Pourquoi fait-on des enfants ?

Pourquoi choisir de fonder une famille ? C’est que nous sommes des animaux… Mais la culture – et ah oui, l’amour ! – viennent aussi s’inviter dans le jeu, à côté de ce fameux et réel instinct qui nous pousse à perpétuer notre espèce.

la rédaction du quid

Pourquoi choisir de fonder une famille ? Quelle est la raison principale qui vous a poussé à avoir un enfant ? C’est la question que nous vous avons posée, à vous, lecteurs. Nous avons reçu une marée de réponses, preuve que, non, la question n’est pas idiote, n’en déplaise à certains d’entre vous, choqués sans doute de se voir aiguillonnés à propos de ce qui leur sembl (ait) e une évidence. En fait, la question est même très complexe, de l’avis même des scientifiques que nous avons interrogés également. C’est que nous sommes des animaux… Mais la culture – et ah oui, l’amour ! – viennent aussi s’inviter dans le jeu, à côté de ce fameux et réel instinct qui nous pousse à perpétuer notre espèce.

3 questions à Serge Aron, biologiste, professeur à l’ULB.

1/ L'humain a-t-il un instinct de reproduction ?

En biologie, l’instinct correspond à un comportement d’origine génétique. Il n’existe certainement pas un gène qui détermine le désir d’enfant. Mais le désir d’une transmission génétique, d’avoir une descendance, est un fondement de l’évolution biologique. Sans reproduction, toute forme d’évolution est impossible. Maximiser son succès en matière de reproduction, c’est-à-dire produire des jeunes et assurer leur survie, est la raison d’être des organismes. Au cours des millions de générations, l’évolution biologique et l’évolution culturelle ont, ensemble, conduit à ce que les organismes optimisent leur succès reproductif. Cela est vrai pour tous les organismes : les plantes, les champignons, les levures, les bactéries, les animaux et les humains.

2/ Pourquoi fait-on des enfants ?

Pour un biologiste, la réponse est relativement évidente. Avoir des enfants permet de transmettre des copies de ses gènes au cours des générations. Sans transmission génétique, sans succès reproductif, l’individu disparaît et n’existe pas à l’échelle de l’évolution biologique. A cette vision de biologiste un peu “froide” s’ajoute une composante psychologique fondamentale : avoir des enfants correspond à créer une famille, à construire avec son partenaire… Autant de facteurs qui relèvent du partage et de l’amour.

3/ Mais certains humains ne veulent pas d’enfants…

L’Homme fait en effet figure d’exception à cet égard. La culture (éducation, expériences, convictions philosophiques…) et/ou des facteurs médicaux conduisent certains à ne pas souhaiter d’enfants. L’envie d’avoir des enfants requiert aussi une réceptivité physiologique. Par exemple, la maturation sexuelle s’accompagne de profondes modifications hormonales, comme la production cyclique d’hormones sexuelles (testostérone, œstrogènes, progestérone), ou encore la production d’hormones impliquées dans l’affiliation sociale (ocytocine, vasopressine). A ces fluctuations, s’ajoutent des variations directement associées au vécu. Par exemple, le sentiment “amoureux” modifie les concentrations de certaines hormones dans le sang. Notre environnement hormonal (intérieur) et social (extérieur) interagissent en permanence. L’environnement affecte directement l’expression de nos gènes, dont la synthèse d’hormones. Pour le désir d’enfants, la physiologie est très importante, les hormones sont fondamentales. Mais il faut aussi être disponible dans sa tête, il faut en avoir envie. En d’autres termes, il faut que l’épanouissement affectif et les expériences personnelles se traduisent par un terrain hormonal favorable.

"Moi et bébé", par Eric de Bellefroid

D’abord, on a toujours besoin d’un plus petit que soi. Le petit d’homme, comme pour répondre à notre incomplétude fondamentale, sera un jour plus grand, plus beau, plus fort, plus intelligent que nous. Il réussira, lui (ou elle), ce qu’on aura nous-même raté. En même temps, il est des parents justement qui ne peuvent souffrir d’être surpassés par leurs rejetons. Ils n’ont de cesse alors de les brider, les brimer, les humilier, les rabaisser. Heureusement vint la psychanalyste Françoise Dolto, qui tenta de nous dire comment aimer nos petits, en évitant soigneusement de gâtifier avec eux. Si elle fut souvent mal lue ou entendue, ce n’était pas sa faute. Mai 68 aussi était passé par là. Qui mit fin à la « pédagogie noire » ou à « l’éducation anglaise », où la fessée volait souvent assez bas. Mais des mouvements éducatifs plus latitudinaires auraient-ils fait de l’enfant roi un enfant tyran ? On serait ici tenté de dire que la publicité et le marketing, récupérant « l’interdit d’interdire » de 1968, jouent parfois avec excès sur la corde sensible du « chantage affectif », en vertu duquel l’enfant désormais a tous les droits. Les droits de l’enfant d’ailleurs, consacrés avec l’affaire Dutroux, ont privilégié cette optique, lors qu’un certain féminisme a également ôté au « papa bisounours » son inclination millénaire à l’autorité paternelle. Ainsi, que de petits Mozart assassinés ! Souvenons-nous donc du poète libanais Khalil Gibran : « Vos enfants ne sont pas vos enfants. […] Ils viennent à travers vous mais non de vous. […] Ils ne vous appartiennent pas. » Pour comprendre que les rêves qu’on place en nos enfants sont toujours déplacés. Ah, qu’il est parfois difficile d’admettre que le bébé est déjà un petit bout de personne à part entière.

A lire, tous vos témoignages dans la version papier de votre QUID du samedi.


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