Voici les fruits et légumes qu'il vaut mieux acheter bio
- Publié le 30-08-2018 à 07h31
- Mis à jour le 30-08-2018 à 08h09
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Copieusement arrosés de pesticides, certains aliments issus de l’agriculture conventionnelle sont à éviter. D’autres, mieux protégés ou moins concernés, présentent un moindre intérêt à être achetés sous le label bio. Si l’on considère que l’impact sur l’environnement est un des intérêts du bio, vaut-il mieux manger une pomme belge issue de l’agriculture conventionnelle plutôt qu’une banane bio qui a fait des milliers de kilomètres en avion ? Autre question : certains fruits et légumes ont-ils moins, voire pas d’intérêt à être consommés en bio ? Ou encore : s’il fallait se limiter et faire des choix, quels sont les produits bio à privilégier en priorité ?
Chaque année, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) publie un rapport sur les résidus des produits phytopharmaceutiques dans les denrées alimentaires. Au total, 84 657 échantillons de denrées alimentaires (aliments pour bébés, pour animaux, eaux food&non food, fruits, légumes, céréales et autres produits végétaux, produits d’origine animale et produits transformés d’origine végétale) ont été analysés en 2016 par 30 pays européens.
Selon le dernier rapport qui vient d’être publié en juillet, dans 96,2 % de ces échantillons dans les pays tiers, 98,3 % des produits d’origine belge et 98,7 % pour ceux des Etats membres, on n’a détecté aucun résidu dépassant les teneurs (ou limites) maximales autorisées en résidus (LMR). En Belgique, selon le rapport national, 69,9 % des échantillonnages de fruits, légumes, céréales et autres produits végétaux analysés contenaient un ou plusieurs résidus de pesticides.
Les produits bio d’un moindre intérêt
Figurent ainsi sur la liste des fruits et légumes dont l’intérêt d’acheter du bio reste moindre : les ananas, avocats, melons, kiwis, maïs sucré, mangues… dont on ne mange pas la pelure sur laquelle sont essentiellement concentrés les résidus de pesticides. De même, le chou (sauf le chou frisé), dont on retire les grosses feuilles extérieures, ne devrait pas être trop contaminé par les produits phytosanitaires. Mais aussi les oignons et patates douces qui possèdent suffisamment de défenses naturelles pour être cultivés avec un minimum de pesticides. Parce qu’elle a la chance - ou l’intelligence ? - de sortir de terre au début du printemps, soit avant l’arrivée de la plupart des insectes, l’asperge est généralement peu, voire pas traitée avec des pesticides.
Les produits bio à acheter en priorité
A contrario, on préconise généralement d’opter sans hésiter pour le bio dans les catégories suivantes. Particulièrement sensible aux maladies fongiques et bactériennes, le céleri est abondamment arrosé de pesticides et donc à privilégier en bio. De même, le raisin, sensible aux maladies fongiques, qui est traité pour le transport d’autant plus qu’il vient de loin.
Parce que, tout au long de leur croissance, ils sont aspergés de pesticides, les épinards, choux frisés, pommes de terre sont également à éviter en agriculture conventionnelle et donc à privilégier en bio. Itou pour les cerises, fraises, nectarines, pêches, poires, pommes, dont raffolent les insectes et qui dès lors sont largement arrosés de produits phytosanitaires.
Les salades, céleris branches, poivrons, poireaux, concombres, tomates, courgettes, aubergines et, dans une moindre mesure, les chicons sont également fort chargés en pesticides et donc à éviter en agriculture conventionnelle. Enfin, tous les agrumes sont aussi copieusement arrosés.
Là où les résidus persistent le plus
"Je distinguerais trois situations où la probabilité d’avoir des résidus est forte, comme le montrent les analyses, nous dit Bruno Schiffers, responsable du laboratoire de phytopharmacie au sein de l’unité "Analyse qualité risque" de Gembloux Agro-Bio Tech (université de Liège). D’abord, tous les produits horticoles à cycle court et/ou très sensibles aux maladies et aux insectes (salades, tomates, poivrons, courgettes, aubergines, céleris, raisins, fraises…)"
"Ensuite, tous les produits agricoles qui sont traités… en post-récolte ! Par exemple pour la protection lors du stockage et du transport. C’est le cas des agrumes (oranges, citrons, pamplemousses, mandarines, clémentines, etc.), mais aussi des bananes et des pommes de terre (traitées avec un anti-germe). Dans ce cas, les résidus ne viennent pas ou peu des pulvérisations en cours de culture, mais surtout des applications systématiques, faites avant le stockage. C’est aussi vrai pour les grains de blé, traités avant stockage : on trouve des résidus dans le pain complet, car ils sont présents dans les enveloppes du grain."
