Santé, environnement, biodiversité : les enjeux clés du congrès mondial de l’Union internationale pour la conservation de la nature
Organisée tous les quatre ans, cette réunion se tient à Marseille à partir de ce 3 septembre. Objectif : préserver davantage la biodiversité sur la planète. Et il y a urgence !
Publié le 01-09-2021 à 00h00 - Mis à jour le 06-09-2021 à 09h42
Un million d’espèces animales et végétales sont en voie de disparition sur les quelque huit millions recensées ; et le rythme de leur disparition est 100 à 1 000 fois supérieur à la pente naturelle. Face au déclin alarmant de la biodiversité, des solutions existent et des décisions fortes peuvent être prises. C’est ce que 15 000 experts de très haut vol et 1 400 organisations mondiales vont s’évertuer à dire lors du congrès mondial de la nature, présenté par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) comme "le plus grand événement mondial jamais organisé sur la biodiversité" et qui se tient à Marseille jusqu’au 11 septembre.
"Cinq maladies liées à la dégradation de l'environnement apparaissent chaque année"
Toutes les problématiques majeures seront abordées lors du congrès, de la protection des poissons de récifs coralliens à celle des mangroves et des grands singes, des pratiques alternatives aux pesticides à la pollution plastique dans les océans, de la déforestation à l'artificialisation des sols ou encore à la lutte contre le changement climatique."L'un des principaux enjeux de ce rendez-vous mondial est celui de la santé-environnement, nous explique Maud Lelièvre, présidente du comité français de l'UICN. Trois motions d'urgence porteront sur cette question cruciale et notamment sur celle des zoonoses, ces maladies infectieuses qui sont passées de l'animal à l'homme. Vous savez, on peut superposer la carte des espèces en voie de disparition et celle de la déforestation et des épidémies. Face à cette situation, il faut agir sur plusieurs leviers : limiter la déforestation, s'interroger sur l'agriculture industrielle et limiter la mondialisation".
Elle évoque un exemple édifiant, en dehors même de celui du Covid-19 : celui du virus Nipah en Malaisie en 1990. Fuyant les palmiers à huile plantés à la place de la forêt tropicale, les chauves-souris se sont retrouvées sur la côte, près de fermes industrielles porcines. Par leurs déjections, elles ont contaminé les cochons qui ont ensuite été exportés à Singapour. "Cinq maladies liées à la dégradation des habitats ou de l'environnement apparaissent chaque année, poursuit Maud Lelièvre, également déléguée générale des Eco-maires. On ne va pas vacciner la population mondiale contre chacune d'entre elles !".

Protéger un tiers des océans d’ici 2030
Autre enjeu majeur du Congrès mondial de la nature, la protection des océans. Là encore, il y a urgence : 60% du milieu marin est sévèrement altéré par les activités humaines. De grands progrès ont été réalisés ces dix dernières années en la matière, mais il faut les intensifier. Plus de 50 États, dont la France, se sont engagés en janvier lors du "One Planet Summit" à Paris à protéger au moins 30% des océans d'ici 2030 : le congrès est l'occasion de concrétiser cet engagement. Les scientifiques présents espèrent aller plus loin : ils demanderont aux États de relever le niveau de protection et d'ambition de ces aires, mais également de mettre en place un moratoire interdisant l'exploitation minière en eau profonde. Cette technique d'extraction de minerais précieux à des kilomètres sous la surface des océans présente des risques de dommages irréversibles pour la vie marine et affaiblirait terriblement les océans. "Sur ces enjeux majeurs, souligne Greenpeace, la France est à la traîne. Sa stratégie nationale ne permet pas de préserver la biodiversité marine, ni d'obtenir un haut niveau de protection du domaine maritime français ou d'atteindre les objectifs de reconstitution et de protection des écosystèmes marins."
L’argent de la relance post-Covid devra aussi protéger la nature
Lors du Congrès, l'enjeu du financement sera également au cœur des décisions fortes attendues. "Nous plaidons pour que 10% des 13 000 milliards de dollars que les États vont consacrer à la relance post-Covid soit dédié à la protection de la nature ", explique Maud Lelièvre. Les négociations en la matière se poursuivront lors de la COP 15 sur la biodiversité dont un premier volet se déroulera en octobre en Chine, avant que les dirigeants mondiaux ne se retrouvent "physiquement" pour finaliser les décisions dans le courant du printemps 2022. Au-delà des belles déclarations, les États vont être priés de mettre la main au porte-monnaie…