Les promesses de l’Inde à la Cop 26 sont-elles crédibles ? "Nous aurons besoin de capitaux importants"
L'Inde est l’un des plus gros pollueurs de la planète.
Publié le 03-11-2021 à 22h26 - Mis à jour le 04-11-2021 à 09h12
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L'Inde, 1,3 milliard d'habitants, est le troisième émetteur mondial de gaz à effet de serre. Mais quand le Premier ministre Narendra Modi est monté à la tribune de la Cop 26 à Glasgow lundi, il a endossé le costume du bon élève. Promis, juré, il fait ce qu'il faut pour enrayer le réchauffement. "L'Inde n'a négligé aucune piste pour démontrer qu'elle a rempli ses obligations", clame-t-il. Mieux, il annonce "un don de cinq 'élixirs'" pour le climat. D'abord, "l'Inde va porter ses capacités électriques non fossiles à 500 GW d'ici à 2030". C'est trois fois plus que ce qu'elle possède aujourd'hui. "Deuxièmement, l'Inde satisfera la moitié de ses besoins électriques grâce au renouvelable avant 2030", ajoute-t-il avant de promettre que son pays atteindrait la neutralité carbone dans… 50 ans. Ces engagements constituent "une contribution sans précédent de l'Inde en faveur du climat", plaide Narendra Modi, qui flatte ainsi la fibre nationaliste de son électorat.
Faire oublier l’échec de ses politiques
Si le leader nationaliste hindou présente son pays comme un bon élément de la lutte pour limiter la hausse des températures, c’est parce qu’il doit aller de l’avant vu les échecs de sa politique environnementale. Alors qu’il prononce son discours à Glasgow, à 6 800 km de là, à New Delhi, la pollution de l’air atteint des proportions alarmantes. Il est 22 h et le taux de particules fines PM 2.5 est seize fois supérieur au seuil préconisé par l’Organisation mondiale de la santé. Un brouillard grisâtre enveloppe l’agglomération. New Delhi a été la capitale la plus polluée du monde en 2020 pour la troisième année consécutive, d’après une étude du groupe suisse IQAir. Le géant sud-asiatique abrite ainsi trente des cinquante villes les plus polluées du monde.
Ce contraste entre le discours du Premier ministre Modi et la réalité met à nu les difficultés des autorités fédérales à honorer leurs engagements. Lors de la Cop 21 en 2015, le gouvernement fondamentaliste hindou avait publié des objectifs ambitieux : installer 175 GW de capacités de production électrique d’origine renouvelable d’ici à 2022. Six ans plus tard, l’échec est patent. D’après le ministère de l’Énergie, l’Inde disposait seulement de 101 GW de capacités installées au 30 septembre.
Les pays riches doivent payer la transition des pays pauvres
Car l’Inde mise toujours sur le charbon pour satisfaire ses besoins, grâce à l’entreprise publique Coal India. Celle-ci a approuvé le développement de 36 mines pour sept milliards d’euros l’an dernier, un record pour le groupe. La construction de centrales carburant au charbon a fait augmenter les capacités installées de 38 GW en six ans, presque autant que le solaire. La moitié des capacités électriques nationales repose sur le charbon.
Le ministre de l'Industrie, Piyush Goyal, a dessiné deux conditions pour que l'Inde se détourne de cette énergie, à l'issue du G20 dimanche : "Nous aurons besoin de capitaux importants pour construire des centrales nucléaires. En outre, nous devons faire partie du Groupe des fournisseurs nucléaires (GFN) pour disposer d'un approvisionnement fiable en matières premières."
La dépendance au charbon n’est pas la seule ombre au tableau. Le gouvernement Modi avait promis durant la Cop 21 d’aménager 10 millions d’hectares de forêts supplémentaires d’ici 2030. Le pays en a perdu 724 000 entre 2016 et 2020, selon Global Forest Watch. Un constat que les autorités ont démenti dans leur dernier rapport sur l’état des forêts en 2019. Mais le document reconnaît que la couverture forestière n’a augmenté que d’un million d’hectares en quatre ans, soit 1,5 % de plus.
Pour le gouvernement Modi, la problématique du réchauffement est une question de justice climatique. "Les pays développés ont récolté les fruits d'une énergie à bas coût pendant des années. C'est à eux d'atteindre la neutralité carbone plus rapidement", a lancé Piyush Goyal dimanche. Lundi, Narendra Modi a exigé 1 000 milliards de dollars d'aide des pays riches.