Le château du Champ-de-Bataille, le Versailles normand restauré par le décorateur Jacques Garcia
Enfin restauré par Jacques Garcia, ce château de Haute-Normandie a connu un destin des plus mouvementés.
Publié le 29-01-2023 à 17h08
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Connaissez-vous le château du Champ-de-Bataille dans l’Eure, aussi appelé le Versailles normand ? Au XVIIe siècle, le comte Alexandre de Créqui était un proche du prince de Condé, riche cousin du roi Louis XIV. Le prince fait partie de la Fronde de 1650 contre le cardinal Mazarin qui est alors aux manettes du royaume. Ce dernier parvient à écraser la révolte, mais le comte de Créqui est condamné à s’exiler sur ses terres. Il décide alors d’entreprendre la construction d’un château qui lui rappellerait les fastes de la Cour. Il fait appel à l’architecte de renom de l’époque Louis Le Vau. On attribue le dessin originel de son parc à Le Nôtre.
N’ayant plus de fonction à la Cour, le comte meurt endetté en 1702. Son neveu Gabriel, marquis de Mailloc, hérite du château qui va ensuite passer dans la famille des ducs d’Harcourt puis de Simon Palerne, trésorier du duc d’Orléans, dans la famille du duc de Beuvron (né Anne-François d’Harcourt). Après la Révolution, il passe à nouveau de main en main pour être acheté par un industriel qui le vend parcelle par parcelle. En 1903, il revient dans le giron de la famille d’Harcourt jusqu’en 1936. Il sert alors d’hospice à la ville de Neubourg qui l’a racheté. Le château de Champ-de-Bataille abritera ensuite un camp de prisonniers de guerre et une prison pour femmes. Le 11e duc d’Harcourt devient le propriétaire suivant et l’ouvre en 1957 au public, mais faute de moyens pour l’entretenir, il doit se résoudre à s’en séparer en 1982. Le nouveau maître des lieux est Gilles Boutrolle d’Estaimbuc qui donne un nouveau visage au domaine avec la création d’un golf.
En 1992, le château va enfin trouver celui qui lui rendra son lustre après plus de dix ans de travaux gigantesques de restauration et de remeublement en la personne du décorateur français Jacques Garcia (1947). Il est alors propriétaire de l’Hôtel de Sagonne, construit par l’architecte Mansart, rue des Tournelles à Paris. Il a à son actif la décoration du Fouquet’s et de plusieurs fleurons du groupe hôtelier Barrière, mais aussi les boutiques Ladurée, le Royal Monceau, le Danieli à Venise ou encore la Mamounia à Marrakech.
C’est la rénovation de l’hôtel particulier du sultan de Brunei place Vendôme à Paris qui lui donne les moyens de ses ambitions pour son projet du château du Champ-de-Bataille. Il vend dans la foulée l’Hôtel de Sagonne et le château de Menou.
Jacques Garcia va mettre toute son énergie et sa talentueuse créativité pour faire renaître le château, mais aussi son parc de 45 hectares qui n’existe pour ainsi dire plus depuis une tempête en 1993 puis une seconde en 1999. Trois millions de mètres cubes de terre furent déplacés, vingt bassins et fontaines creusés, des milliers d’arbres dont des palmiers plantés. Il s’agit aujourd’hui du plus grand jardin privé d’Europe à l’inventaire des Monuments historiques. On trouve aussi des temples classiques, un théâtre antique et des statues de marbre. En contrebas, le secret pavillon des rêves, imaginé et entièrement construit par Jacques Garcia à partir d’authentiques vestiges de l’Inde moghole. À l’intérieur, Jacques Garcia a déployé ses collections personnelles royales dans son style si reconnaissable. Le château est ouvert au public dès le printemps jusqu’aux fêtes de fin d’année.
Autre chantier entrepris par Jacques Garcia, celui de la Villa Elena à Noto en Sicile. Cette fois-ci, il s’agit d’un ancien monastère situé au sud-est de l’île et qui est devenu un havre de paix recherché. Le domaine s’étend jusqu’à la mer avec des vues époustouflantes sur Syracuse. La décoration intérieure n’est pas sans rappeler l’atmosphère du film Le Guépard avec les princes de Lampedusa avant la chute du royaume des Deux-Siciles. Un ouvrage avec des photographies de Bruno Ehrs vient de paraître chez Flammarion pour dévoiler au gré des quatre saisons cette nouvelle renaissance d’un lieu chargé d‘histoire sous la main de maître de Jacques Garcia.
Château du Champ-de-Bataille – 8, route du Château – 27 110 Sainte-Opportune-du-Bosc – https://www.chateauduchampdebataille.com