Le Parlement fédéral sera le premier à voter pour pénaliser l’écocide : "C'est une révolution culturelle"
Le vote en faveur de la pénalisation des crimes contre l’environnement a lieu ce mercredi en commission. Une première européenne.
/s3.amazonaws.com/arc-authors/ipmgroup/f744db9d-4059-49f1-b3ae-ab829b0df5cc.png)
Publié le 26-10-2021 à 00h00
:focal(1275x836:1285x826)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/R2IFHKNVHBHIVLSVA5ASPYC3WM.jpg)
La Belgique sera en première ligne dans la pénalisation des crimes commis contre l’environnement. Le Parlement fédéral belge devrait en effet devenir, ce 27 octobre, la première assemblée d’un pays européen à se prononcer en faveur de la criminalisation de l’écocide, tant au niveau national qu’au niveau international. Des tentatives, non fructueuses, avaient déjà eu lieu aux Pays-Bas, au Portugal, et en Suède. Une majorité "Vivaldi" (au moins) devrait se dégager en faveur de cette proposition de résolution en commission des Relations extérieures du Parlement fédéral, avant un vote en plénière (une formalité) dans deux ou trois semaines.
"Révolution culturelle"
"C'est très fort, se réjouit le député Samuel Cogolati (Écolo), à l'origine de la démarche. Avant juillet 2020, lorsqu'on a déposé la proposition de résolution, le concept n'était jamais apparu dans les archives des débats à la Chambre. Il était inconnu au bataillon ! Reconnaître l'écocide dans le Code pénal (belge) et aussi le droit pénal international est une révolution culturelle car on reconnaît que la planète, nos écosystèmes peuvent être victimes des plus graves dévastations, de crimes internationaux, au même titre que l'humanité, avec les crimes de guerre, par exemple. On quitte l'Anthropocène… Ce vote de mercredi est aussi un signal politique très fort, un mandat très fort qu'on donne au gouvernement fédéral."
Le Parlement demande à l’exécutif de prendre le leadership pour faire reconnaître l’écocide au niveau international et - car l’un ne va pas sans l’autre, selon M. Cogolati - poursuivre ses efforts au niveau national, afin d’intégrer l’écocide dans le Code pénal belge. Suivant l’accord de gouvernement, un comité d’experts mis en place par le ministre de la Justice a pour mission explicite de réfléchir, dans sa révision du Code pénal, à l’inclusion de l’écocide. La résolution demande au gouvernement de venir rapporter au Parlement dès l’analyse bouclée (sans doute pas avant 2022).
"Coalition des volontaristes"
Au niveau international, "on avance des pistes très concrètes", continue le député fédéral. Tout d'abord, que la Belgique dépose un amendement au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye afin d'y inclure le crime d'écocide (au même titre que les crimes contre l'humanité). Ce serait la première fois depuis 1945 qu'un nouveau crime international est reconnu. Cependant, obtenir la majorité des deux tiers des 124 pays du Statut de Rome risque de prendre du temps. Donc, "pour aller encore plus vite et être plus efficace et agir ici et maintenant", la résolution demande au gouvernement d'initier un nouveau traité international des pays les plus volontaristes(coalition of the willing) pour déjà poursuivre et réprimer l'écocide au niveau international. "Il y a toute une série d'États à la pointe, comme les petits pays insulaires."
L'idée d'écocide n'est pas, insiste Samuel Cogolati, "de viser le passant qui jetterait sa cigarette par terre". Dans la proposition de résolution, un écocide est un dommage grave et étendu ou durable. L'écocide ne vise pas non plus de simples accidents, l'élément moral étant pris en compte : l'auteur de l'écocide doit avoir connaissance de la réelle probabilité que ses actes causent à l'environnement des dommages graves qui soient étendus ou durables. Pour Samuel Cogolati, la pollution par l'entreprise 3M, "qui a délibérément rejeté pendant des années des quantités trop élevées de PFOS", pourrait "être clairement évoquée dans le contexte de la criminalisation des écocides". "Criminaliser l'écocide sert à stopper l'impunité de ces très graves pollutions environnementales qui ont d'ailleurs aussi des effets sur la santé des populations. Dans la majorité des grands cas de pollutions connus, on comprend que l'impunité règne, et, que, souvent les entreprises en sortent quasi indemnes."