L’hypnose en fécondation in vitro? Super!
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Publié le 18-10-2019 à 16h59 - Mis à jour le 18-10-2019 à 18h09
"C’était super !". Voilà ce que s’est tout bonnement exclamée Méline De Corte, juste après la ponction d’ovocytes réalisée sous hypnose par l’équipe du service de gynécologie et andrologie des Cliniques universitaires Saint-Luc à Bruxelles. "Je me souviens très bien de mes premiers mots après la ponction, nous raconte la jeune femme de 28 ans, en présence de ses complices d’aventure, le Pr Céline Pirard, gynécologue, et de l’infirmière-chef, Catherine Rousseau.
Sous leur regard attendri, la jeune maman d’un petit Scott à présent âgé de cinq mois poursuit le récit de son parcours en PMA (procréation médicalement assistée), commencé en juin 2017. Après avoir suivi le schéma classique est venu "le moment où il a fallu passer par les ponctions".
"Mon mari avait déjà touché à l’hypnose bien avant que j’entre en PMA. C’est lui qui m’a suggéré de faire la ponction sous hypnose. Au départ, j’étais réticente, car je redoutais que cela crée un stress supplémentaire. Mais suite à une consultation avec la gynéco, j’ai fini par adhérer à l’idée de faire la ponction sous hypnose. Je me suis dit : ok, je vois comment je me sentirai à ce moment-là, je me laisse vivre et on verra bien". Et elle a vu. "Une infirmière m’a prise en charge. Une vingtaine de minutes avant d’entrer dans la salle des ponctions, elle m’a demandé s’il y avait un endroit qui me plaisait particulièrement et où je me sens bien. J’ai parlé d’un coin de campagne où je suis tout à fait sereine. Ensuite, dans un état pleinement conscient, on entre dans la salle des ponctions".
C’est alors que commence la séance d’hypnose. Un masque à oxygène sur le visage, la patiente se centre sur sa respiration, l’infirmière lui prend la main… "Cela me conforte et me rassure", nous confie Méline, prête à penser à cet endroit privilégié au point d’en oublier l’acte médical qui est en train de se dérouler. "Je sais que je vais être là pendant toute la durée de la ponction mais que, en même temps, je serai dans le lieu que j’ai suggéré. Le temps paraît très court. Comme si cela n’avait duré que cinq minutes alors que cela faisait plus d’une demi-heure qu’on était en train de travailler. Je me suis sentie tout à fait bien et je n’ai vraiment pas eu l’impression de vivre quelque chose de douloureux. J’en ressors avec beaucoup de satisfaction d’avoir pu participer à un projet commun. Nous nous sommes sentis, le papa et moi, vraiment bien entourés. L’équipe est très soudée, il y a vraiment un grand esprit de bien-être auprès des patientes. C’était quelque chose de tout à fait naturel. L’hypnose m’a permis de vivre cette intervention de manière tout à fait sereine", conclut la jeune maman qui a poursuivi les séances d’hypnose ensuite à Saint-Luc pour l’accouchement. "C’est très intéressant pour la gestion des contractions, par exemple".
Un vrai travail d’équipe
"Grâce à la Fondation Saint-Luc, nous avons pu bénéficier d’une formation en hypnose, explique Catherine Rousseau, Infirmière chef. En général, on récolte un thème avec la patiente. C’est-à-dire là où elle est confortable, cela peut être un lieu, une action (faire du cheval, par exemple). On essaie de visualiser si la patiente est plus dans le sensoriel, plus dans le son, les odeurs… Une fois en salle, on met la patiente dans un état d’apaisement. On passe vraiment dans une transe dite positive, en lui murmurant à l’oreille. On reste auprès d’elle et on lui explique aussi que, parfois, notre voix va s’en aller. Mais qu’elle est tout à fait capable de rentrer dans cette zone de bien-être, qu’elle va créer elle-même avec nous comme accompagnant".
Sachant que l’on fait de l’hypnose, l’anesthésiste va utiliser d’autres médications, plus légères, qui permettront à la patiente de se sentir mieux par la suite. "C’est un travail qui se fait en équipe, poursuit l’infirmière. Il faut savoir que l’anesthésiste reste toujours présent car il peut arriver que la patiente sorte de sa transe positive et qu’elle ait besoin d’une médication supplémentaire".
"Toutes nos infirmières sont formées en communication thérapeutique ainsi qu’en hypnose, intervient le Pr Céline Pirard, gynécologue, responsable de l’Unité de fécondation in vitro aux Cliniques universitaires Saint-Luc, formée en hypnose médicale. Pendant le parcours de PMA, il y a des moments difficiles, notamment la ponction d’ovocytes qui peut être génératrice de stress, d’angoisse par rapport à la douleur. Pouvoir proposer aux patients de bénéficier de l’hypnose va leur permettre de les remettre au centre du projet de procréation. Certaines patientes nous signalent qu’avec la sédation, elles ont été très endormies ; elles ne se souviennent plus vraiment de ce qui s’est passé et elles ont peut-être un peu le sentiment d’être dépossédées de cette étape. L’hypnose, ce n’est vraiment pas un moment où l’on dort. Cela reste extrêmement actif au niveau de la vigilance. La personne qui reçoit l’hypnose formelle va travailler au moment où elle va faire sa séance. Il faut qu’elle soit motivée, en confiance avec les équipes."
Cela demande une formation au niveau du personnel. "Le gros avantage dans nos équipes est que quasi tous les anesthésistes font de l’hypnose, ainsi que toutes les infirmières et la grande majorité des gynécologues, poursuit la gynécologue. Nous ne le proposons pas systématiquement mais on en parle généralement à la séance d’information". On estime que près de 10 % des couples y recourent dans cette unité de PMA.
Une nouvelle unité qui mise sur le bien-être
En parallèle de son nouvel environnement apaisant, l’unité de FIV et andrologie des Cliniques Saint-Luc a mis en place un accompagnement adapté pour réduire au maximum le stress des patients et améliorer leur ressenti durant les traitements. Ce bien-être passe par trois éléments : la communication thérapeutique, l’hypnose et la réalité virtuelle.
Depuis plusieurs années, les infirmières de l’Unité de FIV sont formées à la communication thérapeutique, qui implique d’employer en permanence un langage bienveillant de manière à améliorer le vécu des patients durant les prises en charge. "Les termes susceptibles d’aggraver le stress sont remplacés par d’autres mots plus positifs. Par exemple, la question ‘avez-vous mal ?’ devient ‘êtes-vous confortable ?’ Cela permet de canaliser la personne dans un état de bienveillance", explique le Pr Pirard. Autre versant de cette communication adaptée : l’écoute. "Il s’agit d’être à disposition de leur vécu, pouvoir entendre leurs plaintes et les accompagner."
Outre l’hypnose, le Service de gynécologie et andrologie teste un protocole de réalité virtuelle dans le but d’augmenter les taux de grossesses. Concrètement, les patientes portent un casque de réalité virtuelle 20 minutes avant de rentrer en salle de ponction. Interactif, le casque envoie des informations visuelles et auditives qui évoluent en fonction des mouvements de la patiente. "Le but est de les déconnecter, les isoler dans un environnement positif, qu’elles aient un moment à elles avant l’opération", résume le Pr Pirard. L’étude analysera les taux de grossesses de 600 patientes ayant bénéficié de cette technique.