-1 °C, -3 °C, -5 °C ? Les producteurs de fruits wallons surveillent la baisse du mercure avec angoisse
Le seuil de sensibilité des arbres fruitiers se joue quasi à un degré près. Le gel pourrait entraîner des dégâts sur la future récolte de fruits, particulièrement si l'arbre est déjà en fleur.
/s3.amazonaws.com/arc-authors/ipmgroup/f744db9d-4059-49f1-b3ae-ab829b0df5cc.png)
- Publié le 06-04-2021 à 17h18
- Mis à jour le 12-04-2021 à 19h30
:focal(1275x865:1285x855)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/WYF62LNK45B6PAOHAAYMMKCB3Y.jpg)
Selon les prévisions de l’IRM, en raison d’un courant d’air arctique, dans notre pays, les températures descendront sous zéro dans la nuit de mardi à mercredi (-1 dans le centre à – 4 dans les provinces de Liège, Namur et Luxembourg) et encore davantage dans la nuit de mercredi à jeudi (-2 dans le centre et jusqu’à moins 6°C dans les provinces de Liège et Namur). Les propriétaires d’arbres fruitiers guettent donc les bulletins météo et la baisse du thermomètre avec angoisse, craignant les dégâts sur leur verger. “La seule chose qu’on peut dire avec certitude, c’est qu’il faudra faire le point jeudi matin, car on saura alors quelles températures il aura faites dans les deux nuits qui arrivent. Ce matin, je n’ai pas constaté de températures qui auraient posé problème durant la nuit de lundi à mardi, nous expliquait mardi après-midi Olivier Warnier, responsable du Centre fruitier wallon, qui suit une dizaine de stations météo installées dans des vergers de Wallonie. Les températures annoncées sont sur la limite (susceptible de créer des dégâts). Mais les prévisions restent des prévisions…”
Or, le seuil de sensibilité des arbres fruitiers se joue quasi à un degré près. “Pour les fruits à noyaux, les risques seront importants dès le moment où on sera entre moins deux et moins quatre degrés. Et au niveau des fruits à pépins, c’est entre moins trois et moins cinq, détaille Olivier Warnier. Si on descend dans ces températures-là, il y aura des dégâts. En dessous de moins trois, il y aura des risques et si on arrive moins cinq, cela pourrait être très important au niveau dégâts. Concrètement, cela concerne donc les pommes et les poires. Cela sera cependant variable en fonction des variétés, selon la floraison plus ou moins tardive, une sensibilité un peu plus forte au gel ou pas…
Pour les fruits à noyaux, les abricots qui en sont déjà aux fruits pourraient être touchés dès moins un degré. Si les cerisiers sont en fleurs (certaines espèces commerciales comme la Samba et la Sweetheart le sont déjà), la température critique est moins deux, sinon elle est de moins trois. En Wallonie, les principales régions de production se trouvent dans la province de Liège, le long du Limbourg, jusque Namur et Gembloux. Huit jours d’avance
Tout est en fait une question de floraison (ce qui vaut aussi d’ailleurs pour les arbres fruitiers de particuliers). De façon générale, ce qui est en fleur maintenant est plus sensible au gel. “Le plus grand problème que l’on a, c’est que depuis 4 à 5 ans, on n’a pratiquement plus d’hiver. Et donc les arbres ont tendance à se réveiller plus tôt que d’habitude, explique l’ingénieur agronome. La phénologie est donc plus précoce, c’est-à-dire lorsque le bouton commence à éclater et que l’on voit apparaître les premières fleurs ou ébauches de fleurs, ou voire un peu plus tard encore, les fruits. Or, il faut savoir que plus on se rapproche du stade de floraison, plus l’organe floral est sensible. Donc si le bouton est fermé, on va “tenir” à moins cinq degrés, si le bouton est bien éclaté, on va tenir aux alentours de moins trois, et en fleur, ce sera à peu près moins un, le petit fruit étant aussi sensible qu’une fleur. Comme on a tendance à ne plus avoir beaucoup d’hivers, la végétation a démarré très tôt. Nous sommes le 6 avril. Dans une année normale, les boutons auraient été fermés et auraient résisté à ce type de gel. Mais à l’heure actuelle, sur les types de poires Conférence par exemple, on est au stade dit “bouton blanc”. On est donc 8 jours plus tôt qu’une année normale. Ils sont donc un à un degré et demi plus sensible que si l’on était une année normale.” La Conférence recèle cependant une spécificité, qui lui vaut sa culture dans le nord de l’Europe et en particulier en Wallonie : si une fleur venait à geler, le fruit pourrait éventuellement continuer à se développer. Le rôle des insectes
“En revanche, un cœur de pommier gelé ne donnera pas de fruits. Et pour les cerises, abricots et prunes, si les fleurs sont gelées, il n’y aura pas de fruits non plus”, poursuit l’expert, qui met en évidence un dernier problème : “on a donc des variétés en pleine fleur pour le moment, comme des cerisiers. Mais pour la grosse majorité des variétés, il faut qu’une pollinisation se fasse pour obtenir un fruit. Il faut donc un transfert de pollen d’une variété vers une autre. Cela se fait par les insectes (bourdons, abeilles…). Il faut donc que les insectes circulent. Or, avec les températures que l’on nous annonce pour les dix prochains jours, il y aura très peu de circulation d’insectes.”