200 000 euros pour sauver “la nature d’ici”

En partenariat avec la Fondation Be Planet, le WWF Belgique a créé un fonds pour soutenir des projets citoyens qui ont un impact concret et positif sur la nature locale. L'appel à projets se clôture le 24 septembre.

Gilles Toussaint

Que l’homme prenne soin de la nature et la nature prendra soin de l’homme. Portée par le courant de l’écopsychologie, cette jolie formule n’a sans doute jamais autant résonné qu’au cours de ces derniers mois où notre planète s’est retrouvée ballottée de “Covid en climat”.

"Quand les cinémas, les restaurants, les cafés ou les théâtres ont fermé avec la pandémie, beaucoup de gens ont pu mesurer à quel point nous dépendons de la nature. Ils ont pu apprécier le service qu'elle nous rendait en nous permettant d'aller nous promener et prendre l'air en forêt", corrobore Koen Stuyck, porte-parole du WWF Belgique.

Pour célébrer ses soixante ans d’existence, malgré ce contexte particulier, l’ONG connue pour ses programmes de sauvegarde d’espèces sauvages emblématiques a choisi de lancer une initiative qui sort de son cadre habituel en créant un fonds entièrement consacré au financement de projets citoyens dédiés à la protection de l’environnement en Belgique. Doté de 200 000 euros, celui-ci permettra de donner un coup de pouce à plusieurs dizaines d’actions.

"En quelques années, nous sommes passés de 75 000 à 120 000 adhérents et les donations ont également progressé. Cette augmentation traduit un intérêt pour ces enjeux et nous percevons également l'inquiétude que de plus en plus de gens ressentent face à la dégradation de la nature, poursuit Koen Stuck. Beaucoup d'entre eux veulent faire quelque chose pour renverser ce déclin, mais ne savent pas comment s'y prendre. Ce fonds est une façon de leur permettre d'être dans l'action et de faire quelque chose avec leurs propres mains. Nous pensons également que c'est un bon moyen pour sensibiliser les citoyens et leur faire prendre conscience de la valeur de la nature et du fait que l'on a besoin d'elle pour survivre."

Alors qu'à l'instar de ce qui se fait pour le climat des négociations ont lieu à l'échelle internationale pour tenter d'enrayer l'effondrement de la biodiversité, la décennie qui vient de débuter sera cruciale car tous les indicateurs sont dans le rouge, complète-t-il. "Les choses ne vont pas bien et pas seulement à l'étranger. En Belgique aussi la biocapacité est en train de se dégrader, surtout dans les territoires agricoles (lire épinglé ci-contre). Avec les sécheresses à répétition et maintenant les inondations, on a vu que les conséquences du réchauffement climatiques sont finalement arrivées chez nous. Or la biodiversité, c'est le revers de la pièce du réchauffement. Nous avons besoin d'elle pour nous adapter. C'est un moyen de nous protéger des dérèglements du climat qui est à portée de main. Nous devons donc parvenir à inverser cette tendance et, pour cela, on n'a pas uniquement besoin des gouvernements, mais aussi de la population."

Toucher un large public

Pour mettre en œuvre ce programme, le WWF Belgique a choisi de s'associer à la Fondation Be Planet. Créée en 2015, cette dernière s'est précisément donné pour objectif de soutenir des projets citoyens à l'échelle locale afin d'accélérer la transition écologique et solidaire. "Nous nous sommes spécialisés dans l'organisation de ces initiatives à petite échelle, notamment dans le cadre de la campagne Proximity, explique Melissa Bongi, la porte-parole de la Fondation, qui constate elle aussi "qu'avec la pandémie, les gens ont commencé à se soucier davantage de leur environnement proche. Toutes les catastrophes naturelles font aussi qu'ils se posent beaucoup plus de questions sur le climat et l'écologie".

200 000 euros pour sauver “la nature d’ici”
©FLEMAL JEAN-LUC

"Nous essayons de travailler avec des communes qui n'ont pas forcément énormément de moyens pour financer ces projets citoyens et d'y associer également des entreprises locales afin de créer un écosystème au sein duquel chacun pourra s'engager selon ses possibilités, poursuit-elle. Qu'un grand organisme connu et reconnu comme le WWF soutienne ce genre de projets citoyens montre que les mentalités évoluent. C'est important pour nous car 200 000 euros, c'est une somme que l'on ne reçoit pas tous les jours."

Concrètement, les candidatures doivent être introduites avant le 24 septembre à midi. Les projets doivent avoir un impact concret et positif sur la nature locale et se rapporter à un ou plusieurs des thèmes suivants : nature et biodiversité, agriculture, pollution, sécheresse et climat. "Il peut s'agir de potagers collectifs, par exemple, mais aussi de planter des haies mixtes dans des zones sujettes aux inondations ou encore d'organiser des visites pédagogiques pour sensibiliser des enfants, etc.", décrit Melissa Bongi. "Nous voulons être le plus large possible car notre crainte est de ne toucher que des initiés. Or il est important de faire passer le message que "Monsieur et Madame Tout le monde" peuvent aussi faire changer les choses, même si c'est à petite échelle dans leur quartier. La biodiversité est tout autour de nous et pas seulement dans les parcs naturels."

Sont éligibles des petits groupes de personnes qui constituent une association de fait, des petites ASBL ou encore des coopératives existantes ou créées pour la cause. Un jury indépendant sélectionnera les lauréats qui bénéficieront d’une aide allant de 2500 à 5000 euros. Celui-ci fondera ses choix sur une série de critères parmi lesquels l’originalité du projet, sa faisabilité et sa pérennité dans le temps ou encore sa capacité à rassembler des personnes d’horizons divers de manière inclusive. Car l’un des buts est de contribuer à la cohésion sociale en amenant les citoyens à travailler ensemble afin qu’ils prennent conscience de la force du collectif et de la coopération.

L’espoir est aussi de créer un effet boule de neige et que ces réalisations donnent envie à d’autres citoyens de se lancer, afin de perpétuer le Fonds au cours des prochaines années.

Toutes les infos pratiques sont disponibles sur https://fonds.wwf.be/fr/appel-a-projets/

--------------------------------

Les espèces en déclin dans les zones agricoles

En septembre 2020, le WWF a publié pour la première fois en collaboration avec Natagora, Natuurpunt et l'Institut royal des sciences naturelles un rapport "Planète vivante" entièrement consacré à la nature en Belgique.

Cette étude analysait la variation moyenne de la taille des populations de 283 espèces d’oiseaux, de mammifères, d’amphibiens, de reptiles et d’insectes présentes sur notre territoire pour la période s’étalant de 1990 à 2018.

Si le bilan global – une tendance à la stabilité avec une légère hausse – peut s’avérer rassurant, le rapport mettait en évidence des évolutions inquiétantes pour les milieux forestiers et, surtout, les zones agricoles qui ont vu les populations d’oiseaux décliner de 61 % sur la période 1990-2018.

Vous êtes hors-ligne
Connexion rétablie...