"Le renouvelable est moins cher que le charbon et le gaz"
Selon le Pr Bréchet (UCL), la Commission européenne a commis une erreur de méthode.
Publié le 17-12-2014 à 19h57 - Mis à jour le 18-12-2014 à 14h46
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La Commission européenne a récemment publié un rapport intermédiaire qui analyse le coût total de production de l’électricité en fonction des différentes filières. L’analyse, réalisée par le bureau Ecofys, tient compte du coût à charge du producteur mais aussi des subsides et des coûts externes comme la pollution.
L’éolien ne produit pas de CO2, contrairement aux centrales à gaz et au charbon. Le but de l’exercice est donc d’ajouter ces coûts externes et les subsides afin de faire une évolution globale du coût des différentes filières. L’exercice se base sur différentes hypothèses. Le plus compliqué est d’évaluer les coûts externes que pose la filière nucléaire. Ainsi, un accident est évalué à 4 euros par MWh d’électricité produite. En cas d’accident nucléaire, cela semble très faible. S’il ne se passe rien, c’est déjà trop.
Toujours est-il que la conclusion de l’étude est la suivante. Avec un coût total de 111 euros par MWh, l’éolien terrestre est la technologie la plus avantageuse financièrement. Viennent ensuite le nucléaire (131 euros/MWh), le gaz (142 euros/MWh), l’éolien en mer (189 euros/MWh), le charbon (191 euros/MWh) et le solaire (227 euros/MWh). Le charbon est fortement pénalisé par l’émission de CO2 malgré un coût de production compétitif. Le solaire, lui, est pénalisé par le montant élevé des subsides.
"Les subsides pas bien évalués"
Dans un article à paraître prochainement dans la revue "Regards économiques", Thierry Bréchet, professeur d’économie environnementale à l’UCL, estime que l’étude commandée par la Commission européenne contient de "grossières erreurs" méthodologiques. Il pointe particulièrement la façon dont sont pris en compte les subsides gouvernementaux.
Dans l’étude, 1 euro de subside est considéré comme un coût d’1 euro pour la collectivité. Selon Thierry Brechet, ce n’est pas la bonne façon de calculer. "Le coût d’un subside pour la collectivité n’est pas le montant déboursé, explique-t-il. Il faut plutôt prendre en compte le coût d’opportunité. Cette notion reprend trois éléments. Premièrement, le coût administratif pour récolter les subsides. Deuxièmement, le coût lié au fait qu’on rend certaines activités moins productives en les taxant. Troisièmement, le bénéfice qui aurait été généré si le montant du subside avait éventuellement été investi plus efficacement".
Il en découle, selon M.Bréchet, qu’1 euro de subside coûte en réalité 20 cents à la collectivité. Le professeur reconnaît cependant que la façon d’évaluer les subsides dépend de l’orientation politique. "J’ai retenu un coût de 20 cents pour 1 euro de subside car c’est le chiffre qui est utilisé en France. Mais si on est contre les subsides, ce montant peut grimper à 70 cents, voire à 1 euro".
En appliquant cette méthodologie, le classement des différentes filières est considérablement modifié. Si l’éolien terrestre reste en tête des technologies les moins chères, il accentue largement son avantage par rapport au nucléaire qui reste, malgré tout, deuxième. Autre enseignement : le solaire, qui était bon dernier dans le classement de la Commission européenne, devient compétitif par rapport au nucléaire. Le charbon devient également la technologie la plus coûteuse.
