La transfusion de plasma de patients guéris: un nouvel espoir de traitement du coronavirus?

Atteints par le coronavirus, deux malades sud-coréens âgés se sont remis d'une pneumonie sévère après avoir été traités grâce au plasma sanguin de patients guéris de la maladie. Voilà une nouvelle qui suscite un nouvel espoir de traitement alors qu'aujourd'hui, près de 180 projets et essais cliniques sont dans le pipe-line pour tenter de trouver parmi la soixantaine de médicaments testés, celui qui est le plus efficace et surtout le plus rapidement disponible pour traiter l'infection par le SARS-CoV-2.

D'où vient cette approche?

La thérapie passive par transfert d'anticorps neutralisants n'est pas nouvelle. Elle s'est en effet déjà avérée efficace pour endiguer des épidémies de rougeole, poliomyélite, oreillon et grippe et plus récemment en 2009-2010 la pandémie H1N1, en 2013, Ebola et les épidémies de SRAS (2003) et de MERS (2012).

Quel est le principe?

La technique tire parti de la présence d'anticorps neutralisants dans le plasma sanguin de patients infectés convalescents. Le plasma est la partie liquide du sang qui permet aux globules rouges et blancs et aux plaquettes de circuler dans le système vasculaire. Collecté par plasmaphérèse (ndlr : technique consistant à séparer et à extraire le plasma contenu dans un prélèvement sanguin, à l'aide d’un appareil spécifique), le plasma est purifié et ensuite transfusé chez le malade. Le principe consiste donc à injecter aux malades en phase aiguë le plasma de patients ayant surmonté la maladie, qui contient des anticorps potentiellement bénéfiques. Une personne ayant contracté le coronavirus Covid-19 et guérie depuis au moins deux semaines présente une quantité suffisante d'anticorps pour les utiliser chez d'autres patients. Ces anticorps, qui se trouvent dans le plasma sanguin, peuvent donc être récupérés lors d'un don, semblable au don de sang classique.

Quelle est la place de cette méthode et quel est l'espoir?

La thérapie au plasma pourrait constituer "un traitement alternatif pour les patients en état critique qui ne réagissent pas favorablement aux médicaments antiviraux", a indiqué Choi Jun-Yong, médecin-chercheur de l'hôpital Severance de Séoul, où les deux malades ont été soignés de cette façon. "Mais des essais cliniques à grande échelle sont nécessaires pour démontrer son efficacité", a-t-il cependant ajouté.

Que sait-on jusqu'ici de son efficacité dans la pandémie de Covid-19?

Des petites études menées en Chine sur une dizaine de patients ont donné des résultats suffisamment prometteurs pour qu'une équipe de la prestigieuse Université américaine Johns Hopkins ait repris cette recherche, argumentant que "la thérapie passive pourrait très vite revenir sur le devant de la scène et devenir un outil crucial et pratique dans la lutte contre le COVID-19". Cela dit, aucune série significative n'a encore été publiée officiellement.

En ce qui concerne l'étude menée en Chine, après quelques jours, les patients ont vu une amélioration de leur état de santé général: diminution de la fièvre, de la toux, de l'essoufflement et des douleurs thoraciques. Des scanners ont en outre montré une diminution des lésions pulmonaires. Aucun effet secondaire n'aurait été signalé.

Quels sont les avantages?

Le plasma est disponible, la méthode est connue. Elle reste simple et raisonnablement coûteuse, en comparaison avec certains antiviraux. Elle recourt aux dons de sang. Les effets sont rapides: moins de toux, moins de fièvre et les symptômes de pneumonie nettement améliorés.

Quels sont les risques et les inconvénients?

Comme pour toute transfusion de sang et produits dérivés, il y a les risques de présence d'agents infectieux, d'anticorps irréguliers, de réactions allergiques etc. Mais avec les techniques actuelles, ces risques sont minimes.

On pourrait aussi, selon certains, craindre que l'administration d'anticorps à des personnes exposées au SARS-CoV-2 n'atténue la réponse immunitaire laissant ces personnes vulnérables à une réinfection.

"Les anticorps ne suffisent pas, a déclaré à nos confrères du Morgen Bart Lambrecht (UZ Gent). On doit savoir si le plasma du donneur contient suffisamment d'anticorps protecteurs. Les anticorps ordinaires peuvent avoir un effet contre-productif. Par exemple, il existe des anticorps qui reconnaissent le virus mais ne le neutralisent pas". Prudence, donc.

Quand démarrent les essais ?

En attendant un vaccin éventuel, un essai clinique consistant à transfuser du plasma sanguin de personnes guéries vers des "patients en phase aiguë de la maladie" a démarré mardi, en France. Les résultats de cette étude menée auprès d'une soixantaine de malades seront connus dans moins d'un mois en principe. Intitulée "Covid plasma", cette étude est encadrée par l'Etablissement français du sang (EFS) et menée en Ile-de-France, dans le Grand Est, mais aussi en Bourgogne-Franche-Comté.

Des essais sont aussi menés notamment aux Pays-Bas, aux Etats-Unis et se poursuivent en Chine.

En Belgique, cette méthode sera également testée dans plusieurs hôpitaux, dans un premier temps chez des patients en phase critique aux soins intensifs, et dans un deuxième temps, chez le personnel médical. En cas de résultats positifs, le plasma pourrait en effet être utilisé à titre préventif pour renforcer le système immunitaire du personnel soignant, entre autres. Et cela de manière temporaire, dans le cadre de cette vague épidémique.

Quoi qu'il en soit, les premières collectes de sang devraient commencer dès la semaine prochaine via la Croix-Rouge. A l'heure actuelle, il n'est pas envisagé de faire appel aux donneurs, lesquels seront sélectionnés dans les hôpitaux, selon des critères stricts.

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