Reprise des pourparlers entre l'Iran et l'Arabie Saoudite: Riyad et Téhéran vont passer en mode diplomatique
Les pourparlers entre les deux rivaux évoluent vers la normalisation.
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Publié le 25-04-2022 à 19h07 - Mis à jour le 25-04-2022 à 19h14
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Tenus jusqu'ici dans une discrétion monacale, les pourparlers entre l'Iran et l'Arabie saoudite ont repris jeudi dernier à Bagdad. Le ministère iranien des Affaires étrangères a confirmé lundi les informations dévoilées le week-end dernier selon lesquelles de hauts responsables sécuritaires iraniens et saoudiens se sont rencontrés le 21 avril dans la capitale irakienne. Il s'agit du cinquième cycle de pourparlers directs depuis la reprise de langue officielle, il y a juste un peu plus d'un an, entre les deux grands rivaux du golfe Persique afin de normaliser leurs relations, rompues il y a plus de six ans.
Qualifié de "positif" côté iranien, ce nouveau rendez-vous s’est déroulé dans un contexte régional plus apaisé, qui a semble-t-il permis d’imprimer l’espoir de faire évoluer les discussions du niveau sécuritaire vers la sphère diplomatique. Les ministres des Affaires étrangères des deux pays devraient ainsi prendre le relais des responsables du renseignement dès la prochaine réunion conjointe, a indiqué l’agence iranienne Nour, proche du Conseil suprême de sécurité nationale (CSSN). Dimanche, le chef de la diplomatie irakienne, Fouad Hussein, a lancé l’invitation pour un sixième rendez-vous à Bagdad.
La rencontre de jeudi, qui s’est déroulée sous les auspices du Premier ministre irakien, Moustafa al Kadhimi, et en présence du chef du renseignement général saoudien, Khalid al Humaidan, et du chef adjoint du CSSN iranien, Saïd Iravani, aurait dû se tenir le mois dernier. Téhéran avait toutefois décidé de suspendre sa participation, sans donner de raison officielle. Mais il est vraisemblable que l’exécution massive par l’Arabie saoudite de 81 condamnés, dont 41 fidèles chiites, ait joué un rôle non négligeable dans la suspension de sa participation. L’Iran avait d’ailleurs condamné ces mises à mort opérées en une seule journée le 12 mars.
Climat confessionnel
La dimension confessionnelle constitue le terreau de la conflictualité entre l’Iran, seul pouvoir chiite (duodécimain) au monde et à ce titre meneur du deuxième courant en importance de l’islam, et l’Arabie saoudite, qui se revendique comme le chef de file du sunnisme en tant que "gardienne des deux saintes mosquées". C’est déjà sur la base d’un climat confessionnel tendu qu’était survenue la rupture diplomatique entre les deux pays. Riyad avait rompu ses relations diplomatiques avec Téhéran en janvier 2016 suite aux saccages de ses représentations diplomatiques en Iran qu’avait provoqués l’exécution d’un célèbre chef religieux chiite du Royaume. L’organisation de la rencontre de jeudi, quelque six semaines après un événement confessionnel similaire, traduit sans doute leur volonté commune de dépasser ce niveau de discussion. Selon Téhéran, des discussions ont entre autres été lancées concernant l’accueil de 40 000 Iraniens en Arabie saoudite pour le prochain grand pèlerinage (Hajj), du 7 au 12 juillet.
Le contexte actuel est plus apaisé qu'il y a encore quelques mois. Les conflits qui occupent les deux meilleurs ennemis du Moyen-Orient traversent une phase d'accalmie. La guerre au Yémen, où une coalition militaire dirigée par Riyad assiste depuis huit ans le gouvernement dans son combat face à une insurrection appuyée par Téhéran, connaît une trêve depuis le début de ce mois. Quant aux négociations de Vienne relatives à la relance de l'accord nucléaire iranien de 2015, elles sont terminées sur le plan technique - selon la partie iranienne - mais toujours suspendues aux décisions politiques. Téhéran a appelé lundi à une réunion "le plus tôt possible" avec ses partenaires de l'accord et les États-Unis alors que les négociations sont interrompues depuis le 11 mars.Vincent Braun