Les "cool kids" de la politique étrangère européenne fondent un club pour promouvoir le vote à la majorité qualifiée... mais ce n'est pas gagné

Neuf pays (Belgique, Finlande, France, Allemagne, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Slovénie, Espagne) plaident pour rendre plus efficace la prise de décision en affaires étrangères. Actuellement, l'unanimité est requise.

Réunion du Conseil des Affaires étrangères, à Bruxelles, le 20 mars 2023.
Réunion du Conseil des Affaires étrangères, à Bruxelles, le 20 mars 2023. ©Alexandros Michailidis, European Union

Ça y est, les cool kids de la politique étrangère européenne ont fondé leur club. Neuf pays (Belgique, Finlande, France, Allemagne, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Slovénie, Espagne) ont créé jeudi le "Groupe d'amis pour favoriser le vote à la majorité qualifiée dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune de l'UE". Bon, il y a encore du travail pour trouver un intitulé plus branché. Mais pas certain que cela suffira pour rallier les autres États membres à la cause, tant certains restent attachés à ce que les décisions sur les affaires étrangères de l'Union européenne se prennent (ou pas, justement), à l'unanimité.

Pour le groupe des neuf, l'heure du changement est arrivée d'autant que l'UE n'a cessé de briser des tabous pour faire face au Covid-19 et surtout à la guerre en Ukraine. "Dans le contexte des défis internationaux croissants […], l'amélioration du processus décisionnel est essentielle", arguent-ils. Lisez : il faut agir plus fort et plus vite, pour "renforcer l'UE comme acteur en politique étrangère". Or trouver un consensus à vingt-sept s'avère souvent chronophage. "Et le consensus se fait au prix d'un affaiblissement des décisions", estime une source européenne, en référence à la règle bien connue du plus petit dénominateur commun.

Voilà pour le pitch. Ne reste plus qu’à convaincre tous les Vingt-sept. Car il faut l’unanimité pour décider de ne plus décider à l’unanimité…

Oui mais comment faire du chantage alors ?

Et c’est loin d’être gagné. Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell en sait quelque chose lui qui avait déjà tenté en 2020 de faire avancer cette idée. En vain. Trois ans et le début d’une guerre en Europe plus tard, le sujet reste délicat. Notez l’ironie : les amis de la majorité qualifiée ne représentent pas eux-mêmes une majorité qualifiée (qui nécessite quinze États membres représentant au moins 65 % de la population de l’UE). Les durs à cuire de l’unanimité restent surtout Chypre, la Pologne et la Hongrie. La première veut s’assurer d’avoir toujours son mot à dire quant au traitement de la Turquie. Les deux autres aiment se servir des décisions à l’unanimité pour faire du chantage et obtenir des concessions sur d’autres dossiers (même s’ils n’ont rien à voir). Comment pourraient-elles sinon s’arranger pour continuer à bafouer l’état de droit ?

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