Quand le passage en soins intensifs laisse des séquelles : comment mieux prévenir ce syndrome
La crise du Covid-19 a mis en lumière divers symptômes peuvent apparaître après un long séjour en soins intensifs. Environ 40 % des patients sont concernés par ce “syndrome post-soins intensifs”
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Publié le 26-01-2023 à 00h01 - Mis à jour le 27-01-2023 à 08h34
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Faiblesse musculaire intense et persistante, troubles cognitifs (de la mémoire, de l’attention, ou d’exécution des activités de la vie quotidienne) et/ou problèmes psychologiques (angoisse, dépression, stress post-traumatique) sont quelques-uns des symptômes susceptibles de se manifester chez les patients qui ont séjourné un certain temps en unité de soins intensifs (USI).
Découlant d’une immobilisation de longue durée, de la ventilation mécanique (respirateur) et de l’administration prolongée de sédatifs puissants, ces séquelles – parfois graves et invalidantes – sont malheureusement le revers de la médaille des progrès de la médecine intensive… Regroupées sous le nom de syndrome post-soins intensifs (PICS pour Post-intensive Care Syndrome), ces manifestations touchent jusqu’à 40 % des patients qui ont fait un séjour prolongé en USI.
Un syndrome aggravé lors de la crise du Covid
Si certaines mesures de prévention de ce syndrome sont décrites dans la littérature scientifique, “elles impliquent parfois des remises en question fondamentales des pratiques et habitudes au sein des unités de soins intensifs. Mais elles requièrent surtout du renfort en personnel”, fait remarquer le Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE), qui a passé en revue ces mesures pour ne retenir, dans un rapport publié ce vendredi, que celles qui ont vraiment fait leurs preuves.
“Officiellement reconnu depuis 2012, le PICS a été largement mis en lumière lors de la crise du Covid-19, qui a mené de nombreuses personnes dans les unités de soins intensifs”, souligne le KCE, qui avait déjà consacré un premier rapport à ce sujet en 2020, “destiné à alerter les médecins et à les aider à détecter rapidement les signes de PICS chez leurs patients grâce à un ensemble de six tests validés, rapides et faciles à réaliser en cabinet de médecine générale”.
Cinq grands principes à retenir et à mettre en œuvre
Evaluant cette fois les mesures de prévention du PICS documentées dans la littérature scientifique, le nouveau document s’adresse quant à lui principalement aux services de soins intensifs pour leur permettre d’agir de manière préventive.
Il s’en dégage cinq grands principes, le premier d’entre eux étant relatif à la gestion de la douleur, qui est ressentie par la plupart des patients en soins intensifs, même s’ils sont inconscients. “La douleur est en effet un puissant facteur de risque de développer des symptômes de stress post-traumatique par la suite”, souligne le rapport.
Diminuer autant que possible la durée de la ventilation mécanique, ce qui va de pair avec le maintien d’une sédation aussi légère que possible, est le deuxième conseil donné par les auteurs. “Il faut donc tenter régulièrement de réveiller le patient et de le sevrer du respirateur (favoriser sa respiration spontanée) dès que ses capacités respiratoires le permettent”, recommandent-ils.
Troisièmement, il s’agit aussi, dans la mesure du possible, de prévenir le delirium (un état de confusion fréquent chez les patients en soins intensifs), “ce qui se fait essentiellement par des mesures destinées à maintenir le patient en contact avec la réalité : maintien des cycles jour-nuit (par exemple en favorisant la lumière du jour dans le service), qualité du sommeil (par exemple en réduisant les lumières et le bruit pendant la nuit), amélioration du confort”, mais aussi – et c’est loin d’être anodin -, “en favorisant des interactions régulières avec les proches”.
Enfin, le KCE recommande de mobiliser le patient dès que possible, dans la mesure où cela pourrait contribuer au maintien de sa force musculaire et de ses capacités fonctionnelles. “Cela va de la mobilisation passive dans le lit, aux exercices actifs (par exemple avec un pédalier de lit) et même à la marche active au sein du service dès que l’état clinique le permet”.
Implication des proches et renfort en personnel
Comme déjà évoqué, “à ces principes centrés sur le patient, il faut ajouter le rôle fondamental des proches, insiste le KCE. Faciliter les contacts entre un patient hospitalisé et sa famille semble bénéfique pour tout le monde en termes de prévention du PICS.” Pour ce faire, il recommande de favoriser les visites (par exemple en élargissant les heures de visite, en prévoyant des possibilités de contacts virtuels lorsque les visites ne sont pas possibles…) et de “maintenir avec les familles une communication claire, ouverte et soutenante”.
À la fois bénéfiques pour le patient et pour les proches, d’ailleurs eux aussi à risque de PICS, ces mesures, qui sont déjà mises en œuvre en tout ou en partie, par certaines équipes de soins intensifs en Belgique, sans pour autant être une généralité, “nécessitent encore plus de personnel, en particulier un renforcement du nombre d’infirmiers et de kinésithérapeutes”, alerte le KCE, soulevant ici un problème majeur et plus que jamais d’actualité dans les soins de santé en Belgique.