À Kiev, un sommet pour prouver que "l'Ukraine est l'Union européenne et l'Union européenne est l'Ukraine"
L’Ukraine a accueilli vendredi un sommet avec l'UE, représentée par Charles Michel, président du Conseil européen, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission, et Josep Borrell, chef de la diplomatie européenne.
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- Publié le 03-02-2023 à 20h29
- Mis à jour le 04-02-2023 à 10h18
Des sirènes anti-aériennes ont résonné vendredi matin dans la ville de Kiev, avant de s’étendre dans tout le pays, juste avant le lancement du sommet entre l’Union européenne (UE) et l’Ukraine. Une tentative de la Russie de perturber cet événement hautement symbolique? “Nous ne sommes pas intimidés par le Kremlin. Parce que l’Ukraine et l’UE, nous sommes une famille”, a assuré, dans l’après-midi, Charles Michel, président du Conseil européen, aux côtés d’Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, et du président ukrainien Volodymyr Zelensky. “L’Ukraine c’est l’Union européenne et l’Union européenne c’est l’Ukraine”, a poursuivi M. Michel.
”S’il fallait une preuve que la Russie est en train de subir un échec stratégique massif, tandis que l’Ukraine résiste et construit son chemin vers l’UE, c’est bien le fait que nous soyons ici”, a enchéri de son côté Ursula von der Leyen. Quelques minutes après la fin de la conférence de presse – qui n’était pas retransmise en direct pour des questions de sécurité – une nouvelle alarme retentissait à Kiev. Aucune frappe n’a finalement été observée dans la capitale ukrainienne et ses environs, au cours de la journée.
”Accélérer la fourniture d’armes”
Face à cette menace russe, persistante, et alors que Moscou préparerait une offensive majeure selon les informations de Kiev, les dirigeants européens se sont engagés à aider l’Ukraine “de toutes les manières possibles, aussi longtemps qu’il le faudra”, selon les mots de Charles Michel. Déterminé, Volodymyr Zelensky a assuré vendredi que son pays défendrait “aussi longtemps qu’il le pourrait” la ville-clé de Bakhmout. Et de plaider à nouveau pour “accélérer la fourniture d’armes par nos partenaires” (armes à longue portée, artillerie, chars occidentaux, capacités de défense aérienne…). Le message était surtout destiné aux États membres de l’Union, autant qu’aux autres alliés, dont les États-Unis, qui ont apporté un soutien militaire massif à l’Ukraine, mais qui rechignent parfois à lui fournir tout ce dont elle dit avoir besoin – la décision liée à la livraison chars Léopard 2 était compliquée, comme l’est désormais celle sur les avions de chasse… Notez que la veille, à Prague, le nouveau président de la République tchèque, Petr Pavel, appelait les Occidentaux à n'avoir aucune limite quand il s’agit d’aider militairement l’Ukraine, identifiant une seule exception, celle des armes nucléaires.
Le soutien militaire que les Européens ont fourni jusqu’ici à l’Ukraine est estimé à 12 milliards d’euros. À cela s’ajoute l’aide humanitaire, les fonds qui doivent permettre à l’Ukraine de tenir le coup économiquement face à la guerre, ceux prévus pour rétablir les infrastructures et reconstruire le pays… Au total, l’UE a mobilisé 50 milliards d’euros pour soutenir Kiev, et 18 milliards d’euros de prêts – dont 3 ont déjà été déboursés – lui seront accordés rien que cette année.
Des ampoules pour donner la réplique à la Russie
Vendredi matin, Ursula von der Leyen a visité un bureau de poste où les citoyens peuvent désormais se rendre pour remplacer leurs ampoules électriques classiques par des ampoules de basse consommation LED. C’était l’une des annonces de ce sommet : l’Union prévoit de donner 50 millions de ces ampoules à l’Ukraine. 35 millions ont déjà été achetées et ont commencé à être distribuées dans le pays. Quelque 750 000 citoyens ont déjà profité de ce programme, qui a commencé cette semaine. Objectif : économiser de l’énergie et pallier aux pénuries provoquées par les bombardements russes.
Au même moment, Josep Borrell, chef de la diplomatie européenne, se rendait sur un site de déminage à l’extérieur de Kiev, alors que la neige s’abattait sur la région. “30 % de votre territoire est touché par des explosifs en raison de la guerre et de la volonté des troupes russes, lorsqu’elles se retirent, de laisser des mines [derrière elles] afin de causer des dommages à la population civile”, a constaté le Haut représentant de l’UE pour les Affaires étrangères, qui était équipé d’un gilet de protection. Il a donc promis une enveloppe de 25 millions d’euros pour financer les activités de déminage des forces ukrainiennes.
Des sanctions contre la Russie, mais lesquelles ?
Aider l’Ukraine, c’est aussi sanctionner la Russie, a par ailleurs rappelé Volodymyr Zelensky. L’UE s’est engagée à adopter avant le 24 février, qui marquera un an depuis le début de l’invasion russe, un dixième paquet de mesures destinées à altérer la capacité de Moscou à faire la guerre. Mais lesquelles ? Ursula von der Leyen a indiqué vendredi que le “plan consiste à se concentrer une fois de plus sur les technologies qui peuvent être utilisées par la machine de guerre russe”, notamment pour la production de drones. Que ce soit par la Russie ou par l’Iran d'ailleurs, qui fournit désormais du matériel militaire à Moscou. M. Zelesnky a, lui, appelé à s’attaquer aussi au géant du nucléaire russe Rosatom, qui est impliqué dans l’occupation de la centrale ukrainienne de Zaporijjia. C’est là le grand “oubli” des sanctions européennes, qui s’explique par la dépendance de plusieurs États membres (France, Finlande…) à la Russie pour leur approvisionnement en uranium par exemple.
Last but not least, l’un des sujets majeurs qui a dominé ce sommet aura été la question de l’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne. Vendredi, Volodymyr Zelensky a fixé son objectif: entamer les négociations officielles cette année. “Nous ne perdrons pas un seul jour dans notre travail pour rapprocher l’Ukraine et l’UE”, a-t-il prévenu, sur Télégram. De leur côté, les dirigeants européens ne pouvaient que saluer les efforts réalisés par Kiev, d’ailleurs pointés dans un rapport analytique publié vendredi par la Commission. Pour les Européens l’enjeu était de ne pas trop promettre aux Ukrainiens sur l’avancement de cette procédure complexe. Mais si Kiev parvient à remplir tous les critères, Charles Michel s’est engagé à mettre le sujet sur la table du Conseil européen avant la fin de l’année 2023. Il en va après tout de l’avenir d’un pays qui a fait “le choix de la liberté, de la démocratie, de l’état de droit” et dont dépendent aussi “la sécurité et l’indépendance de l’Europe”.