Le patron de Wagner tacle la stratégie militaire et les élites russes : “ça peut se terminer par une révolution, comme en 1917”
Fustigeant le comportement de l’élite russe, Evgueni Prigojine a mis garde contre un soulèvement populaire en Russie.
Publié le 25-05-2023 à 16h28
Le patron de Wagner est de plus en plus loquace médiatiquement. Alors que sa milice est en train de se retirer de Bakhmout, Evgueni Prigojine a dressé un bilan de la guerre en Ukraine dans un entretien fleuve accordé au blogueur russe pro-Kremlin, Konstantin Dolgov, le 23 mai dernier. Le combattant n’y va pas de main morte contre la stratégie militaire russe et a donné des détails sur les pertes humaines.
”J’ai sélectionné 50.000 détenus dont environ 20 % ont été tués”, a affirmé Prigojine. Les détenus recrutés dans les prisons par Wagner étaient en première ligne dans la terrible bataille de Bakhmout. Le chef de milice a d’ailleurs annoncé ce week-end la prise de la ville, à feu et à sang, contesté par l’Ukraine.
Par ailleurs, il a indiqué qu’une proportion similaire de ses combattants professionnels étaient également morts au combat, sans pour autant chiffrer précisément leur nombre. Selon lui, les pertes ukrainiennes sont beaucoup plus lourdes : “Moi j’ai trois fois moins de tués et […] environ deux fois moins de blessés”.
M. Prigojine parle ainsi pour la première fois ouvertement de l’ampleur de ses pertes, alors que côté russe tout est fait pour garder secret le nombre de tués et de blessés.
D’autre part, Evguéni Prigojine accuse, lui, le haut commandement militaire russe de l’avoir privé des armements et munitions nécessaires pour éviter ces lourdes pertes. “Il y a maintenant des dizaines de milliers de proches de (soldats) tués. Il y aura probablement des centaines de milliers. On ne peut pas cacher ça”, a-t-il affirmé dans l’interview publiée mardi, appelant les généraux russes à envoyer leurs enfants au front.
"Envoyez vos enfants à la guerre"
Le chef de guerre n’a pas hésité à critiquer, une nouvelle fois, la stratégie de Vladimir Poutine pour s’emparer de l’Ukraine, qui est, selon lui, un échec absolu. “On a mené une opération spéciale pour quoi ? Pour démilitariser et dénazifier l’Ukraine ? Au final, la dénazification a permis à l’Ukraine de devenir une nation connue du monde entier. […] Franchement, on a légitimé l’Ukraine”, s’est-il désolé. “Aujourd’hui, je pense que l’armée ukrainienne est l’une des plus fortes”, a-t-il ajouté.
Il a averti que la Russie pourrait perdre la guerre, précisant que l’Ukraine est en train d’encercler Bakhmout et planifie une attaque contre la Crimée.
Il a aussi mis en garde la Russie, quant à une possible révolution de l’ampleur de celle de 1917, en fustigeant au passage l’élite russe et leurs enfants qui s’enduisent de crème, “remuent leur cul” au soleil, et publient leurs photos sur Instagram pendant que les Russes ordinaires continuent de récupérer leurs enfants dans des cercueils en zinc. “Cette division peut se terminer comme en 1917 par une révolution”, a-t-il appuyé. “D’abord, les soldats se lèveront, puis leurs proches se lèveront”.
Et dans un message directement adressé aux élites russes : “Envoyez vos enfants à la guerre ! Quand vous commencerez à les enterrer, les gens trouveront cela juste”
Des commentaires acerbes que le patron de Wagner justifie par son amour de la patrie et son désir de servir le président Poutine.