Les émissions d’oxyde de soufre, déclarées de bonne foi
Le contrôle du niveau d’émissions d’oxyde de soufre se fait essentiellement sur base des informations déclarées par l’équipage. Des analyses d’échantillons sont possibles, mais elles restent rares.
Publié le 28-02-2023 à 16h55
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Les inspections réalisées par la DG Navigation portent, a minima, sur la vérification des certificats et des carnets de bord, qui doivent être tenus à jour par le capitaine ou son chef mécanicien. “Cela prend environ deux heures pour tout vérifier” nous expliquait un inspecteur de la DG lors de notre reportage le 7 juillet 2022 à bord de l’Obéron. “Le capitaine du navire ne sait pas que nous venons l’inspecter, tous ces documents doivent être à disposition et à jour dans son bureau”. Y sont consignés : le lieu et la date du changement de carburant avant l’entrée du navire dans la zone SECA, afin de prouver sa mise en conformité avec les limites de 0,1 % de soufre.
Déclaration de bonne foi
Vous l’aurez compris, toute cette procédure repose sur la bonne foi de la personne chargée de compléter les documents. “Si, officiellement, toutes les réalisations du navire sont mentionnées dans le journal de bord, nous savons tous que celui-ci n’est pas très fiable” pointe Frank Maes, Directeur de l’Institut maritime de l’Université de Gand. “L’équipage ou le capitaine du navire n’ont aucun intérêt à mentionner une action illégale. C’est bien ça le problème”.
Il existe pourtant des mesures plus approfondies, comme nous l’expliquait Bart Heylbroeck lors du contrôle du navire Obéron :
- Bart Heylbroeck (BH) : “Nous pouvons vérifier ce qui est écrit dans les documents en prélevant un échantillon. Nous avons un département spécifique pour cela au sein de la DG, qui prélève des échantillons de carburant du moteur pour savoir si le carburant contient bien 0,1 % de soufre. Mais c’est une autre inspection. Ce sont d’autres inspecteurs spécifiques pour l’environnement. Aujourd’hui on fait juste une vérification documentaire”.
- La Libre Belgique (LLB) : “Il n’y a donc aucun moyen de vérifier si ce qui est mentionné dans le registre est correct tant qu’aucun échantillon n’a été prélevé ?”
- BH. : “C’est ça. Maintenant nos inspecteurs vont vérifier la correspondance entre le carnet d’enregistrement des carburants avec le carnet de bord”.
Très peu d’échantillons sont prélevés
Or, ces prélèvements d’échantillons de carburant sont nettement moins fréquents que les inspections documentaires. La Convention Marpol, elle-même, prévoit que l’échantillonnage et l’analyse du combustible à bord soient effectués par les États du port “le cas échéant” et “lorsque cela est techniquement et économiquement réalisable”.
La législation européenne a précisé ces exigences par la suite, sans pour autant déterminer un quota minimum d’inspections par échantillons. “Le nombre d’inspections et d’échantillons à effectuer est différent dans chaque État membre, et il est calculé sur la base de la moyenne des 3 dernières années des escales de l’État membre” précise pour nous Ann Macpherson, porte-parole de l’Agence européenne pour la sécurité maritime (EMSA).
110 sur 1060
En Belgique, sur les 1060 inspections de navires effectuées chaque année, 240 d’inspections portant spécifiquement sur le soufre seraient effectuées, dont 110 avec prélèvements d’échantillons, selon les données communiquées par Bart Heylbroeck de la DG Environnement.
Plus globalement, selon les données fournies par l’Institut Royal des Sciences naturelles, 11 754 inspections ont été effectuées par les autorités portuaires entre 2016 et 2022, soit une moyenne de 1679 par an. Au total, 839 de ces inspections ont donné lieu à une prise d’échantillon sur les six dernières années, soit 120 par an en moyenne.
Pourtant, à ce jour, seule l’analyse d’échantillon de combustible en laboratoire est considérée comme recevable par la justice belge, comme on peut le lire dans ce communiqué de l’Institut royal des Sciences naturelles : “un procès-verbal n’est rédigé qu’en cas de preuves suffisantes d’infraction mise au jour lors d’une inspection portuaire et à la suite des prélèvements d’échantillons de carburants”.