Agriculture intensive, réchauffement climatique : 800 millions d’oiseaux ont disparu en 40 ans en Europe
Des chiffres qui font froid dans le dos suite à une étude des chercheurs du CNRS et de l’université de Montpellier qui explique que le nombre d’oiseaux a notamment baissé de 57 % en milieu agricole. Le réchauffement climatique joue également un rôle dans la réduction des populations de ces animaux.
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Publié le 16-05-2023 à 08h13
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Depuis 1980, près de 800 millions d’oiseaux ont disparu de notre ciel, ce qui équivaut à 20 millions de volatiles chaque année, selon une étude du Centre national pour la recherche scientifique (CNRS) et de l’université de Montpellier publiée lundi 15 mai dans la revue scientifique Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS).
”Le nombre d’oiseaux a décliné de 25 % en 40 ans sur le continent européen”, souligne un communiqué de presse, et le chiffre atteint même “57 % pour les oiseaux des milieux agricoles”.
Cette étude cite comme principale responsable “l’intensification de l’agriculture”, c’est-à-dire “l’augmentation de la quantité d’engrais et de pesticides utilisée par hectare”.
Le nombre d’oiseaux a particulièrement diminué chez les espèces d’oiseaux insectivores, notamment à cause de ces produits qui perturbent la chaîne alimentaire.
L’augmentation des températures liée au réchauffement climatique a aussi un fort impact sur les populations d’oiseaux, selon les chercheurs. Le nombre d’oiseaux forestiers a également diminué de 18 % et les oiseaux urbains de 28 %.
Pour mener à bien cette étude, les scientifiques ont travaillé sur “le jeu de données le plus complet jamais réuni”, affirme le CNRS, soit “37 ans de données de 20 000 sites de suivi écologique dans 28 pays européens, pour 170 espèces d’oiseaux différentes”.
Un paradigme de l’après deuxième guerre mondiale
Pour enrayer cet effondrement, il faudrait commencer par changer de modèle d’agriculture. Or “on continue à être dans une vision industrielle du monde agricole”, associant recours massifs à la mécanisation et à la chimie, regrette Vincent Devictor.
”On n’est toujours pas sorti de ce paradigme de l’après deuxième guerre mondiale”, souligne le chercheur, citant l’augmentation de mégafermes en France au détriment des petites surfaces.
Outre l’agriculture, d’autres facteurs liés à l’activité humaine ont aussi des effets sur les populations d’oiseaux, à commencer par le changement climatique.
Logiquement celui-ci touche durement les espèces préférant le froid (40 % de déclin), comme la mésange boréale, mais n’épargne pas non plus les espèces amatrices de chaleur (18 % de déclin).
Enfin la progression de l’urbanisation fait aussi des victimes parmi les martinets ou encore les hirondelles.
”On fait des territoires qui sont de plus en plus hostiles, y compris l’intérieur du milieu urbain”, souligne Vincent Devictor, qui a travaillé avec deux collègues basés en France, le doctorant Stanislas Rigal et Vasilis Dakos du CNRS.
”Des espèces aimaient bien nicher dans des anfractuosités, être dans des endroits où il y a encore des insectes dans les milieux urbains. Avec les modes de bétonisation aujourd’hui, couplés à la disparition des insectes, cela devient hostile même pour eux”, indique-t-il.
Le CNRS alerte sur le sort de plusieurs espèces, dont le moineau friquet, le tarier des prés et le pipit farlouse, dont les populations ont baissé de 75 %. Les conclusions de l’étude “démontrent l’urgence de repenser le mode de production alimentaire actuel”, conclut le communiqué de presse.