Les cardiologues craignent une vague de patients dans les semaines à venir
Dans le cadre de la semaine du rythme cardiaque, la Belgian Heart Rhythm Association (BeHRA) lance une action nationale inédite de contrôle du rythme cardiaque à distance pour 10.000 personnes à risque.
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Publié le 01-06-2021 à 17h09 - Mis à jour le 01-06-2021 à 18h26
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La crise du covid et le report des soins ont impacté de nombreux secteurs médicaux. Avec trois fois plus de décès que n’en provoquent les accidents de la route, la cardiologie est sûrement l’un des plus concernés. À l’occasion de la Semaine du Rythme Cardiaque, la Belgian Heart Rhythm Association (BeHRA) fait le point dans son domaine d’activité après une année de pandémie Covid et souhaite sensibiliser davantage les Belges en matière de prévention, de formation et de dépistage mais aussi et surtout pour promouvoir le rythme cardiaque. Il faut dire que le taux de survie suite à une crise cardiaque est assez faible chez nous, il atteint péniblement moins de 10% quand certains pays très performants comme l’Allemagne ou les Pays-Bas sont à près de 30%. “La Belgique fait clairement partie des mauvais élèves”, pointe du doigt le Docteur Blankoff, cardiologue au CHU Charleroi et président de la Belgian Heart Rhythm Association.
Et depuis un an, la pandémie a eu de nombreux effets indirects. Tout d’abord, une hausse des arrêts cardiaques extra-hospitaliers (pour lesquels on rappelle que les chances de survie diminuent de 10 % à chaque minute passée sans massage cardiaque ou défibrillation/choc électrique externe), ainsi qu’une diminution très marquée des consultations et des diagnostics de problèmes cardiaques (jusqu’à plus de 50% selon une récente étude menée dans 108 pays et publiée par Elsevier pour The American College of Cardiology Foundation). “On a constaté que moins de patients se rendaient à l’hôpital pour des infarctus mais ce n’est pas pour ça qu’ils ont diminué. Ils ont eu lieu mais les gens ne sont pas venus à l’hôpital (souvent par peur du covid) ou sont arrivés trop tard, on note une baisse de 25% dans les hôpitaux du nombre d’infarctus. Il faut savoir que quand l’artère se bouche, le muscle cardiaque meurt et quelques heures après, l’intervention perd de son utilité, c’est pour cela qu’il faut agir au plus vite”.
Les conséquences d’un arrêt cardiaque dépendent en effet de la rapidité d’intervention, le risque de décès grimpant à 95 % si la victime reste sans aide durant les 6 minutes qui suivent l’arrêt cardiaque. Un élément primordial surtout quand on sait que l’inactivité physique, fortement encouragée par les confinements à répétition, augmente le risque de maladie cardio-vasculaire de 24%, la pandémie n’aura donc pas fait le jeu de la santé cardio-vasculaire.
Le Belgique mauvais élève en matière de taux de survie suite à une crise cardiaque
Si la fin de la première vague de Covid s’est donc traduite par une explosion des arrêts cardiaques extras-hospitaliers à cause du covid ou provoqués par des infarctus, les semaines à venir risquent d’être similaires. “Même si c'est difficile à quantifier, les maladies cardiaques et les arythmies seront malheureusement en hausse dans les semaines à venir au vu du retard dans la prise en charge. Et dans ce secteur, les conséquences sont graves et immédiates, il y aura un impact certain et à court terme sur la cardiologie quand c’est plus long pour d’autres maladies, comme les cancers”, craint le Docteur Ivan Blankoff. A ce stade, les hôpitaux sont quasiment revenus dans une situation normale pour accueillir les patients quand d’autres en ont profité pour créer de nouveaux espaces de consultations et davantage de salles d’attente. “Actuellement, la charge de travail est indubitable et on s’attend à ce que ça continue. J’ai encore travaillé le week-end dernier, la charge est énorme mais on est prêt, on est capable de gérer ça. Les patients doivent savoir qu’ils peuvent venir et seront accueillis de manière très rapide, d’autant plus qu’on espère fermer nos salles covid à la fin du mois de juin”.
Depuis près de douze ans, la Belgian Heart Rhythm Association organise la Semaine du Rythme Cardiaque, afin de sensibiliser la population belge à la fibrillation auriculaire (ou atriale) d’une part, et à l’arrêt cardiaque (cause quasiment certaine de mort subite) d’autre part. Ainsi, plus de 100.000 Belges ont contrôlé leur rythme cardiaque dans plus de 90 hôpitaux partenaires, près de 12.000 Belges ont été initiés à la réanimation, et des formations aux gestes qui sauvent ont été organisées dans 25 écoles partenaires.
Cette année, la Semaine du Rythme Cardiaque se réinvente et organise deux actions nationales importantes, à savoir la possibilité, de juin à septembre, de contrôler son rythme cardiaque gratuitement pendant une semaine en téléchargeant l’application FibriCheck, ainsi que la plus grande Séance de Réanimation en ligne le 16 octobre prochain à l’occasion du World Restart a Heart Day. Et en Belgique, les connaissances sont encore insuffisantes.
“En Belgique, la chaîne de survie est défaillante. Le souci n’est pas tant l’appel au 112 ni la prise en charge des victimes mais il concerne davantage la prise en charge de l'arrêt cardiaque par les premiers témoins. Chez nous, il y a une mauvaise formation face à l’arrêt cardiaque.Face à ce phénomène, nous formons les élèves du secondaire et nous sommes actuellement à 40% d’écoles touchées dans la partie francophone du pays. Nous devons continuer et nous espérons toucher l’ensemble des instituts scolaires d’ici deux ans, ainsi, la population belge sera formée à réagir à l’avenir et on arrivera à 20 voire 30% de taux de survie. Il faut savoir que dans certains pays scandinaves, il est obligé de montrer un certificat d'aptitudes et de formation complète pour décrocher un job, il faut suivre ce modèle en Belgique mais avant tout offrir une formation complète”, conclut le président de la Belgian Heart Rhythm Association.