France: au PS, on prie pour ne pas "s'empaler sur un champ de cactus"

Comment atterrir "sans s'empaler sur un champ de cactus"? Les militants présents au congrès du PS à Marseille croisent les doigts pour que leur parti se relève d'un vote contesté et de deux semaines de grave crise interne.

<p>Le PS se réunit à Marseille, dans une ambiance délétère, après la réélection contestée d'Olivier Faure au poste de premier secrétaire</p>
Le PS se réunit à Marseille, dans une ambiance délétère, après la réélection contestée d'Olivier Faure au poste de premier secrétaire ©AFP

Au Palais du Pharo de Marseille, qui surplombe le Vieux-Port, quelques centaines de délégués et de militants patientaient vendredi avant l'assemblée plénière ouvrant le 80e congrès. Alors que les reproches n'ont cessé de fuser, depuis le vote sur le Premier secrétaire le 19 janvier, entre les camps d'Olivier Faure et de Nicolas-Mayer Rossignol, les discussions vont bon train.

Jérôme, 37 ans, partisan du maire de Rouen, essaie de convaincre Philippe, un camarade parisien de 52 ans, pro-Faure, qu'"il n'y a pas une ligne qui a gagné plus que l'autre". Preuve de l'ambiance exécrable qui règne au parti, ce chef d'une section parisienne souhaite rester anonyme car, assure-t-il, certains dans ce "parti de requins" "voudront (s)a peau" dès son retour du week-end.

Edito: l’implosion finale du PS français

La conversation avec Philippe est une parenthèse pacifique car contrairement à bien d'autres relations empoisonnées ces derniers temps au sein du parti, "il n'y a pas d'enjeu de pouvoir entre nous", glisse le responsable parisien.

Ce congrès socialiste, "c'est une crise de foie, de digestion, pas une crise de foi", relativise Philippe. Il se réjouit qu'Olivier Faure, malgré une victoire étriquée (51,09%) et contestée, soit en passe d'être officiellement reconduit lors de la validation des résultats par les délégués samedi.

"Le mythe de la scission"

Jérôme lui demande: "Quelle va être la direction commune? Il va falloir apprendre à travailler par consensus". Philippe lève les yeux au ciel: "Pas de direction pléthorique... Vous avez vu l'organigramme de Ciotti (nouveau chef de LR, ndlr)? C'est ridicule".

Les deux camarades s'accordent sur un point: "On est tous conscients qu'il faut atterrir...", commence Jérôme, et Philippe termine: "Mais est-ce qu'on atterrit en s'empalant sur un champ de cactus?"

Mais que devient le parti socialiste français ?

Dans cette crise, Evelyne Maurel, 72 ans dont 33 passés à militer au PS, veut être magnanime: "Tout le monde est un peu fautif", "les irrégularités, voire les fraudes, étaient d'un bord et de l'autre".

Cette adhérente d'une section marseillaise a voté pour Olivier Faure, comme les deux tiers des Phocéens, "parce qu'il y a eu l'expérience du Printemps marseillais", qui a permis à l'union de la gauche de l'emporter aux municipales de 2020.

"Si on n'avait pas été dans la Nupes, on n'aurait pas eu beaucoup de députés... Il faut avoir quelques neurones, un peu plus que de militants", rugit-elle derrière son masque sanitaire à tête de tigre, faisant référence aux chiffres d'adhésions en berne, avec quelque 23.000 votants seulement.

Pour Brice Gaillard, Premier secrétaire de la fédération des Hauts-de-Seine, favorable à la direction sortante, il est temps de passer à autre chose: "La démocratie interne c'est bien mais maintenant il faut parler aux Français..."

En l'entendant, juste à côté, Cécile Soubelet sourit. Selon cette secrétaire de la section d'Issy-les-Moulineaux, pro-Mayer-Rossignol, "on ne pourra pas faire comme si rien ne s'était passé". Elle cingle: "Faure avait promis de remettre le parti d'équerre, force est de constater que cinq ans après, ce n'est pas du tout le cas".

Brice Gaillard soupire: "La situation est compliquée, on ne donne pas une bonne image". Mais "le mythe de la scission, ça n'existe pas".

"J'ai 30 ans de PS, j'en ai vu des congrès, j'en ai vu des tensions", philosophe un secrétaire de section marseillais.

Quelques minutes plus tard, c'est "Cris et chuchotements" dans un auditorium surchauffé et divisé. A la tribune, bravache, le ténor marseillais Patrick Mennucci défie le camp Faure: "Si voulez faire le congrès de l'Unef, allez-y, sifflez-moi une bonne fois".

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