Pourquoi l’Europe tarde à réaliser son réseau de transport
En moyenne, le retard atteint 11 ans. Les portions frontalières sont les plus concernées.
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Publié le 28-11-2021 à 15h04 - Mis à jour le 28-11-2021 à 16h20
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Le constat n’est pas nouveau : l’Europe accumule les retards sur les grands projets d’infrastructure chargés de relier les régions de l’Union entre elles. Depuis les années 1990, l’Europe nourrit l’ambition de créer un vaste réseau qui englobe tous les moyens de transport facilitant la circulation des biens et des personnes, depuis la Scandinavie jusqu’au sud de la péninsule ibérique. En 2013, le Parlement et le Conseil s’accordaient sur plusieurs priorités à réaliser d’ici 2030. Or, à neuf ans de l’échéance, cette date butoir semble déjà inaccessible.
Mais pourquoi donc l’Union européenne s’engage-t-elle dans des délais intenables pour ce type de projets d’infrastructures ? C’est la question à laquelle la Cour des comptes européenne a tenté de répondre.
L’institution a examiné six projets transfrontaliers cofinancés par les deniers européens liés au transport. Elle a ensuite comparé la gestion de ces plans avec des projets similaires réalisés à l’étranger.
"Notre analyse s'est intéressée à la manière dont ce type de projets sont menés aux États-Unis, en Suisse, en Australie et au Canada. Ces pays déploient en effet des projets d'une envergure similaires et ils présentent une structure semblable à celle de l'Europe", expose Annemie Turtelboom, auditrice belge de la Cour des comptes et responsable de l'étude.
Onze ans de retard en moyenne
La Cour des comptes avait déjà épinglé le dépassement chronique des coûts des projets cofinancés par l'Union. Les projets européens de transport excédent, en moyenne, leur budget initial de deux milliards, soit 47 %, avait noté l'institution. Un coup d'œil vers l'étranger permet de relativiser : "Le dépassement des coûts est un problème mais ce n'est pas typique de l'Europe. Nous avons pu l'observer partout ailleurs dans le monde", souligne Mme Turtelboom.
Par contre, le dépassement systématique des délais dans les chantiers d'infrastructure semble bien être une particularité européenne. Les six projets étudiés ici l'illustrent bien. Le retard moyen est d'environ onze ans. "Ces délais excédentaires sont propres à l'Europe, nous ne les observons pas, dans de telles proportions, ailleurs", observe l'ancienne ministre fédérale.
Une fois le constat posé, il reste à tenter de l'expliquer. "Cela est dû, en partie, à la différence des priorités entre les États membres et la Commission. La coordination est insuffisante et nous avons pu observer que, dans le cadre des projets transnationaux, les États négligent bien souvent les sections frontalières, qui sont par ailleurs financées par l'argent européen", décrypte la commissaire.
Aucune obligation de suivi
Les auditeurs du rapport plaident pour un meilleur suivi de la réalisation des projets. Une manière, selon eux, de réduire les retards. "Aux États-Unis par exemple, lorsqu'un projet dépasse de 2 % le budget initial en un an, ou les retards commencent à s'accumuler, le projet fait l'objet d'un suivi renforcé de la part de l'État fédéral", pointe Annemie Turtelboom.
La Cour des comptes souligne également un manque d’évaluation des chantiers. Aucune obligation légale ne contraint les États membres de l’Union à mener une évaluation des grandes infrastructures de transport.
La commission devra entamer dans les prochaines semaines les discussions autour de l’actualisation des objectifs de 2013.