Vers une dose supplémentaire de vaccin pour près de 2 millions de Belges?
Des études mettent en évidence une diminution significative de l’efficacité des vaccins AstraZeneca et Janssen contre l’infection au Covid. Le Conseil supérieur de la santé discutera ce mardi de l’opportunité d’une dose de rappel pour ceux-ci.
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Publié le 08-11-2021 à 21h01 - Mis à jour le 09-11-2021 à 12h39
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Les courbes d’efficacité des vaccins à quelques mois de leur administration ne mentent pas. Plongeant de manière vertigineuse vers le bas pour ce qui concerne la protection contre l’infection au Covid, elles posent inévitablement la question de l’opportunité d’une dose de rappel - troisième ou deuxième dose selon les cas. Un "booster" qui serait davantage encore opportun, voire nécessaire, pour les vaccins à adénovirus que sont les produits Johnson & Johnson (Janssen) et AstraZeneca.
Alors que l’Allemagne propose depuis septembre un rappel composé d’une injection de Pfizer/BioNtech ou Moderna pour la population vaccinée avec le produit de Janssen ou d’AstraZeneca, le sujet sera sur la table en Belgique ce mardi, lors de la réunion du Conseil supérieur de la santé (CSS) qui rendra un avis. Lequel sera transmis dans la foulée à la task force vaccination, pour servir de base aux discussions qu’auront, mercredi, les différents ministres en charge de la Santé.
Plus que 13 % d’efficacité…
C'est que, six mois après son injection unique, le vaccin Johnson & Johnson ne semble plus protéger qu'à raison de… 13,1 % contre une nouvelle infection au coronavirus, selon une étude américaine publiée dans la revue Science.
Menée auprès de quelque 800 000 anciens combattants américains, vaccinés entre le 1er février et le 1er octobre 2021, période englobant le variant Delta, cette étude a comparé les taux d’efficacité par rapport à l’infection, six mois après la vaccination, mais aussi par rapport au risque de décès. Et cela, pour trois vaccins administrés aux États-Unis, en l’occurrence Pfizer BioNTech, Moderna et Janssen (J&J). Donc pas le vaccin AstraZeneca, absent sur le continent américain.
Efficacité sur le risque d’infection…
Si les données de l'étude confirment bien que, globalement, les personnes vaccinées ont moins de chances d'être contaminées par le virus que les sujets non vaccinés, "par rapport aux vaccins Pfizer et Moderna, le vaccin Janssen (Johnson & Johnson) a une efficacité diminuée de façon significative", admet le Pr Jean-Michel Dogné, directeur du département pharmacie de l'Université de Namur et expert du développement et de la sécurité des vaccins au sein de la task force vaccination. "Selon l'étude publiée dans la revue Science, pour la période du 1er février 2021 au 1er octobre 2021, il est exact que l'efficacité du vaccin contre l'infection a diminué au fil du temps pour tous les types de vaccins, avec les baisses les plus importantes pour Janssen suivi de Pfizer/BioNTech et Moderna. Plus précisément, en mars, l'efficacité était de 86,4 % pour Janssen, 89,2 % pour Moderna et 86,9 % pour Pfizer/BioNTech. En septembre, l'efficacité avait baissé à 13,1 % pour Janssen, 58,0 % pour Moderna et 43,3 % pour Pfizer/BioNTech."
Par contre, par rapport aux risques de développer une forme plus sévère de la maladie et de décès, les chiffres sont plus rassurants.
De cette étude, il ressort en effet que les trois vaccins étudiés continuent de protéger contre les risques d’hospitalisation et de décès, encore plusieurs mois après la vaccination. Au mois de juillet, au sommet de la vague du variant Delta, la protection contre le risque de décès était en effet, pour les moins de 65 ans, de 73 % pour Janssen, 81,5 % pour Moderna et 84,3 % pour Pfizer/BioNTech. Pour les plus de 65 ans, les chiffres étaient respectivement de 52,2 %, 75,5 % et 70,1 %.
"Si la protection contre les décès reste significative pour les trois vaccins étudiés, c'est encore le vaccin J&J qui affiche la moins bonne efficacité", commente le membre de la task force vaccination, qui prendra part aux discussions pour la Belgique.
Près de 2 millions de Belges concernés
Dans notre pays, environ 1,5 million de personnes ont reçu le vaccin AstraZeneca et 400 000, le Johnson&Johnson.
Publiée par Public Health England, qui surveille l’efficacité des vaccins dans le temps, une étude britannique montre que, vingt semaines après la deuxième dose de vaccin AstraZeneca, l’efficacité contre la maladie symptomatique due au variant Delta chez les plus de 16 ans est de l’ordre d’environ 50 %, contre 60 à 70 % juste après la vaccination. Pour Pfizer, on passe en vingt semaines de 90 à environ 70 % d’efficacité contre l’infection.
Une nouvelle dose ou pas ?
Quelles conclusions tirer de ces chiffres ? "Ce qu'il faut retenir, nous répond le Pr Jean-Michel Dogné, c'est que l'on voit, par rapport au variant Delta, une perte d'efficacité dans le temps, générale mais variable selon les vaccins, sur les formes symptomatiques de la maladie. Par contre, pour ce qui est des hospitalisations, on voit qu'après vingt semaines, le vaccin AstraZeneca reste efficace à raison de 80 %. Pour le Pfizer, ce chiffre est de 90 %."
C’est certainement sur la base de ce type de chiffres que ce mardi, au Conseil supérieur de la santé, la question de savoir si, oui ou non, il y a un intérêt à revacciner la population générale avec les deux vaccins à adénovirus, ou avec l’un des deux, sera débattue. Mais encore faudra-t-il que les données aujourd’hui disponibles soient jugées suffisantes.