L’Espagne secouée par la violence d’un meurtre homophobe
Ce type d’agression homophobe a connu une hausse de 20 % en 2019.
Publié le 08-07-2021 à 19h36 - Mis à jour le 08-07-2021 à 21h47
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Il s’appelait Samuel Luiz, 24 ans, aide-soignant. Samedi, vers trois heures du matin, il est sorti d’une discothèque de La Corogne (Galice, nord-ouest) avec une amie, Lina Suárez. Pour fumer une clope et rigoler un peu face à la plage de Riazor. Une promenade populaire où la nuit se prolonge les week-ends pour de nombreux jeunes noctambules. Ils en ont profité pour passer un appel vidéo à une amie commune.
Soudainement, plusieurs personnes qui sortaient de la discothèque ont crié qu’elles ne voulaient pas être filmées. Un garçon de ce groupe a lancé une phrase clé pour considérer le caractère homophobe du crime : "Arrête de nous filmer, sinon je te tue, sale pédé !" Un coup de poing rapide. La victime est traînée par terre sur environ deux cents mètres. Elle est rouée de coups sur tout le corps. Les agresseurs pourraient être une dizaine.
Dans les médias plusieurs témoins de la scène déclarent que "les attaquants n’ont montré aucune pitié". Selon ces témoignages, plusieurs filles proches du groupe d’agresseurs ont évité de participer à cette violence collective mais elles ont encouragé ceux qui frappaient Samuel Luiz.
"Notre consternation est totale parce que ce fait brutal se produit dans une ville tranquille avec un faible taux de délinquance", a déclaré Alberto Núñez Feijóo (PP, droite), président de la Galice.
Manifestations dans les grandes villes
Lundi, des milliers de personnes ont manifesté dans les rues de La Corogne, mais aussi Madrid, Barcelone et d’autres grandes villes du pays.
À Madrid, les manifestants se plaignent des coups et de l’attitude trop ferme des unités anti-émeutes. Pendant ces manifestations, les organisations LGBT ont tiré la sonnette d’alarme. "Les pouvoirs publics doivent réagir rapidement parce que nous ne pouvons plus nous balader tranquillement. Nous venons de voir comme cette homophobie tue", a déclaré Eugeni Rodríguez, de l’Observatoire contre l’homophobie (OCH) en Catalogne. Selon l’OCH, 113 agressions homophobes ont eu lieu en territoire catalan depuis le début 2021.
Dans un éditorial publié mercredi 7 juillet, El País précise que les signaux alarmants ne viennent pas seulement des discours de haine qui se répandent de plus en plus sur les réseaux sociaux mais aussi de la brutalité de cet assassinat et "de la participation collective d’un groupe contre un gamin innocent et qui est déjà par terre". Plusieurs sources policières utilisent le terme "meute" pour se référer à l’ensemble des participants à l’assassinat de Samuel Luiz.
Dans les dernières études sociologiques, l’homophobie apparaît derrière le racisme parmi les principales sources de haine dans l’ensemble du pays. Et comme il fallait s’y attendre, beaucoup d’observateurs politiques associent ces phénomènes à la montée de Vox (l’extrême droite), élection après élection, et à sa participation dans plusieurs gouvernements locaux et régionaux.
Selon le ministère de l’Intérieur, il y aurait eu une hausse de 20 % des attaques homophobes en 2019, dernière année des statistiques officielles.
Deux garçons et une fille, âgés de 20 à 25 ans, ont été arrêtés mardi. Un autre aurait été arrêté ce jeudi. La police continue à rassembler des témoignages et à étudier les enregistrements des caméras de sécurité des alentours de la promenade de Riazor. D’autres arrestations seraient imminentes, selon les enquêteurs.