Faut-il réhabiliter le lancer de nain ?
Lancer un nain équipé d'un casque le plus loin possible sur un matelas, une idée aussi absurde que stupide, mais qui fut réalité dans les années 80 dans les bars américains et australiens.
- Publié le 26-11-2011 à 13h23
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Lancer un nain équipé d'un casque le plus loin possible sur un matelas, une idée aussi absurde que stupide, mais qui fut une réalité dans les années 80 dans les bars américains et australiens. Cette discipline pour le moins particulière a même eu droit à son championnat du monde en 1986 dans le Down Under. Tombé dans l'oubli ces dernières années, ce sport controversé est revenu sous les feux de l'actualité lors des incartades nocturnes du XV à la rose pendant la dernière coupe du monde de rugby. Mike Tindall, le petit-fils par alliance de la Reine Elizabeth II d'Angleterre, avait été surpris avec d'autres de ses coéquipiers dans un bar où la discipline était l'une des principales attractions.
Dans d'autres contrées du globe, le lancer de nain est pourtant interdit. En Floride, berceau de ce sport, une mesure fut votée à une large majorité en 1989 pour rendre le illégal. L'Etat de New York lui a d'ailleurs emboîté le pas peu de temps après.
Sous nos latitudes, si le "jeu d'nain, jeu de vilain" n'est pas légalement d'application, il existe certains mécanismes au niveau des communes pour empêcher ce type de concours. En France, un arrêt du Conseil d’Etat a confirmé la décision du maire d’une commune d’interdire un spectacle de lancer de nain, "au motif qu’il s’agissait là d’une activité contraire à la dignité humaine."
Mais pour l'homme de petite taille qui s'était porté volontaire pour faire office projectile, cette décision n'était pas équitable car il affirmait avoir trouvé une "activité professionnelle et une source de revenus mais également une notoriété qui contribuait à son épanouissement personnel".
Malgré les nombreux recours de ce dernier contre cette décision, le Comité des Droits de l'Homme des Nations Unies avait conclu en 2002 qu'il n'y avait pas d'aspect discriminatoire dans cette circulaire et qu'elle était nécessaire au maintien de l'ordre public, "au regard notamment de considérations de dignité humaine".
Mais c'est bien là que se situe tout le noeud du problème. Quelles nuances apporter à cette "dignité humaine" que ne respecterait pas le lancer de nain ?
Aux Etats-Unis, la question est devenue un véritable débat national depuis que Ritch Workman, député républicain de Floride, a proposé d'annuler la loi sur la interdiction du lancer de nain.
L'association Little People of America, qui avait obtenu cette prohibition a rapidement manifesté son mécontentement. Son argument est que si la pratique devient légale, les Américains vont croire qu'ils pourront lancer des gens de petite taille et des enfants quand bon leur semble. Un raisonnement pour le moins simpliste pour certaines personnes de petite taille qui veulent militer pour la liberté de choisir d'être ou non un projectile vivant.
Dave Flood, plus connu sous le pseudo de Dave the Dwarf, est un partisan acharné de l'annulation de la législation : "Ce n'est pas parce que je fais qu'un mètre de haut qu'il faut me traiter comme si j'avais 3 ans et me dire que c'est idiot de laisser des gens me lancer contre un mur.", déclare-t-il dans une interview le site de Vice.
"Si je mesurais deux mètres, je serais payé à faire passer un ballon dans un panier. Je joue avec les cartes que la nature m'a données...", continue-t-il.
"Je suis un nain ! Je ne peux pas travailler dans le bâtiment ! Ni chez McDo ! Je dois faire ce qu'il m'est possible de faire, et le lancer de nain en fait partie. ".
Alors, faut-il réhabiliter le lancer de nains ? Est-ce le rôle de l'Etat d'interdire ce sport, en supposant que le lanceur ou les spectateurs pourraient prendre un malin plaisir à voir une personne de petite taille être projetée au loin. Le débat entre la dignité collective et la liberté individuelle dans ce type de pratique risque encore de faire des remous au pays de l'Oncle Sam.