La livraison de F-16 à l'Ukraine permettra "une grosse montée en puissance" face aux Russes
Pour Xavier Tytelman, la livraison des avions de chasse occidentaux permettra “une grosse montée en puissance” face à la Russie, mais elle n’est “pas indispensable” à la réussite de la contre-offensive.
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Publié le 19-05-2023 à 20h16
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Volodymyr Zelensky l’avait déclaré le 11 mai dernier : “Nous avons besoin encore d’un peu de temps” avant de lancer la fameuse contre-offensive dont tout le monde parle depuis des semaines. Notamment parce que l’armée ukrainienne manque encore de “certaines choses”. Les avions de chasse, que le président ukrainien n’a de cesse de réclamer aux Occidentaux, en font-ils partie ? Sont-ils nécessaires à la réussite de l’opération à venir ?
“Ils ne sont pas indispensables”, estime Xavier Tytelman, ex-aviateur militaire français et consultant en aéronautique et défense. “Ils n’étaient pas présents lors de la dernière contre-offensive, à l’automne, et cela n’a pas empêché l’Ukraine de reprendre 20 000 km2 de septembre à novembre.”
À l’époque, les Russes ne s’étaient pas aussi bien fortifiés que maintenant. Mais les Ukrainiens disposent aujourd’hui des “briques technologiques” qui, aux yeux de l’expert, s’avèrent “nécessaires pour les affaiblir et réussir la contre-offensive” à venir, “fin mai – début juin au plus tôt”. Ils sont désormais équipés de “bombes guidées de précision, comme les JDAM par exemple, qui ont une capacité pouvant aller jusqu’à une tonne” et dont la portée dépasse les 70 kilomètres. “Pour détruire un bunker ou une défense, pour faire un parking à la place d’un champ de mines, c’est ce qu’il faut.” Ils sont de surcroît capables d’intégrer ce matériel occidental à leurs avions de chasse de type soviétique, comme ils avaient déjà réussi à le faire avec les missiles antiradar AGM-88. Et, enfin, ils viennent d’obtenir des missiles de croisière britanniques Storm Shadow.
“Les Ukrainiens ont une armée de l’air plus puissante aujourd’hui qu’avant la guerre. Ils ont reçu des MiG-29 et des Soukhoï-25 de la part de leurs alliés de quatre pays : la Macédoine du Nord, la Bulgarie, la Pologne et la République tchèque. Et ils ont reçu les munitions qui font qu’ils peuvent bosser sur leurs avions ukrainiens”, résume l’ex-aviateur.
”Une grosse montée en puissance”
S’il est “donc moins urgent de fournir des avions de chasse occidentaux dans le cadre de la contre-offensive”, poursuit Xavier Tytelman, ceux-ci permettraient bien “de multiplier ce type de missions” et “de reprendre la maîtrise du ciel, notamment en combat air-air, avec des radars qui portent beaucoup plus loin et des missiles qui peuvent aller à 150 kilomètres de portée”. Car, aujourd'hui, le radar de l'avion chasseur ukrainien, le MiG-29, "n'a pas une portée suffisante", si bien que "les missiles occidentaux vont plus loin que le radar de l'avion ukrainien et, forcément, ce n'est pas assez”.
En air-sol, les Russes ne prendront jamais l’avantage sur les Ukrainiens, qui ont intégré de nouveaux missiles beaucoup plus efficaces et dont ils disposeront en masse.
Pouvoir disposer d’avions de chasse occidentaux, F-16 en tête, permettra donc “une grosse montée en puissance”. “On leur en enverrait une quarantaine”, les Ukrainiens “pourraient être plus opérationnels, plus présents, avec une disponibilité meilleure et un panel de bombes à balancer plus important”. L’expert français l’assure, “en air-sol, les Russes ne prendront jamais l’avantage sur les Ukrainiens, qui ont intégré de nouveaux missiles beaucoup plus efficaces et dont ils disposeront en masse”. L’armée de l’air de Kiev “a une capacité opérationnelle qui est supérieure à l’armée russe aujourd’hui pour le bombardement en profondeur, ce qui est une surprise stratégique énorme”.
Quatre mois pour former un pilote
Alors à quand les F-16 américains dans le ciel ukrainien ? Xavier Tytelman les voit “peut-être cet automne, si l’on ne commence la formation des pilotes que maintenant”. “Les Américains ont budgété en juillet de l’année dernière la formation des Ukrainiens sur F-16. On a maintenant officiellement le premier retour d’expérience et la formation en quatre mois est validée pour un pilote qui est déjà certifié MiG-29.”
À ceux qui redoutent de voir les Ukrainiens utiliser les avions de combat et autres missiles de croisière occidentaux pour frapper le territoire de la Fédération de Russie, Xavier Tytelman rappelle que, jusqu’ici, “ils se sont servis de tout ce qu’on leur a fourni pour libérer leur propre territoire” seulement. “C’est vraiment un engagement, il n’y a pas de garantie. Mais ils perdraient tous leurs alliés” s’ils franchissaient la frontière internationalement reconnue. “On sait donc très bien qu’ils vont respecter leurs promesses.”