L’effet retard ou la difficile gestion du timing d’une épidémie: "C’est normal si le nombre de cas continue à augmenter"
"Il faut se rendre compte qu’on est quand même plutôt sur un marathon et qu’on se trouve au début. Les mesures qui sont prises aujourd’hui vont mettre du temps à se traduire dans les chiffres. Donc, il ne faudra pas s’étonner si dans les prochains jours le nombre de cas continue à augmenter. C’est normal. Ce n’est pas nécessairement inquiétant. Il faut attendre que l’effet des mesures se traduise parce que le temps d’incubation est relativement long." S’exprimant sur La Première vendredi matin, l’épidémiologiste Marius Gilbert (ULB) s’est montré très clair : il ne faut pas attendre des mesures annoncées par les autorités jeudi soir qu’elles mettent un terme à la crise du coronavirus sur un claquement de doigts.
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- Publié le 13-03-2020 à 18h45
- Mis à jour le 15-03-2020 à 17h38
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"Il faut se rendre compte qu’on est quand même plutôt sur un marathon et qu’on se trouve au début. Les mesures qui sont prises aujourd’hui vont mettre du temps à se traduire dans les chiffres. Donc, il ne faudra pas s’étonner si dans les prochains jours le nombre de cas continue à augmenter. C’est normal. Ce n’est pas nécessairement inquiétant. Il faut attendre que l’effet des mesures se traduise parce que le temps d’incubation est relativement long."
S’exprimant sur La Première vendredi matin, l’épidémiologiste Marius Gilbert (ULB) s’est montré très clair : il ne faut pas attendre des mesures annoncées par les autorités jeudi soir qu’elles mettent un terme à la crise du coronavirus sur un claquement de doigts. Les résultats ne devraient pas être perceptibles avant une semaine. Et il n’est pas impossible que ces mesures soient prolongées, voire durcies, au-delà du 3 avril.
Tout l’enjeu, rappelait-il encore, est de freiner la propagation de la maladie afin d’éviter que les structures de santé soient complètement débordées.
La question se pose dès lors de savoir si la Belgique n’a pas attendu trop longtemps avant d’agir. "Il est normal que les mesures soient prises de façon progressive, comme ça a été le cas ces derniers jours", répond Sophie Vanwambeke, géographe et spécialiste de l’épidémiologie spatiale à l’UCLouvain.
Ces décisions, souligne-t-elle, doivent être prises sur base de données partielles, "selon la connaissance que l’on a de l’ampleur de l’épidémie, en tenant compte du fait que les cas symptomatiques ne représentent qu’une partie des personnes infectantes".
De nombreux paramètres entrent en ligne de compte
Les modèles utilisés pour anticiper cette évolution peuvent aider, mais il demeure des incertitudes qui compliquent la tâche des scientifiques. Ceux-ci doivent tenir compte du taux de contact - qui va en partie influer sur le nombre de personnes contaminées par une personne infectée, de la durée d’incubation (estimée à environ cinq jours pour le Covid-19), de l’intervalle qui s’écoule entre un cas et le suivant dans une chaîne d’infection, de la période de temps entre le diagnostic et la mise en confinement…
"Lors du démarrage d’une épidémie, cela fait sens de se concentrer sur les individus infectés, de rapidement les isoler (diminuer autant que possible les contacts), et d’identifier toutes les personnes avec qui le patient touché a été en contact à partir du moment où il était contagieux." La clef du succès de cette stratégie repose sur l’identification de ces contacts, ajoute la scientifique, précisant que ce travail peut être compliqué : il est aisé d’identifier les membres de la famille ou les collègues, moins les voisins de métro…
"À partir du moment où on identifie le fait que le virus circule au-delà des contacts que l’on a pu identifier, que le nombre de cas qu’on ne peut pas attacher à d’autres cas connus augmente, cela commence à avoir du sens de réfléchir à diminuer les contacts pas seulement des malades, mais de la population dans son ensemble, en sachant qu’au sein de celle-ci se trouvent des cas que nous ne pouvons pas identifier directement."
Puis, il faut laisser le temps faire son œuvre. "Imaginons que nous pouvons instantanément cesser tout contact. Avant que nous n’observions plus aucun cas, il faudra attendre que toutes les infections s’étant produites avant la cessation des contacts aient incubé et se manifestent, soit une période tournant autour de cinq jours mais pouvant aller jusqu’à dix jours, avec une diminution progressive."
