dont il est capable après quatre années compliquées.