Guerre en Ukraine : la Grèce possède 800 des 2 000 chars Léopard européens, mais n’en livrera aucun
Après plusieurs jours de tergiversation, le couperet est tombé : la Grèce ne fournira pas de chars Léopard à l’Ukraine comme d’autres pays membres de l’Alliance atlantique vont le faire à la demande du président ukrainien Volodymyr Zelensky.
Publié le 03-02-2023 à 12h46 - Mis à jour le 03-02-2023 à 12h47
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”Nous avons offert une aide militaire conséquente à l’Ukraine comme des blindés pour des transports de troupes, mais nous n’allons pas donner des blindés de combat Léopard 2 pour la simple raison qu’ils nous sont absolument indispensables pour notre défense”. Le Premier ministre Kiriakos Mitsotakis a enterré d’un coup toute polémique. “Nous avons toujours dit ‘nous sommes prêts à soutenir l’Ukraine, mais pas au détriment de notre défense’”.
Une défense qui est constamment menacée par la Turquie, bien que membre de l’Otan elle aussi. “Si nos alliés étaient moins frileux, on pourrait s’engager plus dans notre soutien militaire à l’Ukraine, mais en l’état actuel des choses on ne peut se défaire du moindre blindé”, explique à La Libre une source proche de ce dossier. “Toutes nos unités blindées sont concentrées sur notre frontière terrestre le long du fleuve Evros. On n’a pas le Luxembourg pour voisin, mais la Turquie, qui mène une politique révisionniste quant à la délimitation de nos frontières communes. On n’a peur de rien, mais on répondra à toute agression et on garde toutes nos armes.”
“On aurait pu en donner au moins un”
Récemment, le président turc a multiplié les menaces contre la Grèce en expliquant qu’il pourrait “débarquer en pleine nuit” sur les îles de la mer Egée. Depuis trois ans, le président Recep Tayyip Erdogan maintient sous pression toute la région frontalière d’Evros avec un flux de migrants qu’il encourage à passer en Europe via la Grèce selon son agenda politique. Face à cette menace, la Grèce s’est organisée en s’équipant massivement de chars de combat. C’est l’un des pays européens qui possède la plus grande flotte de chars Léopard : 350 Léopard 1 et 500 Léopard 2, plus modernes sur les 2 000 engins présents sur le vieux continent. “On aurait pu en donner au moins un, comme le Canada”, lâche Sotiris Serbos.
Pour ce spécialiste des relations internationales à l’université Démocrite en Thrace occidentale, il faut lire les déclarations du Premier ministre Kiriakos Mitsotakis à travers le prisme des prochaines législatives anticipées prévues au printemps, “Jusqu’à présent, il a mené, face à la Turquie, une politique ferme et équilibrée qui a plu à son aile populiste. S’il donne des armes à l’Ukraine alors que la menace turque, tant sur les îles qu’au nord-est du pays, est des plus présentes et que la Turquie de son côté ne lâche pas même un fusil pour l’Ukraine, cela risque de lui coûter politiquement. Il ne veut prendre aucun risque”.
D’autant que la frange d’extrême droite du parti de la Nouvelle Démocratie au pouvoir, qui pèse lourd dans ces futures élections, n’a pas manqué de faire savoir qu’Ankara maintient un bon nombre de chars de combat Léopard dans le nord de Chypre sous occupation militaire turque depuis 1974. Tout est dans la symbolique.
Pour faire face à cette situation qui fluctue au gré des aléas de la campagne électorale des présidentielles turques, la Grèce a multiplié ses alliances diplomatiques avec les États-Unis, le monde arabe, Israël et l’Union européenne. Athènes et Paris ont même passé un accord d’assistance militaire en cas d’agression, mais deux précautions valent mieux qu’une, elle a aussi augmenté sa capacité militaire dans les airs et les mers et veut maintenir le statu quo avec les blindés. Kiev devra donc s’en passer.