Les Européens polluent moins chez eux, mais davantage chez leurs voisins
La consommation de biens et produits divers par les citoyens de l’Union européenne alimente des échanges écologiquement inégaux. Ce sont principalement les pays d’Europe de l’Est qui en subissent les effets négatifs.
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Publié le 26-01-2023 à 17h03
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En moyenne, l'empreinte carbone totale d’un citoyen de l’Union européenne s'élevait 6,8 tonnes de CO2 par personne en 2019. Si environ un quart de ces gaz à effet de serre sont directement émis par les ménages à travers la combustion d’énergies fossiles (pour se chauffer, se déplacer...), c’est la consommation de biens qui génère la plus grande part d’émissions. Selon Eurostat, 5,2 tonnes de CO2 par personne sont émises indirectement le long des chaînes de production de produits finis consommés ou investis au sein des Vingt-sept. Un niveau qui est très supérieur à celui des habitants des pays en développement. En 2019, un Burundais émettait pour sa part 100 kilos de CO2 par an, selon la Banque mondiale.
Or, selon une nouvelle étude publiée dans la revue Nature Sustainability, ce ne serait pas au sein des Etats membres que l’on observerait les plus grosses conséquences environnementales liées à cette consommation, mais bien aux portes de l’Union, dans les pays d’Europe de l’Est. Pour arriver à cette conclusion, des chercheurs issus d’universités néerlandaise, britannique, américaine, ainsi que de l’Académie chinoise des sciences, ont passé au peigne fin divers indicateurs environnementaux pour la période allant de 1995 et 2019 : émissions de gaz à effet de serre, consommation de matériaux, utilisation des sols, formation de particules ou encore perte de biodiversité. Les auteurs de l’étude ont constaté que sept d’entre eux avaient augmenté de façon notable en dehors de l’UE, tout en diminuant au sein des Etats membres. Des augmentations ont aussi été observées au Brésil, en Chine, en Inde, au Japon ainsi qu’au Moyen-Orient.
“Pour le bien de notre planète, les pressions et les impacts environnementaux liés à la consommation de l’UE doivent diminuer de manière substantielle, afin de réduire l’exportation des dommages environnementaux au-delà des frontières des États riches de l’UE vers les régions plus pauvres”, assure Yuli Shan, professeur associé en transitions durables à l’Université de Birmingham et coauteur de l’étude. Il cite par exemple l’Albanie, le Monténégro, la Serbie, l’Ukraine et la Moldavie.
Les chercheurs ont également analysé la valeur ajoutée par la consommation de biens et de services aux économies des 27 pays membres actuels de l’UE entre 1995 et 2019. Leurs résultats montrent que près de 85 % des avantages économiques liés à la consommation de biens et services seraient conservés au cœur de l’UE.
Agir contre la surconsommation
Pour les chercheurs, il est donc nécessaire de s’attaquer aux habitudes de consommation des citoyens de l’UE et surtout, à la surconsommation. “Étant donné que de nombreux consommateurs super fortunés contribuant de manière disproportionnée aux dommages environnementaux mondiaux et à l’utilisation des ressources vivent dans l’UE, nous devons concentrer les efforts d’atténuation sur la surconsommation”, pointe Benedikt Bruckner (Université de Groningue), l’un des auteurs.
Son collègue, le professeur Klaus Hubacek (Université de Groningue) ajoute que les pressions et les impacts environnementaux associés à la surconsommation de l’UE peuvent être réduits de plusieurs façons : “Notamment en modifiant la façon dont les gens voyagent ou leurs choix alimentaires, et en créant de nouvelles politiques commerciales de l’UE qui réduisent les pressions et les impacts environnementaux (exogènes, NdlR) associés aux biens et aux services.”
Leurs recherches ont été soutenues par la Fondation nationale des sciences naturelles de Chine, la Fondation des sciences naturelles de Shandong et le programme majeur de la Fondation nationale des sciences sociales de Chine. Greenpeace Allemagne a également soutenu les scientifiques lors de l’analyse initiale des données, de la modélisation et des discussions dans le cadre du projet “Outsourced Environmental Degradation of the EU”.