"Enfin, les produits importés : les résultats de l’Afsca (Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire) montrent depuis des années que les produits horticoles non bio importés des pays tiers exotiques (Kenya, Sénégal, Côte d’Ivoire, Amérique Latine…) ont 10-11 % de dépassement de LMR contre seulement 1-2 % pour les produits intra-EU. Donc un avocat EU est moins contaminé qu’un autre avocat venant du Mexique. Les haricots verts du Kenya sont souvent contaminés par les insecticides, tout comme les tomates à cause d’un nouvel insecte (Tuta absoluta)."
3 Questions à Sylvie La Spina, Agronome chez "Nature&Progrès"

1. Comment définissez-vous un aliment (fruits, légumes, céréales…) de qualité ?
Pour nous, aliment de qualité rime forcément avec bio car il n’est pas concevable de consommer un produit qui a été traité avec des pesticides et d’affirmer qu’il s’agit d’un produit de qualité puisque l’on trouve régulièrement des traces de résidus de pesticides sur ces fruits et légumes. De là à dire qu’il n’existe pas de produits de qualité hors bio, je n’irais pas jusque-là. Tout dépend de la manière de travailler de l’agriculteur. Certains en effet choisissent de ne pas prendre la certification alors qu’ils pratiquent en réalité l’agriculture biologique. Mais en optant pour des produits labellisés, on est certain de l’origine. Ainsi chez "Nature&Progrès", il y a une soixantaine de producteurs labellisés pour lesquels nous pouvons affirmer qu’il y a une démarche de qualité. Nous sommes sûrs et certains que ceux-là respectent le cahier des charges biologique.
2. Tout produit bio est-il forcément bon, voire meilleur au niveau nutritionnel et gustatif ?
Il faut voir ce que l’on entend par "bon". En bio, on a notamment la certitude de ne pas avoir de traitement chimique de synthèse sur les produits, mais on peut aller plus loin dans la démarche, sans qu’il y ait pour autant un impact bénéfique direct sur la qualité nutritive ou gustative du produit. Les études montrant la supériorité des produits bio au niveau des valeurs nutritionnelles (teneur en vitamines, en minéraux, etc.) restent rares. Et parfois controversées. De même au niveau de la qualité gustative, il n’est pas toujours évident d’énoncer des généralités. On peut cependant affirmer que l’interdiction d’utiliser, en agriculture bio, l’hydroponie (technique horticole à base d’eau sans contact avec la terre) donne des produits de meilleure qualité gustative et nutritionnelle. Une tomate cultivée selon cette technique d’hydroponie est gorgée d’eau et nécessairement de qualité inférieure à un fruit ou un légume qui a puisé ses nutriments dans le sol.
3. Pouvez-vous citer des produits qui n’ont pas d’intérêt réel à être consommés plutôt en bio ?
Non, pour nous, qu’il s’agisse de fruits, légumes, céréales ou viande - où le bio garantit que les animaux sont nourris sans OGM -, tout devrait idéalement être bio, même s’il faut évidemment rester attentif à l’origine des produits pour l’impact qu’ils peuvent avoir sur l’environnement. Il est aussi important de respecter le calendrier pour veiller à consommer des fruits et légumes de saison. Il faut réfléchir à sa manière de consommer, composer ses menus en fonction des aliments disponibles selon la saison et privilégier les circuits courts. Il y a suffisamment de choix d’autant qu’en agriculture bio, pour prévenir les maladies, on cultive parfois des variétés différentes, qui s’avèrent plus résistantes. De ce fait, il y a de nouvelles saveurs à découvrir. C’est notamment le cas pour les pommes et les poires.