Cap sur le sport pour surmonter la fatigue liée à la sclérose en plaques (REPORTAGE)
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Publié le 30-05-2019 à 08h31 - Mis à jour le 10-07-2019 à 17h12
Ce jeudi 30 mai est la Journée mondiale de la sclérose en plaques. Cette maladie inflammatoire, qui attaque le système nerveux central, touche près de 12. 000 personnes en Belgique, surtout des jeunes femmes. Les cliniques Saint-Luc étudient les bienfaits d’une activité physique régulière pour lutter contre la fatigue, qui touche 80 % des patients.
"Ah, la vache… Je vais bien dormir ce soir ! " Alessandro titube très légèrement au moment de quitter l’engin (de torture) auquel il vient de se soumettre pendant quelques minutes sous les conseils de deux jeunes kinésithérapeutes, en charge du projet "Cap sur le sport" mis sur pied par les cliniques universitaires Saint-Luc. Dans la salle de fitness du centre sportif Mounier, qui jouxte l’hôpital, quelques personnes s’appliquent à leurs exercices sur les divers appareillages : tapis de marche, station de musculation, haltères, stepper… Chacun à son rythme. Selon la pathologie neurologique dont il souffre : sclérose en plaques (SEP), mais aussi lésions à la suite d’un AVC, Parkinson, accidenté paraplégique…
Alessandro, aujourd’hui âgé de 44 ans, avait 33 ans lorsqu’il a reçu son diagnostic de sclérose en plaques. "Pendant une dizaine d’années, ça a été un peu avec des soubresauts, nous dit-il. Jusqu’au moment où, vers 2012, j’ai fait une grosse poussée. J’ai alors perdu toute une partie de sensibilité et de motricité dans la main. Les examens ont montré l’existence de lésions supplémentaires, nécessitant un traitement par injection. En 2015, j’ai dû commencer un nouveau traitement, plus lourd suite à deux nouvelles grosses poussées. Depuis lors, je n’ai plus fait de rechute."
Il y a un peu plus d’un an, on a proposé à Alessandro d’intégrer le service de médecine physique. "J’ai commencé par faire de la revalidation au gymnase. Et maintenant, je passe encore à un cran supérieur dans la revalidation et la recherche d’autonomie, avec ces séances en salle de fitness. Je refais de l’entraînement à l’effort avec les tapis roulants, les vélos, les poids, le cardio-training… On verra ce que ça va donner." Toutes les huit semaines, les patients sont réévalués avec des échelles spécifiques pour objectiver leurs progrès.
S’il dit "avoir la chance de pouvoir encore travailler, en horaire médical", Alessandro présente essentiellement un problème au niveau du "steppage". C’est pour cette raison qu’il porte des "releveurs de pieds". "Au niveau de la mobilité, jusqu’ici, ça va, estime-t-il. Il faut faire vraiment attention pour voir que je boitille un peu. Mais je ne suis pas encore au point de me déplacer avec une canne ou en fauteuil roulant…"

Des problèmes de fatigue
S’il admet avoir aussi quelques problèmes d’équilibre, il n’est pas non plus épargné par la fatigue. "Il y a la fatigue neurologique qui est inhérente à la maladie, puis celle liée à tous les médicaments qui visent à réguler l’influx nerveux. Pour pallier les effets de la fatigue, je prends aussi des vitamines et je fais du sport."
"Alessandro souffre essentiellement d’une atteinte musculaire au niveau des jambes, nous explique Pierre Bronchart, kinésithérapeute. Il est à ce niveau beaucoup plus vite fatigable, il a moins de force. Nous essayons donc de travailler l’endurance et de faire du renforcement des membres inférieurs afin qu’il puisse être plus à l’aise à la fois dans son quotidien et dans ses activités sportives. Tant sur la durée, que sur sa coordination, son équilibre et sa force musculaire."
Les activités qui se déroulent dans cette salle de fitness s’intègrent dans d’autres projets qu’il poursuit en parallèle, avec la Ligue SEP nationale, comme partir en randonnée dans les Alpes, ou encore les 20 kilomètres de Bruxelles qu’il a faits en tricycle adapté (orthopédique assis). "Avec assistance électrique, précise le patient, au cas où j’avais un coup de mou. Parce que, avec la sclérose en plaques, on ne sait jamais ce qui peut se passer. Il y a plein de projets qui se mettent en place au niveau qui est le mien. C’est très important pour moi de pouvoir participer à ces challenges. Je me mets des petits défis pour tenter d’aller toujours un peu plus loin. Cela me montre que je suis capable de certaines choses que je ne soupçonnais pas et, au niveau mental, c’est très positif. C’est également un défi collectif. Le fait de se retrouver avec d’autres personnes est aussi bénéfique. On s’encourage les uns les autres. J’essaie en outre de faire un maximum de marche nordique, soit le long de la Promenade verte à Bruxelles soit en forêt de Soignes, car je pense que c’est ce qui est le plus adapté à ma pathologie et à mes capacités. Je m’efforce de rester le plus actif possible."
Composées d’exercices d’endurance et de thérapie par l’exercice, d’autres séances sont organisées dans les infrastructures de Saint-Luc. "Il y a différents types d’ateliers (coordination, équilibre, renforcement…), explique encore le kiné. On peut aussi faire du badminton, du ping-pong, du tennis parfois adapté en fauteuil…"
De ces séances, Alessandro espère pouvoir garder un maximum d’autonomie, retrouver une certaine force musculaire et refaire de l’exercice physique afin de pouvoir, à terme, s’inscrire dans un centre et s’adonner à ces activités physiques par lui-même. "Ces séances, c’est aussi retrouver le goût au sport, mais également le goût à la vie. Retrouver la ‘niaque’."

Sensibilisation
La sclérose en plaques (SEP) est une maladie inflammatoire et neurodégénérative qui touche le système nerveux central. Près de 85 % des personnes atteintes ont une forme appelée “rémittente-récurrente” avec une alternance de poussées suivies de périodes de rémission. D’autres patients présentent une forme “progressive” de la maladie. Pour le plus grand nombre de personnes atteintes, il existe aujourd’hui des traitements qui permettent de retarder les poussées, à défaut de pouvoir en guérir.
La Journée mondiale de la sclérose en plaques, dont la 11 e édition a lieu ce jeudi 30 mai, mettra cette année l’accent sur les symptômes non visibles de la pathologie et leurs multiples conséquences. Sous le slogan “Ma SEP invisible”, cette journée vise à sensibiliser l’entourage des personnes atteintes, leurs employeurs, les décideurs, mais aussi le public en général en les invitant à regarder au-delà des apparences et à être attentifs aux autres. La “World MS Day” est une initiative de la Fédération internationale de la sclérose en plaques (MSIF). Plus d’infos : www.ms-sep.be