"La loi OGM n’est pas adaptée à l’édition du génome"
La Commission veut débattre d’un nouveau cadre légal.
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- Publié le 29-04-2021 à 20h10
- Mis à jour le 30-04-2021 à 11h08
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Tout autant attendue par les entreprises biotechnologiques que par les ONG défendant l’environnement et les consommateurs, la position de la Commission européenne sur les techniques d’édition du génome est tombée ce jeudi avec un jour d’avance sur la date prévue. Au centre de cette étude de la Commission, cette question : les nouvelles techniques génomiques (NTG), qui altèrent le génome d’un organisme, doivent-elles obéir aux mêmes restrictions (évaluation des risques, étiquetage…) que les OGM ?
L’édition du génome (ou mutagénèse ciblée) n’ajoute pas de gène étranger dans un organisme comme dans les OGM classiques, mais introduit une petite modification dans un gène existant, à un endroit précis du génome. La Cour européenne de justice avait estimé en 2018 qu’il fallait considérer les produits issus de ces techniques comme des organismes génétiquement modifiés et qu’ils ressortissaient bien à la directive de 2001 sur les OGM.
Processus de consultation
Jeudi, la Commission, après avoir consulté les pays membres, l’agence de sécurité alimentaire (Efsa) et les différentes parties (industries, ONG…), a annoncé que "son étude montre que la législation OGM actuelle, adoptée en 2001, n’est pas adaptée à ces technologies innovantes. La Commission va à présent démarrer un large processus de consultation pour débattre de la conception d’un nouveau cadre légal pour ces technologies. Elle a l’intention d’initier une action politique concernant les plantes dérivées de la mutagénèse ciblée et de la cisgénèse (insérer un gène étranger dans un organisme d’un donneur avec qui il pourrai t se croiser, NdlR ) ".
En termes de risques sanitaires, selon l’étude, "l’Efsa conclut que dans certains cas la mutagénèse ciblée et la cisgénèse posent le même niveau de risques que les techniques de sélection conventionnelle". La Commission assure qu’elle maintiendra "de hauts standards de sécurité" et annonce une future consultation publique et une étude d’impact, qui s’intéressera aux "préoccupations" sur les NTG, citant l’impact potentiel sur l’environnement, la coexistence avec l’agriculture bio et sans OGM, l’étiquetage… L’étude reconnaît en effet que les avis des parties divergent sur de nombreux points.
Les secteurs des semenciers et des biotechnologies (au premier rang desquels l’Institut flamand des biotechnologies) défendaient un changement de législation, arguant entre autres que ces NGT étaient nécessaires pour rendre l’agriculture durable et résiliente face au changement climatique, que contrôler les éventuels produits NGT (comme la loi OGM le demande) serait techniquement très difficile et que ces restrictions mettaient en péril la compétitivité. La Commission, dans ses conclusions, cite également ces arguments.
Durable ou pas ?
"Les NTG peuvent promouvoir une agriculture durable, en ligne avec nos objectifs ‘De la ferme à la fourchette’", assure ainsi la commissaire à la santé et la sécurité alimentiare, Stella Kyriakides. Avec la sécurité des consommateurs et de l’environnement comme ligne de conduite, c’est le moment d’avoir un dialogue ouvert avec les citoyens, les Etats Membres et le Parlement sur l’usage de ces biotechnologies dans l’Union européenne." Du côté des ONG, comme Corporate Europe Observatory, on rétorque, qu’au contraire aucune application crédible des NTG en ce sens n’existe déjà et que le premier organisme basé sur ces techniques ayant fait l’objet d’une demande est un maïs tolérant aux pesticides, appartenant au modèle auquel le Green Deal doit mettre fin.
Ce sujet controversé des NTG sera sur la table du Conseil des ministres de l’Agriculture en mai. En Belgique, les ministres fédéraux de la Santé Vandenbroucke et de l’Agriculture Clarinval ont indiqué leur souhait de voir la législation OGM européenne révisée.