Des disques d’or ou des croissants
Dans un contexte de travail tout à fait particulier, comme dans un "cocon", le foisonnement artistique grouille dans les studios de A.R.E Music. Le disque d'or de Jali souligne la réussite de ce label bruxellois. Tous les dimanches, LaLibre.be vous emmène "Dans le secret des lieux".
Publié le 02-03-2014 à 12h00 - Mis à jour le 05-03-2014 à 23h55
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Tous les dimanches, LaLibre.be vous emmène "Dans le secret des lieux".
“La ligne de chant est bien, Benoît, par contre y a un gros taf à effectuer au niveau de l’écriture.” Claire, nette et précise, la critique émise par Mike Toch a le mérite de ne souffrir aucune interprétation ambivalente. L’oreille tendue vers les morceaux des Meridians, le responsable de A.R.E Music et “ingé son” de formation donne ses impressions telles qu’il les ressent. Les trois musiciens bruxellois, eux, écoutent et s’accordent à l’analyse.
Confortablement installée dans le studio A, aux murs d’un rouge éclatant, la petite équipe est occupée à réaliser des maquettes de la dizaine de morceaux qui pourraient composer un album. Cependant, le travail est encore long et des aménagements sont nécessaires. "Dans 'J’avance', la mélodie pose problème. La basse qui sautille, c’est super lourd ! Faut sublimer la ligne de chant et trouver un autre flow de voix, parce que ce texte est terrible ! Vous avez aussi deux morceaux qui peuvent constituer deux gros délires différents”, lâche le loquace Mike. "Mais il faut que chaque titre ait une identité particulière : du rock gros riff, du plus programmé, une super ballade, un truc plus mélodique avec ligne de chant,...”
Âgé de 32 ans, ce Bruxellois d’origine rwandaise sait de quoi il parle. C’est lui qui a lancé, en compagnie de son cousin, le label il y a quatre ans et y a intégré Jali pour l’aider à se lancer dans le grand bain. Résultat : un disque d’or en septembre 2012 pour le chanteur belge. Aujourd’hui, de Cléo à Veence Hanao, en passant par Pablo Andres, la structure chapeaute une bonne dizaine de projets. Le tout, dans une dynamique d'encadrement à 360°.
"En plus de disposer de studios, nous encadrons les artistes à tous les niveaux : management et développement de carrières ; recherche de partenaires ; ou encore édition", détaille Mike. Ce dernier aspect signifie que le label donne des avances pour que les artistes puissent avancer sereinement, sans se soucier des difficultés financières. "On n'a pas la pression du temps, de l'économie. Nos artistes peuvent mettre deux ans à créer leur album, c'est bon." Et le jour où les artistes et les responsables de A.R.E. Music sont convaincus du résultat d'un album, le démarchage des maisons de disques peut débuter.
"Nous nous en sortons parce que nous avons noué des deals commerciaux, avec BMG France notamment. Nous faisons du '50-50' sur les projets que nous développons. En contrepartie de l'exclusivité sur tous ces projets, BMG investit et donne des avances sur l'argent que nous allons générer ensemble. Cela permet de payer une partie des salaires, des loyers, de développer la structure, etc.", décrit Mike.
La façade quelconque –quoique surprenante par sa petitesse– dans une rue toute aussi quelconque de Koekelberg ne laissait pourtant nullement présager du foisonnement créatif qui se déroule en son sein. Maurane, Axelle Red ou Arno sont d'ailleurs passés par ici. Partis de la location d’un des studios, les membres de A.R.E Music ont progressivement loué tout le bâtiment. Aujourd’hui, grâce à ses trois studios et à son local de répétition, le lieu offre un environnement propice à la création.
Chaque artiste du label dispose d’une clé et arrive quand bon lui semble. Certains repartent vers 20h, d’autres à minuit, voire à 5h du matin. "Il n'y a pas de règles. C’est le type de contexte de travail qui me plait", affirme Jali, qui a connu le succès avec son titre Española. "Mes meilleurs amis travaillent ici. C'est donc plus un lieu de vie, avec ma petite famille, qu’un lieu de travail. D’ailleurs, parfois, je viens et je ne fais rien parce que l'inspiration ne vient pas. Ou alors je vais voir les autres, je les aide à bosser sur leurs projets. Il y a une vraie interaction", explique le fer de lance d’A.R.E Music.
"Ca donne une énergie familiale et artistique assez magique", poursuit Mike. "On verra où ça nous mène. Peut-être que dans deux ans on aura quelques disques d'or en plus, peut-être qu'on vendra des croissants... Mais on a la chance de vivre dans ce cocon, dans cet environnement de rêve et, moi, ça me met des étoiles dans les yeux…"