Londres adopte un ton en apparence plus conciliant envers l’UE
La semaine dernière, la Première ministre britannique Liz Truss a accepté de prendre part au sommet inaugural de la Communauté politique européenne (CPE), qui rassemble ce jeudi à Prague les chefs d’État et de gouvernement des vingt-sept États membres de l’Union européenne (UE) et de dix-sept autres pays du Vieux Continent. Sa présence était pourtant loin d’être assurée.
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- Publié le 05-10-2022 à 21h39
- Mis à jour le 06-10-2022 à 13h39
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Alors qu'elle occupait le poste de ministre des Affaires étrangères, Liz Truss avait indiqué en mai, au lancement de cette initiative par le président français Macron, que sa "préférence est de se baser sur les structures déjà existantes et qui fonctionnent avec succès, que ce soit le G7 ou l'Otan". Elle semble avoir revu son jugement. Mieux, selon la presse britannique, l'entourage de Mme Truss aurait déjà proposé que le Royaume-Uni accueille la prochaine réunion de cet organe naissant. Les Britanniques souhaiteraient le renommer Forum politique européen, jugeant sans doute qu'aux yeux des Brexiters, le nom actuel rappelle trop la Communauté économique européenne, l'ancêtre de l'UE.
Signes de réchauffement
Depuis, les signes de réchauffement se multiplient. Le plus surprenant a sans doute été la sortie de Steve Baker, le nouveau ministre en charge de l'Irlande du Nord, connu depuis dix ans comme l'un des eurosceptiques les plus bruyants du parti. Dimanche, lors du premier jour du congrès annuel du parti conservateur organisé à Birmingham, il a indiqué à une audience abasourdie que "c'est avec humilité que je veux accepter et reconnaître que moi et d'autres n'avons pas toujours agi de manière à encourager l'Irlande et l'UE à nous faire confiance, et à accepter qu'ils ont des intérêts - des intérêts légitimes que nous sommes prêts à respecter. Et j'en suis désolé".
Les jours suivants, le nouveau ministre des Affaires étrangères James Cleverly a également apporté sa touche de bonne volonté. Lors d'une réception organisée lundi par l'UE dans l'enceinte du congrès, il s'est dit "au milieu d'amis", puis il a lié le devenir des deux voisins en assurant qu'"il n'y a pas de version de l'avenir où le Royaume-Uni réussit et où l'UE ne réussit pas".
Mardi, lors d'une conférence, le chef de la diplomatie britannique a affirmé que son gouvernement "préfère avoir une relation harmonieuse avec l'UE". Après avoir indiqué s'être humainement très bien entendu avec Maros Sefcovic, le vice-président de la Commission européenne en charge des discussions post-Brexit, dont la mise en œuvre du protocole nord-irlandais, M. Cleverly a reconnu que "les problèmes sur l'Irlande du Nord doivent être résolus, de préférence par la négociation, sinon par la législation".
L’Union attend des actes
Du côté de l'UE, la suspicion demeure pourtant de mise. "Ne nous emballons pas, ce n'est pas la première fois que l'on vit ce Love is in the air. La dernière fois étant justement à l'arrivée de Liz Truss à la tête du ministère des Affaires étrangères", rappelle un diplomate européen, désireux de demeurer anonyme. "Attendons de voir si des avancées concrètes ont lieu. En espérant que nous ne fassions pas trop de compromis." Le discours d'une autre source européenne fait résonner le même son cloche. "Prague est un moment pour faire connaissance [avec Liz Truss]. On parle de discussions d'apaisement qui pourraient avoir lieu, très bien mais il faut que les accords soient respectés. On peut beaucoup parler de bonne ambiance mais cela ne change rien."
Anand Menon, directeur du centre de réflexion UK in a Changing Europe, n'analyse pas non plus ces gestes comme le signe d'un revirement diplomatique majeur. "Liz Truss se rend à Prague car cela ferait mauvais effet si elle était la seule de [plus de] quarante dirigeants européens à ne pas s'y rendre ! Mais elle peut tout de même mal se comporter une fois sur place."
Selon M. Menon, cet adoucissement britannique est en grande partie lié à la conjoncture. "Depuis six ans, l'aile droite des conservateurs s'est vraiment mal comportée avec l'UE et encore plus avec l'Irlande, à qui ils avaient dit de sortir de l'UE pour faciliter le Brexit. Mais aujourd'hui, parler de Brexit en pleine crise économique et avec une inflation à 10 % est plus compliqué que jamais, car les gens commenceraient à dire : à propos, le Brexit n'est-il pas en train de rendre tout plus coûteux ?'. Donc je ne vois pas de profonde raison de croire à une vraie amélioration de la relation."