OGM en Belgique : "Il faut davantage de transparence dans le processus décisionnel"
Au fédéral, les OGM sont une "compétence partagée" entre trois ministres de partis différents.
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- Publié le 29-03-2021 à 06h20
- Mis à jour le 29-04-2021 à 20h18
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Dans ce dossier des "nouveaux OGM", les prochains grands rendez-vous après la publication du rapport de la Commission européenne le 30 avril et son éventuelle proposition de modification de la directive OGM seront les conseils européens agricoles et environnementaux, annoncés pour mai et juin. "Les premières positions vont se négocier à ces moments-là. On sait donc que la Belgique va devoir se positionner rapidement, avertit la députée fédérale Séverine de Laveleye (Écolo), qui suit le dossier. L’enjeu pour moi, comme députée, c’est d’avoir plus de transparence sur les processus décisionnels. Je me doute bien que des discussions ont lieu maintenant. J’entends parler de discussions de steering group informelles, qui ne doivent donc pas être communiquées et auxquelles, nous comme députés, nous n’avons pas accès. On ne peut pas savoir qui est écouté, qui est invité, quels sont les papiers qui circulent… On n’a pas accès à ces infos. D’après nous, c’est vraiment un dossier qui mérite un débat public tout à fait transparent. C’est éminemment important."
"Secteur privé surreprésenté"
En ce qui concerne les OGM, ce sont des compétences (mise sur le marché, autorisation d’expériences) partagées, au fédéral, entre la Santé publique, l’Environnement et l’Agriculture. Les trois ministres doivent donc travailler en bonne intelligence. "Normalement, c’est M. Vandenbroucke qui va finalement avoir la main, mais tout cela est un peu nébuleux. Je voudrais savoir qui va décider, quand, comment, et pour l’instant je n’ai pas vraiment accès à cette information, regrette la députée. Par ailleurs, la Commission a réalisé une consultation des parties prenantes au niveau européen. C e que la Belgique a produit comme note de positionnement au moment de la consultation des pays membres et ce que les parties prenantes ont rédigé, nous n’y avons pas accès et les députés européens non plus, ce qui est en soi problématique. Par ailleurs, le secteur privé est surreprésenté dans les parties prenantes écoutées dans le processus de rédaction du rapport européen. Il y a fort à parier que ce sont les mêmes qui sont écoutés au niveau du positionnement belge. Le poids du secteur privé sur ce processus est totalement évident. Il est très clair que les parties prenantes du secteur privé sont écoutées aux niveaux européen et belge. Simplement, au niveau européen, on a pu y avoir accès parce qu’il y avait une audition spécifique pour les parties prenantes. On sait qu’ils continuent le lobby indépendamment de la note qu’ils auront envoyée. Mais, par contre, au niveau belge, le processus d’écoute du secteur privé n’est pas officiel et c’est là que cela pose des difficultés. On sait qu’ils sont actifs, mais on n’a pas accès à ces informations. C’est là que nous, en tant que députés, on est très inquiets."
"Une révision du cadre législatif est nécessaire"
Que décidera donc la Belgique en termes de régulation des produits issus de l’édition du génome ? Sur les OGM, l’accord de majorité indique uniquement que, "s’agissant des sélections végétales et des cultures génétiquement modifiées, le gouvernement fondera ses positions en la matière sur toutes les connaissances scientifiques disponibles". Nous avons posé la question aux ministres concernés, et leur avons aussi demandé de réagir aux techniques utilisées par le secteur du biotech en vue de la dérégulation. La réponse alignée de David Clarinval (Agriculture), Zakia Khattabi (Environnement) et Frank Vandebroucke (Santé), via leur porte-parole ? "À l’heure actuelle, la Belgique est en attente des résultats de l’étude de la Commission européenne sur le sujet. Il n’y a donc pas de discussion spécifique au niveau belge ou fédéral."
La position belge sur le dossier sera préparée au minimum via une consultation des autorités compétentes fédérales et régionales ainsi que de Sciensano (l’Institut scientifique de santé publique), du laboratoire national de référence et du conseil consultatif de biosécurité, précisent les cabinets Clarinval et Vandenbroucke.
Néanmoins, indiquent les trois ministres, en 2018, un groupe de travail technique composé de représentants des autorités compétentes fédérales et régionales en matière d’OGM ainsi que de l’Afsca (agence de sécurité alimentaire) et de Sciensano a abouti à un consensus sur une proposition de position belge en vue des réunions européennes où le sujet était à l’agenda. Il a conclu que la législation actuelle n’est plus adaptée à la réalité d’aujourd’hui et de la nécessité de réviser le texte de la directive 2001/18 "pour en faire un instrument juridique mieux adapté notamment aux récents développements en termes de techniques et d’applications, en se focalisant dans un premier temps sur les OGM médicinaux".
Les trois ministres s’accordent aussi pour confirmer que le dossier reste aussi suivi de près au sein du steering group OGM, groupe informel fédéral, constitué d’experts du SPF Santé publique, sécurité de la chaîne alimentaire et environnement, de Sciensano, de l’Afsca, de l’Agence des médicaments, de la Représentation permanente auprès de l’UE et les représentants des ministres compétents, qui se penche sur les dossiers OGM de compétence fédérale ou partagée. "Nous restons convaincus qu’une révision du cadre législatif européen en matière d’OGM est nécessaire afin de tenir compte des évolutions scientifiques et technologiques ainsi que de critères socio-économiques (considérations éthiques, balance risque-bénéfice, etc.) qui ont également évolué depuis l’élaboration de la directive OGM il y a 20 ans", ajoutent de leur côté Frank Vandenbroucke (Vooruit) et David Clarinval (MR). Si Zakia Khattabi (Écolo) n’a pas répondu à notre demande de se positionner, son parti considère les produits issus de l’édition du génome comme des OGM et souhaite qu’il en reste ainsi.
"Recherche d’information"
Quant aux activités de l’Epso (lire les deux pages précédentes), un fonctionnaire du SPF Sant é a en effet participé à la première réunion, en septembre 2019, confirment les trois ministres. L’EPSO y a présenté ses vues sur le sujet et la façon dont ils souhaitent voir évoluer les choses à l’avenir."Il n’est pas rare que nos fonctionnaires soient invités à des événements organisés par différentes parties prenantes du secteur privé ou des ONG. De tels événements sont loin d’être discrets car leurs organisateurs en font généralement une grande publicité. Il est de pratique courante, que des ONG, des firmes et organisations diverses, belges ou européennes, publient des opinions qu’ils transmettent également aux experts en charge des dossiers.Il tient à cœur du SPF Santé publique de considérer tous les points de vue sans discrimination aucune, indiquent MM. Clarinval et Vandenbroucke. La participation du fonctionnaire du SPF à la réunion Epso s’inscrit dans cette démarche de recherche d’informations et de meilleure connaissance des acteurs concernés. Ce fonctionnaire n’a d’ailleurs participé aux réunions organisées par l’Epso qu’à cette seule occasion de septembre 2019, le SPF ayant décidé de ne plus y participer par la suite." Cet agent a partagé les informations avec ses collègues fédéraux concernés, précisent les ministres...
So. De.